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BRUCKNER SYMPHONIE N° 9 ELIAHU INBAL Side by Side Orchestre national de Lyon / Orchestre du CNSMD de Lyon | jeudi 11 janvier 20h | symphonique

BRUCKNER SYMPHONIE N° 9 ELIAHU INBAL - Auditorium · 6 7 d’en «jouer» comme d’un orgue, et un rôle prédominant accordé au choral (écriture instrumentale inspiré par le

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BRUCKNER SYMPHONIE N° 9ELIAHU INBALSide by Side Orchestre national de Lyon / Orchestre du CNSMD de Lyon| jeudi 11 janvier 20h | symphonique

Anton Bruckner (1824-1896)Symphonie n° 9, en ré mineur(Version de Leopold Nowak) I. Feierlich, misterioso [Solennel, mystérieux]

II. Scherzo : Bewegt, lebhaft [Agité, vif] – Trio : Schnell [Rapide]

III. Adagio. Langsam, feierlich [Lent, solennel]

[70 minutes]

Orchestre du Conservatoire national supérieur musique et danse de Lyon Orchestre national de Lyon Eliahu Inbal, direction

L’Auditorium-Orchestre national de Lyon est un établissement de la Ville de

Lyon, subventionné par l’État. Licences n° 1064009–1064010–1064011

Photo couverture : Eliahu Inbal © Z. Schrapek

Interlude propose un service de bar et de restauration légère avant et après

le concert et pendant l’éventuel entracte. Nous vous rappelons néanmoins

qu’il est interdit d’emporter toute boisson et toute nourriture en salle.

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est une fenêtre ouverte sur l’actualité des arts.

Ouverte au moment des concerts, elle propose une offre pluridisciplinaire

autour de quatre univers : la musique, la littérature, les arts et la jeunesse.

Des dédicaces d’artistes de la saison sont également organisées lors de

certains concerts.

Depuis sa création en 1980, le Conservatoire national supérieur musique et danse de Lyon privilégie le travail d’orchestre dans le cursus de ses étudiants musiciens. Sous la houlette de Péter Csaba et de chefs invités, ils préparent des programmes ambitieux et variés. Les liens tissés depuis 2011 avec l’Auditorium-Orchestre national de Lyon permettent à l’Orchestre du CNSMD de se produire chaque saison sur la scène de l’Auditorium, et de faire l’expérience de conditions de concert professionnelles en rencontrant le public d’une salle de 2100 places.

Le projet Side by Side vise à donner aux étudiants du CNSMD de Lyon une expérience supplémentaire dans leur formation au métier de musicien d’orchestre. Durant une semaine, ils ont préparé le concert de ce soir aux côtés des musiciens de l’Orchestre national de Lyon. Ce tutorat leur a permis de se confronter directement à la pratique professionnelle en orchestre, qui ne consiste pas seulement à jouer d’un instrument au plus haut niveau. Être musicien d’orchestre c’est aussi une écoute, une adaptabilité, une discipline de pupitre, une capacité à réagir en groupe, une générosité que la Neuvième Symphonie de Bruckner permet idéalement d’acquérir.

Le projet Side by Side est en outre l’occasion d’un partenariat avec le département de Culture musicale, dont l’un des étudiants, Maxime Marchand, assure le propos d’avant-concert et la rédaction des notes de programme.

| L’art symphonique de Bruckner

C’est alors que surgit ce paysan, avec des solutions absolument innovantes... Tels sont les mots du chef roumain Sergiu Celibidache à propos du legs symphonique de son compositeur de prédilection, n’hésitant pas à critiquer ceux qui s’attaquaient sans préparation ni réflexion suffisante à ces «cathédrales sonores de musique pure». En effet, beaucoup de musiciens les considèrent comme des monstres gigantesques et redoutables… Il faut dire que leur durée, leur aspect rigide et monolithique, leur prétendue ressemblance (non, Bruckner n’a pas écrit neuf ou dix fois la même symphonie !), leurs multiples révisions et le fait qu’elles furent le réceptacle d’une ferveur religieuse incommensurable ont de quoi rebuter, sinon effrayer.

À la mort de Bruckner, c’est tout un pan de l’art symphonique qui s’éteint  : alors que Brahms, symphoniste adulé, choisit de faire ses adieux avec Quatre Chants sérieux [Vier ernste Gesänge] et que Richard Strauss ensevelit définitivement le pathos romantique sous sa Symphonie alpestre [Eine Alpensinfonie] qui tient plus du poème symphonique que de la symphonie au sens de Beethoven, on pourrait considérer le langage brucknérien comme dépassé… Mais se demander ainsi si la Neuvième Symphonie vaut la peine d’être écrite par un Bruckner à l’article de la mort, alors même que la Deuxième Symphonie de Mahler a déjà été créée avec succès à Berlin, revient finalement à négliger les fantastiques pages symphoniques à venir de son élève, de Sibelius ou encore, plus tard, de Chostakovitch, qui témoigneront de la pérennité du genre.

Espaces sonores aux multiples facettes, à la fois synthèses, hommages et laboratoires, les symphonies de Bruckner sont de véritables temples dont les atours laissent pantois  : bruissements lointains de cordes, appels de cors, déferlements soudains et colorés de cuivres, mélodies douces et chantantes aux bois ; le tout nimbé d’un épais halo de mystère. Chacune d’entre elles constitue en quelque sorte la réponse de Bruckner à l’idéal symphonique légué par Beethoven, s’appuyant sur les précédentes pour développer cette immensité et cette audace toujours plus loin, jusqu’à la crise – ou la malédiction ? – de la Neuvième Symphonie… On y retrouve entre autres, savamment et rigoureusement ordonnés : – l’héritage rhétorique et formel de Beethoven  (motifs thématiques structurant la forme, travail intervallique essentiellement basé sur quartes, quintes et octaves, formes sonates boursouflées) ; – l’héritage schubertien du développement mélodique, le trithématisme et l’atmosphère du ländler (danse traditionnelle populaire originaire d’Autriche, probablement à l’origine de la valse) ;– une obsession logique et mathématique de l’écriture musicale (jusque dans le décompte de ses symphonies  : 00, 0, 1...)  et une rigueur contrapuntique  issue de sa pratique de l’orgue et des études qu’il entreprit entre 1855 et 1861 auprès de Simon Sechter (théoricien, organiste et compositeur autrichien) alors même qu’il avait déjà à son actif de nombreuses œuvres liturgiques et profanes ;– un usage du chromatisme et une nomenclature orchestrale dignes de Wagner (à qui est dédiée la Troisième Symphonie) ; – un sens audacieux de la modulation, que l’on retrouvera par exemple chez Mahler,  et des innovations harmoniques poussées aux frontières de l’atonalité, qui préfigurent les processus employés plus tard par la Seconde École de Vienne (Schönberg, Berg et Webern) ; – une manière de considérer l’orchestre et

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Anton BrucknerSymphonie n° 9, en ré mineur(Version de Leopold Nowak) Composition  : premières esquisses dès le 12 août 1887,

composition des trois premiers mouvements entre 1891

et le 31 octobre 1894. Création : Vienne, 11 février 1903,

par l’Orchestre philharmonique de Vienne, sous la direction

de Ferdinand Löwe (dans une version réorchestrée et

édulcorée par le chef) ; version originale : Munich, 2 avril

1932 par l’Orchestre philharmonique de Munich sous la

direction de Siegmund von Hausegger (précédée lors du

même concert de la version Löwe). Dédicace : «Dem lieben

Gott» [«Au Bon Dieu»].

Bruckner, ce pauvre fou que les soutanes de Saint-Florian ont sur la conscience.Cette raillerie, que l’on doit à Brahms, rival de Bruckner sans doute soucieux de demeurer le seul grand compositeur viennois de son temps, dépeint exactement sa situation dans la Vienne de son époque. Bien qu’il ait été révéré par ses élèves (parmi lesquels Mahler) et par des chefs d’orchestre réputés (comme Arthur Nikisch), Bruckner essuya de nombreuses et féroces attaques de ses pairs. Lorsqu’il amorce l’écriture de la Neuvième Symphonie en 1887, peu de ses œuvres ont été jouées et appréciées par le public autrichien.

Reconnu depuis peu comme l’un des grands symphonistes de la fin du xixe siècle, grâce aux efforts conjugués de musicologues, d’écrivains, de chefs d’orchestre et d’interprètes, celui que l’on surnomme le «Ménestrel de Dieu» fut un des compositeurs les plus dédaignés, sinon controversés, de son vivant et pendant le premier xxe siècle, souffrant d’une image réduite à ses névroses obsessionnelles et à sa foi prétendument aveugle, ainsi qu’à une image de «sous-Beethoven wagnérisé». Il fut ainsi très rarement joué en France jusqu’aux années 1960.

Mais pourquoi peut-on se sentir étranger à ce point à l’univers brucknérien ? Peut-être en premier lieu parce qu’il s’agit d’un univers de musique «pure» (qui ne s’appuie sur aucun élément extra-musical, comme un texte ou un poème), clos sur lui-même, aux dimensions phénoménales (les symphonies durent en moyenne une heure). Peut-être aussi parce que sa conception musicale et orchestrale paraît de prime abord se complaire dans de grands blocs répétitifs, massifs et peu complexes, sans cesse interrompus. Une telle musique peut cependant être appréciée si l’on accepte de se laisser emporter par elle, de la recevoir sans chercher à la raisonner complètement. C’est l’expérience que nous vous proposons à l’occasion de ce concert Side by Side où musiciens de l’Orchestre national de Lyon et étudiants du Conservatoire national supérieur musique et danse de Lyon unissent leurs forces sous la direction d’Eliahu Inbal.

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d’en «jouer» comme d’un orgue, et un rôle prédominant accordé au choral (écriture instrumentale inspiré par le chant liturgique protestant du même nom, qui consiste en une écriture simple par succession d’accords et que Bruckner confie principalement aux cuivres – et particulièrement aux trombones) ;– un déroulement novateur du temps musical dans des mouvements aux dimensions considérables, grâce aux très longues phrases, à l’usage du silence (on pense à la Deuxième Symphonie, surnommée «symphonie des pauses»), de rythmes frénétiques et insistants (comme dans le scherzo de la Neuvième Symphonie), à la fulgurance des changements de dynamique, et à l’alternance entre déferlements d’énergie et longues plages contemplatives et méditatives, aussi souvent surprenants que soudainement interrompus, qui tiennent l’auditeur en haleine.

| La Neuvième Symphonie : fenêtre sur le passé, le Ciel et la modernité

Cette symphonie «dédiée à Dieu, s’il l ’accepte», inachevée et célèbre entre toutes, est devenue une œuvre mythique du répertoire, oscillant entre foi naïve et allégories macabres, entre espoir de transcendance et angoisse de la condition terrestre.

Pensée comme un hommage à la légendaire Neuvième Symphonie de Beethoven, elle fut d’abord esquissée en août 1887, avant que le compositeur n’ajourne son travail. Traumatisé par le refus de la partition de sa Huitième Symphonie par le chef Hermann Levi et poussé par des «amis» soucieux qu’il «lisse» ses œuvres pour les faire mieux accepter du public, Bruckner entame alors un lourd travail sur sa production antérieure. La Huitième Symphonie sera remodelée pendant trois ans, d’autres œuvres seront révisées et (rééditées, et Bruckner composera pendant cette période le Psaume 150 et la cantate profane Helgoland en 1892-1893, tout en travaillant par bribes à sa dernière création.

Ainsi, la Neuvième Symphonie aura préoccupé Bruckner pendant près de dix ans de sa vie, et jusqu’à sa mort, à 72 ans  : le matin même du jour fatidique, il travaillait encore sur le finale. Il faut également se rappeler que Bruckner est un compositeur très tardif : à 30 ans passés, il se remit lui-même sur les bancs de l’école et estima indispensable de se doter des moyens de ses ambitions. Il aborda donc la composition vers 40 ans, muni d’un bagage technique dépassant celui de tous ses contemporains – à l’exception peut-être de Brahms. Dans cette dernière symphonie si particulière, le compositeur fait alors appel à tout son corpus symphonique et dresse un véritable catalogue de ses procédés musicaux : du geste initial en trémolos jusqu’à l’écriture en blocs, en passant par de lents chorals et des cuivres puissants (que le compositeur Helmut Lachenmann appelait d’ailleurs le «poumon surhumain» de Bruckner  !). Ces éléments sont d’autant plus compréhensibles quand on sait qu’il était organiste à l’abbaye de Saint-Florian, où il repose désormais, et dont l’acoustique a inspiré et modelé toutes ses œuvres.

Néanmoins, cette symphonie trouve sa véritable ambiguïté dans le concept de modernité  : Bruckner y était complètement étranger, et pourtant elle irrigue l’écriture musicale jusque dans les moindres détails. Ainsi Adorno analysait-il cette dichotomie, qui va croissant au fil des trois mouvements, en concluant que la Neuvième Symphonie – et Bruckner lui-même – ne trouvent véritablement leur substance «qu’en tant que moderne[s] et dans [leur] contradiction avec le modernisme». Certains analystes, comme Edward Laufer, estiment même que la complexité de l’œuvre dépasse de loin ce que l’on peut s’imaginer  : de multiples niveaux de conception, où des motifs musicaux de premier plan avanceraient également cachés en profondeur, témoins discrets d’un spectaculaire système compositionnel. Harry Halbreich voyait ainsi en l’inachèvement du finale la simple conséquence de l’impossibilité qu’avait

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fortissimo, un choral fait de lignes descendantes, que Bruckner nomma l’«adieu à la vie», est entonné par les quatre tubas wagnériens (instruments à mi-chemin entre le timbre du cor et celui du tuba, inventés par Adolphe Sax en 1876 à la demande de Wagner, pour la Tétralogie L’Anneau du Nibelung).Après ce passage très recueilli, le second groupe thématique fait son apparition aux cordes. Grave et lyrique, il dialogue brièvement avec la flûte et le hautbois, avant de s’épancher dans une foi lumineuse et calme jusqu’à une cadence instrumentale confiée à la flûte, sur un accord dont l’orchestration évoque directement certains jeux de l’orgue. Le cheminement introspectif se poursuit au hasard de ce mouvement singulier, croisant tour à tour des passages méditatifs ou inquiétants, sereins ou dissonants, une citation du Miserere nobis de la Première Messe, de 1864, ainsi que des objets hétéroclites comme de larges accords dissonants à neuf sons aux cuivres, ou encore deux sons séparés d’un intervalle de seconde suspendus et répétés inlassablement aux bois, tels une prophétie atonale…Cet Adagio éblouissant se conclut en mi majeur dans une atmosphère presque irréelle, apaisée, dans les vapeurs de laquelle on distingue des fragments de l’«adieu à la vie» aux bois et tubas wagnériens, avant une citation de la coda de l’Adagio de la Huitième Symphonie – la «Symphonie des symphonies» selon son créateur Hans Richter – et du thème principal de la Septième Symphonie – le plus grand succès de Bruckner de son vivant. Réunissant ainsi figures du passé et ouvrant des fenêtres sur l’avenir, le maître de Saint-Florian aura finalement réussi à projeter son esprit et sa musique vers l’universel, et vers l’éternel.—Maxime Marchand, étudiant du département de Culture musicale du CNSMD de Lyon

Le contrepoint

Il s’agit d’une technique d’écriture musicale

fréquente dans les œuvres liturgiques et

particulièrement utilisée dans la musique

baroque, qui trouve ses origines dans la

polyphonie du Moyen-Âge. Le contrepoint

est l’art de superposer de manière organisée

des lignes mélodiques distinctes. On parle

alors de pensée «horizontale» de la musique,

contrairement à la pensée harmonique

«verticale» (qui s’intéresse aux successions

d’accords).

La malédiction de la Neuvième Symphonie

Bien que Beethoven ait achevé sa Neuvième

Symphonie en 1824, soit trois ans avant sa

mort, une vieille superstition agita l’histoire

de la musique, notamment au cours du «siècle

romantique» qui suivit. La croyance voulait

ainsi qu’après la mort du maître, la neuvième

symphonie d’un compositeur lui soit fatale…

Bien que de nombreux contre-exemples mettent

à mal sa véracité, la malédiction aurait tout de

même emporté Schubert, Dvořák et Bruckner.

Cependant, le cas le plus célèbre reste celui de

Gustav Mahler. Superstitieux, celui-ci prit des

mesures manifestes pour tenter d’infléchir son

funeste destin. Après avoir légué sa Huitième

Symphonie, il en composa une neuvième

pour contralto, ténor et grand orchestre, qu’il

intitula Le Chant de la Terre [Das Lied von der

Erde]… sans lui attribuer de numéro ! Estimant

sûrement avoir ainsi trompé le sort, il acheva

une dixième symphonie qu’il osa appeler sa

Neuvième… avant de se laisser ironiquement

rattraper par son destin, décédant avant d’avoir

pu compléter la suivante !

Bruckner à gérer et à concrétiser la «saturation» de son propre modèle musical. Cette hypothèse ne tient en revanche plus de nos jours, alors que de nombreuses esquisses ont été retrouvées et que plusieurs tentatives de reconstructions de ce dernier mouvement, largement documentées, ont vu le jour et ont été enregistrées. Le finale était en voie d’achèvement à la mort du compositeur, qui se savait cependant dans l’incapacité de jouer contre la montre et proposa l’exécution de son Te Deum (WAB 45) en guise de dernier mouvement.

| Pistes d’écoute I. Feierlich, misterioso [Solennel, mystérieux]Le premier mouvement débute par une introduction lente et sombre, avant un premier thème apocalyptique dans le ton principal de ré mineur, dont on retiendra le rythme brucknérien «longue-longue-triolet», les valeurs surpointées, le chromatisme et les sauts d’octaves.Pizzicati de cordes et appels plaintifs diluent progressivement le matériau thématique avant l’arrivée d’une deuxième idée contrastante en la majeur, lyrique et lumineuse. Celle-ci s’épanche et s’envole littéralement aux cordes, avant que la troisième idée ne vienne refermer l’exposition dans le ton principal par une marche à la progression inéluctable, qui fait alterner moments contemplatifs et plus tragiques, grâce au retour des cuivres.S’ensuit un développement qui s’amorce dans un climat mystérieux, avant d’accumuler de la tension jusqu’à l’explosion, qui permet alors le retour à une atmosphère empreinte de prière et de recueillement. La coda, âpre et dissonante, diverge radicalement de la «tradition» des dernières mesures triomphales et éclatantes des symphonies n° 4 à 7.

II. Scherzo  : Bewegt, lebhaft [Agité, vif»] – Trio : Schnell [Rapide]Comme dans la Huitième Symphonie, le scherzo

prend la deuxième position dans l’ordre de la symphonie. Une atmosphère brumeuse de pizzicati (cordes pincées) et de fonds de bois, aux enchaînements harmoniques audacieux pour l’époque, s’installe. Émerge alors une «fanfare» apocalyptique, presque diabolique, où les cuivres martèlent les dissonances et les cordes et vents s’embarquent dans une sorte de danse primitive et brutale qui reprend le motif initial. Naît alors un moment de trouble harmonique, qui laisse place à un court passage dans l’esprit du ländler, confié à un hautbois léger et dansant. Trois versions du trio (section centrale de cette forme tripartite) ont été composées par Bruckner : si la première présentait des accents populaires, la dernière, en fa dièse majeur, est plus véloce, légère et «naïve» – on pourrait presque dire : fantomatique et ironique – s’éloignant des canons des symphonies précédentes.C’est alors le retour de l’atmosphère brumeuse initiale et la reprise stricte du scherzo, qui conclut le mouvement dans le ton principal de ré mineur, dans la fureur et les cris.

III. Adagio. Langsam, feierlich [Lent, solennel]L’Adagio est globalement en do dièse mineur  : on se souviendra de l’ethos beethovénien si particulier de cette tonalité, réservée aux passages les plus introspectifs de ses œuvres. Bruckner le fait débuter par une large phrase dont le geste initial est construit sur intervalle de neuvième mineure extrêmement tendu, comme une plainte assourdissante. Si celui-ci peut être vu – et entendu – comme un étrange miroir (dans le sens musical de renversement, mais aussi littéralement) du début du finale de la Cinquième Symphonie, on ne peut s’empêcher de sentir dans son étirement et son extraordinaire expressivité l’essence même de ce que chercheront Schönberg puis Webern à peine une décennie plus tard et qui révolutionnera définitivement le rapport à la musique et à la tonalité…Après la présentation douloureuse de cette première idée musicale qui culmine en un tutti

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Depuis qu’il a remporté le Concours de direction Guido-Cantelli à 26 ans, Eliahu Inbal a construit une carrière internationale. Au fil des années, il a été chef principal de l’Orchestre symphonique de la Radio de Francfort, de la Fenice de Venise, de l’Orchestre symphonique de la RAI de Turin, de l’Orchestre du Konzerthaus de Berlin, de l’Orchestre philharmonique tchèque et de l’Orchestre symphonique métropolitain de Tokyo.À la tête de l’Orchestre symphonique de la Radio de Francfort, dont il a été premier chef de 1974 à 1990 et dont il est aujourd’hui chef honoraire, Eliahu Inbal a été particulièrement salué pour ses interprétations et enregistrements de Mahler, Bruckner et Chostakovitch.En 2016, l’année de ses 80 ans, il a dirigé notamment l’Orchestre symphonique de la Radio de Stuttgart (SWR) à Bâle, Vienne et au Printemps des arts de Monte-Carlo  ; l’Orchestre philharmonique de Radio France dans la Neuvième Symphonie de Bruckner à la

Philharmonie de Paris et dans la Quatrième Symphonie au Konzerthaus de Berlin et à l’Alte Oper de Francfort, ainsi que l’Orchestre de la Fenice dans la Huitième Symphonie.Né en Israël, Eliahu Inbal a étudié le violon et la composition à l’Académie de musique de Jérusalem avant de poursuivre des études de direction, sur la recommandation de Leonard Bernstein, auprès de Louis Fourestier au Conservatoire de Paris, où il a été également l’élève d’Olivier Messiaen et Nadia Boulanger. Il a ensuite travaillé avec Franco Ferrara à Hilversum aux Pays-Bas et Sergiu Celibidache à Sienne (Italie).Eliahu Inbal a été promu officier dans l’ordre des Arts et des Lettres par le gouvernement français en 1990.

Bruckner et sa Neuvième Symphonie en

quelques dates

1824 : naissance à Ansfelden.

1848 : organiste à l’abbaye de Saint-Florian.

1856 : nommé organiste de la cathédrale de

Linz.

1864 : Première Messe.

1865 : Première Symphonie. Rencontre Wagner

suite à la première de Tristan et Isolde.

1868 : succède à Sechter comme professeur au

conservatoire de Vienne et devient organiste de

la cour.

1873 : Troisième Symphonie – dédiée à Wagner.

1881 : Te Deum.

1884 : Septième Symphonie.

1887 (août) : début du travail sur la Neuvième

Symphonie. Ébauches du premier mouvement.

1889 (avril) : ébauches du Scherzo.

1891 (février) : début de la composition de

l’adagio et du finale.

1892 : Psaume 150.

1893 (décembre) : le premier mouvement est

achevé.

1894 : le scherzo est terminé (février), puis

l’Adagio (novembre).

1896 (11 Octobre) : décès à Vienne. Bruckner

travaille encore le matin même à son finale, qu’il

laisse inachevé.

Le modèle brucknérien de la symphonie

Les symphonies de Bruckner sont articulées

autour d’un schéma type et de gestes musicaux

très caractérisés, auquel il ne déroge qu’en de

rares occasions :

– Premier mouvement : à 4/4 ou à 2/2, de forme

sonate trithématique (trois thèmes de caractères

contrastés sont exposés, puis développés, avant

d’être réexposés). Le premier groupe thématique

débute généralement sur un trémolo lointain de

cordes, avant d’«exploser» en tutti majestueux

ou épique après un grand crescendo. Le

deuxième est souvent plus mélodique et lyrique,

et d’essence contrapuntique. Le troisième

réintroduit conflit et animation, car souvent très

caractérisé rythmiquement.

– Scherzo : en mode mineur, à 3/4 (à l’exception

de celui de la Quatrième Symphonie) et très

animé. Le trio, plus mélodique présente

généralement un climat de ländler avant la

reprise du scherzo, parfois suivie par une coda.

– Mouvement lent : en général un Adagio à 4/4

reposant sur l’alternance entre deux ou trois

idées contrastantes, développées et magnifiées

à chaque occurrence. Ce mouvement adopte

parfois une forme sonate trithématique (comme

dans la Sixième Symphonie).

– Finale : il présente des caractéristiques

analogues au premier mouvement. Son

développement est généralement un lieu de

drame intense, et sa réexposition n’est jamais

stricte : les idées y sont condensées, inversées…

avant une coda souvent très élaborée, dans

laquelle le motif initial du premier mouvement

réapparaît pour y être sublimé (à partir de

la Deuxième Symphonie) et clore la grande

forme symphonique. Dans la Huitième, ce

sont les quatre motifs initiaux de chacun des

mouvements qui y refont irruption !

Eliahu Inbal, direction

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Leonard Slatkin, directeur musical honoraireDirecteur musical de l’Orchestre national de Lyon (ONL) de septembre 2011 à juin 2017, Leonard Slatkin en est à présent le directeur musical honoraire. La saison 2017/2018 est également la dixième et la dernière qu’il passe à la tête de l’Orchestre symphonique de Détroit (DSO). Cette saison est marquée en outre par la parution de son second livre, Leading Tones : Reflections on Music, Musicians, and the Music Industry [Notes sensibles : réflexions sur la musique, les musiciens et l ’industrie musicale, non traduit], la présidence du jury du Concours international de jeunes chefs d’orchestre de Besançon et des invitations à l’Orchestre symphonique de St. Louis, au National Symphony Orchestra (Washington), à l’Orchestre philharmonique de New York, à l’Orchestre national de la Radio polonaise, au Deutsches Symphonie-Orchester de Berlin et à l’Orchestre symphonique de la Radio finlandaise. Parmi les faits marquants de ces derniers mois, citons une tournée en Asie avec le DSO, des tournées aux États-Unis et en Europe avec l’ONL et des engagements avec l’Orchestre symphonique de St. Louis, l’Orchestre symphonique du WDR (Cologne), l’Orchestre Verdi (Milan) et l’Orchestre du Teatro di San Carlo (Naples). Il a par ailleurs présidé le jury du Concours international de piano Van-Cliburn 2017. Leonard Slatkin a fait plus de 100 enregistrements, qui lui ont valu 6 Grammy Awards et 33 nominations. Il a dirigé les principaux orchestres mondiaux. Comme directeur musical, il a été en poste à La Nouvelle-Orléans, St. Louis, Washington et Londres (Orchestre symphonique de la BBC). Il a été premier chef invité à Pittsburgh, Los Angeles, Minneapolis et Cleveland.Né à Los Angeles dans une éminente famille de musiciens, Leonard Slatkin a étudié la direction d’orchestre avec son père, puis avec Walter Susskind à Aspen et Jean Morel à la Juilliard School de New York.

Orchestre national de LyonFort de 104 musiciens permanents, l’Orchestre national de Lyon (ONL) a pour actuel directeur musical honoraire le chef américain Leonard Slatkin, qui a été directeur musical de septembre 2011 à juin 2017. Héritier de la Société des Grands Concerts de Lyon, fondée en 1905 par Georges Martin Witkowski, il est devenu permanent en 1969, sous l’impulsion de l’adjoint à la Culture de la Ville de Lyon, Robert Proton de la Chapelle. Après Louis Frémaux (1969-1971), il a eu pour directeurs musicaux Serge Baudo (1971-1987), Emmanuel Krivine (1987-2000), David Robertson (2000-2004) et Jun Märkl (2005-2011). L’ONL a le privilège de répéter et jouer dans une salle qui lui est dédiée, l’Auditorium de Lyon (2100 places).Apprécié pour la qualité très française de sa sonorité, qui en fait un interprète reconnu de Ravel, Debussy ou Berlioz, l’ONL explore un vaste répertoire, du xviiie siècle à nos jours. Il passe régulièrement commande à des compositeurs d’aujourd’hui, tels Kaija Saariaho, Thierry Escaich ou Guillaume Connesson, compositeur associé pour la saison 2017/2018. La richesse de son répertoire se reflète dans une vaste discographie, avec notamment des intégrales Ravel et Berlioz en cours chez Naxos. L’ONL privilégie les actions pédagogiques et la médiation. En 2017/2018, l’Auditorium-Orchestre national de Lyon lance le projet Démos (dispositif d’éducation musicale et orchestrale à vocation sociale) dans la Métropole de Lyon.Au-delà des concerts qu’il donne à l’Auditorium, l’ONL se produit dans les plus grandes salles mondiales. Premier orchestre symphonique européen à s’être produit en Chine, en 1979, il a fait en 2017 une tournée américaine qui l’a conduit dans la salle new-yorkaise mythique de Carnegie Hall.

L’Orchestre national de Lyon est un établissement de la Ville de Lyon, subventionné par l’État.

L’Orchestre national de LyonLeonard Slatkin directeur musical honoraire

L’Auditorium-Orchestre national de LyonAline Sam-Giao directrice générale ; Emmanuelle Durand secrétaire générale ; Mathieu Vivant directeur de production ;

Stéphanie Papin directrice administrative et financière ; Christian Thompson délégué artistique ;

et l’ensemble des équipes administratives et techniques.

Violons I

Violons solos supersolistes

Jennifer Gilbert

Giovanni Radivo

Premier violon solo

Jacques-Yves Rousseau

Deuxième violon solo

Jaha Lee

Violons du rang

Audrey Besse

Yves Chalamon

Amélie Chaussade

Pascal Chiari

Constantin Corfu

Andréane Détienne

Annabel Faurite

Sandrine Haffner

Yaël Lalande

Ludovic Lantner

Philip Lumbus

Roman Zgorzalek

Violons II

Premiers chefs d’attaque

F. Souvignet-Kowalski

Catherine Menneson

Deuxième chef d’attaque

Tamiko Kobayashi

Violons du rang

Bernard Boulfroy

Charles Castellon

Léonie Delaune

Catalina Escobar

Eliad Florea

Véronique Gourmanel

Kaé Kitamaki

Diego Matthey

Maïwenn Merer

Aurianne Philippe

Sébastien Plays

Haruyo Tsurusaki

Benjamin Zékri

Altos

Altos solos

Corinne Contardo

Jean-Pascal Oswald

Alto co-soliste

Fabrice Lamarre

Altos du rang

Catherine Bernold

Vincent Dedreuil-Monet

Marie Gaudin

Vincent Hugon

Valérie Jacquart

SeungEun Lee

Jean-Baptiste Magnon

Carole Millet

Lise Niqueux

Manuelle Renaud

Violoncelles

Violoncelles solos

Nicolas Hartmann

É. Sapey-Triomphe

Violoncelle co-soliste

Ph. Silvestre de Sacy

Violoncelles du rang

Thémis Bandini

Mathieu Chastagnol

Pierre Cordier

Dominique Denni

Stephen Eliason

Vincent Falque

Jérôme Portanier

Jean-Étienne Tempo

Contrebasses

Contrebasses solos

Botond Kostyák

Vladimir Toma

Contrebasse co-soliste

Pauline Depassio

Contrebasses du rang

Daniel Billon

Gérard Frey

Eva Janssens

Vincent Menneson

Benoist Nicolas

Marta Sánchez Gil

Flûtes

Flûtes solos

Jocelyn Aubrun

Emmanuelle Réville

Deuxième flûte

Harmonie Maltère

Piccolo

Benoît Le Touzé

Hautbois

Hautbois solos

Jérôme Guichard

Clarisse Moreau

Deuxième hautbois

Ph. Cairey-Remonay

Cor anglais

Pascal Zamora

Clarinettes

Clarinettes solos

Nans Moreau

François Sauzeau

Petite clarinette

Thierry Mussotte

Clarinette basse

NN

Bassons

Bassons solos

Olivier Massot

Louis-Hervé Maton

Deuxième basson

François Apap

Contrebasson

Stéphane Cornard

Cors

Cors solos

Joffrey Quartier

Guillaume Tétu

Cors aigus

Paul Tanguy

Yves Stocker

Cors graves

Jean-Olivier Beydon

Stéphane Grosset

Grégory Sarrazin

Trompettes

Trompettes solos

Sylvain Ketels

Christian Léger

Deuxièmes trompettes

Arnaud Geffray

Michel Haffner

Trombones

Trombones solos

Fabien Lafarge

Charlie Maussion

Deuxième trombone

Frédéric Boulan

Trombone basse

Mathieu Douchet

Tuba

Tuba solo

Guillaume Dionnet

Timbales et percussions

Timbalier solo

Adrien Pineau

Deuxième timbalier

Stéphane Pelegri

Première percussion

Thierry Huteau

Deuxièmes percussions

Guillaume Itier

François-Xavier Plancqueel

Claviers

Claviers solo

Élisabeth Rigollet

Harpe

Harpe solo

Éléonore Euler-Cabantous

ABONNEMENTS & RÉSERVATIONS 04 78 95 95 95

prochainement

| lu. 22 janv. 20hciné-concertUN SOIR À L’ELDORADOBURLESQUE, SPORT ET CINÉMA MUET

Karol Beffa, accompagnement improvisé au piano Thierry Frémaux, présentation

Dans le cadre du festival Sport, Littérature et Cinéma. En coproduction avec l ’Institut Lumière. Tarif : 16 € / réduit : de 8 € à 11 €

| je. 25 janv. 20h & sa. 27 janv. 18hsymphoniqueALAN GILBERT SOL GABETTA

Johannes Brahms Symphonie n° 3, en fa majeur, op. 90 Bohuslav Martinů Concerto pour violoncelle n° 1Johann Sebastian Bach Suite pour orchestre n° 3, en ré majeur, BWV 1068

Orchestre national de Lyon Alan Gilbert, direction Sol Gabetta, violoncelle

Tarif : de 16 € à 48 € / réduit : de 8 € à 41 €

| di. 28 janv. 16h musique de chambreBRAHMS

Ernő Dohnányi Sérénade pour trio à cordes op. 10 Johannes Brahms Sextuor à cordes n° 1, en si bémol, op. 18

Alan Gilbert, alto Sol Gabetta, violoncelle Musiciens de l’Orchestre national de Lyon : Jennifer Gilbert et Jacques-Yves Rousseau, violon – Jean-Pascal Oswald, alto – Nicolas Hartmann, violoncelle

Tarif : 16 € / réduit : de 8 € à 11 €

www.auditorium-lyon.com

Sol Gabetta © Uwe Arens