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i
UNIVERSITE D’ABOMEY-CALAVI
(UAC)
FACULTES DES LETTRES, LANGUES, ARTS ET COMMUNICATION
(FLLAC)
DEPARTEMENT DES LETTRES MODERNES
(DLM)
MEMOIRE DE MAITRISE ES LETTRES
Option : Lettres Modernes Spécialité : Littérature africaine orale
Sujet :
Présenté par : Sous la Direction de :
MAÏNANSIM Ibrahim Ascension BOGNIAHO,
Professeur Titulaire des
Universités (CAMES)
Laboratoire Béninois de Recherches et d'Etudes en Traditions Orales
(LABRETO)
Année académique: 2016- 2017
Les chants de flagellation chez les Lokpa du
Bénin : forme et style
ii
Sommaire A la mémoire de : ...................................................................................... iii
Remerciements .......................................................................................... iii
Résumé……………………………………………………………………………………………………………….…..iv
Abstract ................................................................................................... iv
Introduction............................................................................................... 7
Chapitre I : Les Lokpa, une population de migrants et une culture .................... 9
1. Brêve histoire de la population lokpa ......................................................... 9
2. L’organisation sociale ............................................................................ 10
3. La vie culturelle des Lokpa ..................................................................... 11
Chapitre II : Une épreuve d’endurance chez les Lokpa : kamʋɣʋ .................... 20
1. La description du rite ............................................................................ 20
2. Elaboration du corpus de chants………………………………………………………………….…..22
Chapitre III : La typologie des chants de flagellation lokpa ............................ 42
1. Le critère du rythme ............................................................................. 43
2. Le critère de temps ou de la diachronie ................................................... 44
3. Le critère de thèmes ............................................................................. 45
4. Le critère des entrées ........................................................................... 47
5. Le critère de l’énonciation ...................................................................... 49
6. Le critère du volume………………………………………………………………………………………...42
7. Les intentions littéraires dans les chants……………………………………………….…………44
Chapitre IV: Regards sur la vie d'une ccommunauté……………………………………..……48
1. Les thèmes mineurs………………………….……………………………………………………….……..48
2. L'éducation comme thème majeur…………………….……………………………...……………53
Chapitre V: L’esthétique des chants de flagellation lokpa ............................... 74
1. Personnages, actions et conséquences .................................................... 74
2. L’univers syntaxique des chants ............................................................. 76
3. Les techniques d'expression………………………………………………………………….………….74
Conclusion ............................................................................................... 86
Bibliographie ............................................................................................ 89
Annexe……………………………………………………………………………………..…………88
Table des matières……………………………………………………………………………………………...130
iii
A la mémoire de :
Ma regrettée mère Safia Tado, pour m’avoir initié à l’amour du travail et à
la persévérance. Je t’ai toujours en image. Repose-toi en paix, mère ! Tu as fini
ta mission ! A moi le reste du défi.
iv
Remerciements
Je dis franchement merci :
A Dieu Tout-Puissant, pour ses bienfaits à mon endroit.
Au Professeur Ascension Bogniaho, pour avoir suscité en moi l’envie
d’embrasser les traditions orales, pour avoir accepté de diriger ce travail et
pour son accompagnement. Je dois, à cet effet, reconnaître la place et le
rôle incontournable du Laboratoire Béninois de Recherches et d’Etudes en
Traditions Orales (LABRETO) dans ce travail.
A M. Oladélé Yayi, pour son écoute, sa patience et surtout son aide pour
venir à bout de ce travail.
A mon père, ma femme et mes jeunes frères et soeurs pour leur
engagement à mes côtés.
A mes amis Sadji Moustakim, Sadji Nouhoum, Tokpo Pèlphide et
Badagnaki G. E. Adamou pour leurs soutiens physiques et matériels.
A mes amis co-mémorants notamment Togni Gildas, Missenhoun
Ferdinand, Nara K. Divic… pour les soutiens divers, à toutes les personnes
ressources pour leur disponibilité sans oublier tous ceux qui, de près ou de
loin, m’ont soutenu moralement et/ou spirituellement.
Merci à vous tous !
v
Résumé
La flagellation lokpa ou Kamʋyʋ est un rite de passage à la jeunesse.
L’étude de la forme et du style des chants de ce rite révèle que ces chants
fonctionnent sur un rythme propre appelé Kamʋγʋ. Ils sont modernes et
abordent l’Homme en général mais aussi les affaires sociales, morales et
religieuses. Ce sont des chants de critique sociale qui adoptent l’entrée indirect.
Leur énonciation répond au mode responsoriel et ils restent des chants longs de
par la structure profonde. Ils possèdent deux intentions littéraires majeures :
l’intention poétique et l’intention didactique. L’analyse de la thématique révèle
que les chants abordent des thèmes divers mais ces thèmes sont traités comme
des motifs pour aboutir à un thème majeur, vu comme l’objectif final : c’est
l’éducation. De l’étude du style, il faut retenir que les chants de flagellation lokpa
sont à la fois laudatifs et phobiques. Sa marque de littérarité repose
suffisamment sur une grammaire spécifique, sur les tropes et sur les figures de
pensée.
Mots clés : forme, style, chant, flagellation, lokpa.
Abstract
The lokpa flagellation also called Kamʋyʋ is a rite of passage of integration
in the youth. The study of the form and style of this rite’s songs reveals that the
songs of lokpa flagellation operate on a specific rythm called Kamʋyʋ. They are
modern and address human being in general but also subjects relating to social,
moral and religious affairs. These are songs of social criticism that adopt the
indirect entry. Their enunciation corresponds to the responsorial mode and
remains long songs from the deep structure. They have two major literary
intentions: The poetic intention and the didactic intention. The analysis of the
thematic reveals that the songs deal with various themes but these themes are
treated as motives to reach a major topic, considered as the final objective: this
is education. From the study of the style, let’s mention that these songs of the
lokpa flagellation have a laudative and phobic style simultaneously. Its mark of
literarity is based on a specific grammar, tropes and on thought figures.
vi
Keywords: form, style, song, flagellation, lok
7
Introduction
Les traditions orales africaines ont retenu l’attention de plus d’un chercheur
aussi bien par ses cultures que par les genres de la littérature orale. Parmi ces
genres oraux, la chanson (ou le chant) reste le plus populaire et le plus utilisé.
Pour atteindre les objectifs d’une culture, elle a servi et sert encore les différents
peuples africains. Qu’il s’agisse d’enseigner, de dénoncer et d’éveiller, de narrer
ou de décrire un fait, de toucher de l’intérieur tout simplement, la chanson est le
genre qui s’y adapte le plus. Au niveau des différents peuples, on la trouve
incontestablement dans les coutumes, tels les rites funéraires, de purification…et
de passage.
Le peuple lokpa n’a pas pu se passer de la chanson/du chant dans ses
usages coutumiers notamment la flagellation appelée Kamʋyʋ. Rite de passage
par excellence, « bizarre » pour certains et «dépassé » aux yeux des autres,
Kamʋγʋ semble être d’une importance capitale pour le Lokpa. Le chant qui
retient l’attention de bon nombre de personnes accompagne ce rite. Mais les
chants sont-ils faits pour la forme ou portent-ils les mêmes objectifs que le rite ?
Quel rôle peut jouer le chant dans la manifestation d’un rite comme la
flagellation ? Pour comprendre ou découvrir le secret, il importe de prêter une
attention particulière à ces chants. C’est dans ce but que se situe le présent
travail. En restant au plan littéraire, le sujet de recherche s’intitule : « Les chants
de flagellation chez les Lokpa du Bénin : forme et style ».
Quelques remarques sont à la base du choix de ce thème. D’abord, les
populations lokpa s’attachent beaucoup au rite Kamʋγʋ malgré le caractère
redoutable de l’épreuve. D’autre part, les chants dudit rite sont conçus et
chantés par des (initiés) personnes non chanteurs et pourtant les Lokpa en ont
une admiration particulière. Alors, l’on s’est posé les questions suivantes : qui
flagelle-t-on et pourquoi ? Quels genres de chants accompagnent ce rite et que
comportent-ils ? Comment sont-ils produits ? Enfin, les pièces chantées sont-
elles des productions littéraires ? C’est de la curiosité manifestée dans ces
interrogations qu’est partie l’idée de cette étude.
8
L’ensemble de ces questions permet d’aller aux objectifs de cette recherche.
L’objectif global est de montrer que la pratique du rite kamƲɣƲ génère une
littérature orale à travers les chants qui y sont produits. De façon spécifique, il
s’agit : de décrire le rite lui-même, de faire la typologie des chants, de montrer
que la thématique abordée par les chants de kamƲɣƲ concourt à l’éducation et
d’analyser le style desdits chants. Ces objectifs s’appuient sur des hypothèses.
L’hypothèse générale dit que les chants de kamƲɣƲ embrassent l’éducation sous
toutes ses formes. Spéciquement, ces chants procèdent de différentes manières
pour éduquer ; ils relèvent à la fois de types variés, puis obéissent à une
grammaire spécifique qui témoigne de leur littérarité.
La présente étude tente donc de répondre aux interrogations posées plus
haut afin de confirmer ou non les hypothèses ci-dessus. Pour y parvenir,
plusieurs méthodes d’analyse de textes sont exploitées. Ce sont : les méthodes
expérimentale, thématique et sociocritique ; les méthodes de l’énonciation, de la
grammaire et de la stylistique, puis le commentaire composé ou l’explication de
texte. Le travail est organisé en cinq chapitres présentés comme axes de
réflexion. Le premier chapitre est intitulé : Les Lokpa, une population de
migrants et une culture. Il aborde l’historique du peuple lokpa, puis sa culture. Le
deuxième chapitre a pour titre : Une épreuve d’endurance chez les Lokpa:
kamƲɣƲ. Ce chapitre fait une description suffisante du rite de la flagellation lokpa
d’un côté et de l’autre, il présente le processus ayant conduit à l’obtention du
répertoire de chants. Le chapitre troisième, quant à lui, est consacré à la
typologie des chants dudit répertoire. Le quatrième chapitre intitulé : Regards
sur la vie d’une population aborde l’étude thématique des chants avec une
insistance sur le thème de l’éducation. Le chapitre cinquième et dernier
s’intéresse à l’étude du style de ces mêmes chants.
9
Chapitre I
Les Lokpa, une population de migrants et une culture
1. Brêve histoire de la population lokpa
Le lokpa est une langue du continuum gur du phylum Niger-Congo. L’origine
du peuple lokpa en générale manque de précision au regard des informations
collectées dans le cadre de cette recherche. Selon Bawanam Bernard
Sindjaloum1, ce peuple est subdivisé en deux sous-groupes dont les Lama et les
Lokpa. Ces sous-groupes se retrouvent sur les territoires de plusieurs Etats de
l’Afrique Occidentale : Ouaké dans le département de la Donga au Bénin, les
Lokpa Kabiyè (Apalὑ, Cillalὑ) de Lamakara, de Niamtougou et de Pya au Nord-Est
du Togo, les Lokpa Tala wèlé Kumaté du Nord-Est du Mali et de la Guinée. En
s’en tenant à ces propos, l’on retient simplement que ce peuple est de l’Afrique
Occidentale. Mais qu’en est-il des Lokpa du Bénin ?
Au niveau du Bénin, les Lokpa sont de la Donga. Ce jeune département
situé au centre-nord-ouest du pays est détaché de l’Atacora suite aux réformes
administratives de 1999. Il est limité par les départements de l’Atacora au Nord,
des Collines au Sud, du Borgou à l’Est et à l’Ouest par la république du Togo.
S’étendant sur une superficie de 11 126 km2 avec une population estimée à plus
de 502 456 habitants, la Donga compte quatre communes dont Bassila, Copargo,
Djougou (chef-lieu) et Ouaké. Cette dernière commune est l’origine de la plupart
des Lokpa dans le pays. Cependant, d’autres viendraient des pays comme le
Burkina-Faso (les gourmantché) et du Togo. Le travail de M.Yolou Bamisso A.
Yessoufou confirme ces informations. Il rapporte :
«Après quelques résistances (contre les Yom à Djougou), les Lokpa
auraient été repoussés vers l’Ouest. Il y eut deux mouvements : un
premier qui les conduisit plus à l’Ouest, c’est-à-dire au Togo voisin,
dans les régions montagneuses de la Binah. La non disponibilité des
terres les oblige à retourner sur leurs pas. Donc dans un second
moment, ils reprirent le mouvement inverse, mais cette fois-ci
1 Sindjaloum B. Bernard, Les hommes et femmes comme il faut, édition Ablᴐdè, Cotonou, 2008, p.7.
11
affaires qui ne le regardent pas. C’est là son souci de paix et de respect de son
prochain. D’ailleurs, une enquête sommaire selon B. B. Sindjaloum relève que le
Lokpa aspire partout à la paix et aime le travail.
Au plan politique, les Lokpa s’organisent en de petits villages placés sous la
responsabilité d’un chef traditionnel. Autrement dit, les Lokpa n’ont pas connu de
forte organisation politique à l’instar des FϽnnu ou des BaatϽnu ni de chefferies
puissantes comme chez les Cabè. Selon une personne ressource, ce fait est dû à
l’esprit du Lokpa qui se refusait toute idée expansionniste (conquête de
territoires) non pas qu’il était peureux mais plutôt à cause de sa nature
inoffensive et son amour pour la paix. B. B. Sindjaloum semble confirmer cela
lorsqu’il dit :
« A la guerre, la communauté lokpa n’a connu aucune
défaite pendant que nos régions se battaient les unes contre les autres. Les plus grands guerriers, les mieux armés et équipés ont été vaincus sur le sol lokpa »3.
Il faut reconnaitre qu’en réalité le Lokpa a une éducation de base très
pacifiste et très laborieuse qu’il puise dans sa culture.
3. La vie culturelle des Lokpa
L’ensemble des faits marquant la vie culturelle du Lokpa sont presque tous
des rites. Le mot parait aussi important ici qu’il faut s’y attarder un peu.
Le dictionnaire universel, 5è édition, définit le rite comme un détail des
prescriptions en vigueur pour le déroulement d’un acte culturel. Dans Le
dictionnaire des synonymes de la langue française, Librairie Larousse, Paris,
1947, Rene Bailly voit le rite d’abord comme un usage, une coutume. Mais aussi,
il désigne ce qui se fait, s’accomplit comme dans un ordre habituel, prescrit,
traditionnel, presque religieux. Mais Smith Pierre4 affirme : « Le rite ne se
confine nullement à la sphère du religieux. ». Pour paraphraser J. Gazeneuve5, le
rite est un ensemble de comportements codifiés et imposés par un groupe social,
se répétant de façon fixe à chaque circonstance. Les gestes, paroles, postures et
objets en usage n’ont pas de significations utilitaires, mais une portée
3 Op. Cit. p.8.
4 « Rite » in Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, PUF, Paris, 1991, p. 630. 5 J. Gazeneuve, Sociologie du rite, PUF, Paris, 1971.
12
symbolique orientée vers la communication avec les forces surnaturelles. Le rite
peut être alors compris comme un ensemble de gestes, de paroles et de
pratiques considérées dans un contexte superstitieux ou culturel comme des
règles pour des usages collectifs ou communes à un peuple afin d’obtenir un effet
plus efficace. On peut alors déduire que si tout rite est sacré, il y en a de sacré
ésotérique et de sacré profane ou populaire.
L’univers culturel du Lokpa compte plus d’une dizaine de rites. Les uns
s’observent chaque année pendant que d’autres en comptent. En se fondant sur
les rôles, l’on peut les repartir en quatre catégories : Les rites de purification ou
de bénédiction des femmes, les rites de passage, les rites de reconnaissance à
Dieu et aux dieux ou aux morts, puis les rites de cohésion sociale et de
solidarité. Les trois premières catégories relèvent du sacré ésotérique alors que
la dernière est sacrée profane. A défaut de parler suffisamment de chaque rite, il
faut sommairement le rôle de chaque catégorie.
3.1. Les rites de purification des femmes
Cette catégorie comporte deux rites : Pɔγɔ ou le rite de la guérison et
Akpema ou le rite de la fécondité. Les rites ici concernent la vie intime des
femmes.
Exécuté en juin, Pɔγɔ consiste à faire des sacrifices de chèvre ou de poulet
pour implorer l’indulgence de l’esprit protecteur de la victime en faisant le rituel
à la rivière. Quant à Akpema, son objectif est de préparer spirituellement la fille
en âge de mariage à une fécondité facile. Le rite se fait en avril. Pendant que les
cultures commencent à porter de fleurs ou de tubercules, les sacrifices de
chèvres noires sont faits aux dieux à cette fin. C’est en réalité par ces rites que le
Lokpa montre l’importance, le rôle et la place qu’il accorde à la femme dans la
société.
3.2. Les rites de reconnaissance et d’imploration
C’est dans cette catégorie composée de trois rites que l’on perçoit les
croyances du Lokpa ainsi que sa philosophie de la notion de mort.
On y trouve le rite CιmƲɣƲ qui se déroule dans le mois de mai. Ce rite peut
être considéré comme celui par lequel le Lokpa accueil la saison pluvieuse et
13
plaide pour la bénédiction par les dieux et les ancêtres des premières semences
mises en terre pour faciliter leurs éclosions et leurs croissances afin de garantir
(les récoltes) la disponibilité des vivres de soudure. Pour le Lokpa, l’obtention de
toutes ces faveurs importantes n’est possible que par l’intermédiaire des dieux.
C’est pourquoi il faut offrir à manger à ces derniers pour être dans une relation
plus favorisante.
Le deuxième rite de cette catégorie est Saƞkaalɩƞ. Celui-ci se situe au pôle
opposé au précédent, car il s’observe pendant les moments de récoltes de la
saison sèche, c’est-à-dire dans le mois de novembre. Saƞkaalɩƞ est une instance
de communication entre les vivants et les morts. Les jeunes proches ou en fin
d’initiation (18 à 25 ans environ) et les chefs de familles en sont les acteurs.
Pour saluer la générosité des ancêtres et manifester leurs reconnaissances aux
morts (qui le méritent), les sacrifices des bêtes notamment le bœuf (plus
adéquat) et des poulets sont faits en leur honneur. Les pierres des nouveaux
morts sont implantées à l’entrée de la maison pour les représenter. Par ce rite, le
Lokpa au plan des croyances pense que les morts sont spirituellement là et le
vivant peut toujours entretenir des relations avec eux pour s’entraider. Les
vivants font des prières et des offrandes pour vivifier les morts et demander que
le Tout-Puissant leur accorde une place dans son royaume. Les morts à leur tour
interviennent, plaident et aident le vivant à obtenir les faveurs de la nature à
l’instar du vodun et son adepte. Germain De Souza écrit à ce propos :
« Lhomme également donne de la force au « vôdun » grâce aux prières, aux sacrifices qu’il fait au vôdun. Plus
les offrandes sont nombreuses et magnifiques, plus les vodun ont de force…, si leur nombre décroit, les vodoun s’affaiblissent »6.
Par ailleurs, ce rite montre aussi la conception de la mort par le Lokpa. La
mort est une disparition du corps, la fin de la vie mondaine sans distinguer ici la
mort normale des autres morts telles que décrites par le Professeur Ascension
Bogniaho7. Le Lokpa considère l’amour que l’on doit à l’être humain pour prier en
6Germain de Souza, Conception de vie chez les Fon, Paris, Aout, 1975, à la page 21. 7A. Bogniaho, Histoire du ‘’HAN’’ ou la chanson populaire dans’’ WEME’’, Thèse de du Doctorat du 3è cycle, université de Paris XII, pp. 148-159.
14
15
joie. »8. Différent du rite précédent, Tɔγɔntʋ n’est pas l’apanage d’une classe
social mais plutôt de tous pourvu que la volonté et les moyens soient au rendez-
vous. Le tout petit peut inviter les supérieurs et vice versa, mais pour passer à
table, chacun respecte sa classe. Si chaque Lokpa pouvait reconnaitre sa classe
et sa génération, c’est à partir des rites de passage.
3.4. Les rites de passage
Trois rites de passage sont institués : Tɔγɔsʋtʋ ou l’initiation des enfants ;
Kamʋγʋ ou l’initiation pour la jeunesse encore appelé « flagellation » et Waa ou
la danse des adultes. Ces trois rites concernent seulement les hommes (les rites
de purification des femmes constituent pour elles ceux de leur passage dans le
rang supérieur). A présent, que peut-on retenir de chaque rite ?
Tɔγɔsʋtʋ est un rite par lequel le Lokpa reconnait l’entrée de son enfant
dans la jeunesse. Après ce rite, l’initié ιwasәlε devient ɩfalʋ. On l’appelle ailleurs ‘’
rite de la puberté’’. Effectué au milieu des deux saisons du Nord du Bénin,
Tɔγɔsʋtʋ consiste au sacrifice de Chien pour avertir les ancêtres du rang délicat
auquel accède désormais l’initié dont l’âge est compris entre 16 et 20 ans et de
solliciter leur l’accompagnement. La présence de l’oncle maternel est irréversible
pour la réussite du rite. Mais chez d’autres, le rite s’effectue en une succession
d’épreuves à l’initié sur plusieurs jours. Trois épreuves sont à subir : l’exclusion
de la maison paternelle pour apprendre à se débrouiller en brousse ; la
démonstration de ses capacités de défense face aux ainés qui vont à sa
recherche pour le retour au bercail, puis l’enfermement dans une chambre
pendant sept jours pour apprendre à s’arrèter, méditer, mesurer ses forces avant
d’entreprendre quoi que ce soit. Cette étape est subie aussi par les filles en âge
de mariage. Un garçon auteur d’une grossesse ne subit plus ce rite. C’est dire
qu’il s’est précipité en omettant des étapes. Le deuxième rite de passage suivant
l’àge est kamʋγʋ. Puisqu’il fait l’objet de cette recherche, on y reviendra dans le
chapitre II pour de plus amples informations.
Le dernier est waa ou la danse des adultes. Ce rite des adultes se déroule
chaque cinq ans. Il représente l’outil de répérage de l’âge surtout des adultes au
pays lokpa. C’est un rite réservé aux plus aisés, car exige de fortes dépenses de
8Y.B. A.Yessoufou, Op.cit. p. 38.
16
tout genre. Waa consacre le passage définitif de l’initié dans la classe des adultes
ou ‘’d’hommes murs’’. A cause des dépenses très énormes, le rite constitue aussi
un outil de distinction des familles aux sein de la communauté. Ces dépenses
obligent à l’autorisation d’une possibilité de cumuler plusieurs fils adultes d’un
même père pour une célébration.
La brève présentation de ces quelques rites donne à tirer une conclusion
partielle. La culture du Lokpa à chaque niveau de ses us et coutumes, de ses
rites, est préoccupée à faire gagner à son fils une valeur. Celle-ci peut consister
à former le mental de l’enfant au respect de la hiérarchie, des étapes de la vie
humaine. Elle peut consister en la préparation de l’enfant à affronter les
difficultés de la vie avec dignité. La valeur, c’est aussi la reconnaissance de
l’importance des parents, des ancêtres, des dieux ou de Dieu. La valeur, c’est
encore la cohésion sociale, le partage et l’assistance de l’autre. C’est au vu de
ces vertus qu’il a paru nécessaire de s’intéresser aux chants de l’un des rites de
passage notamment Kamʋγʋ en intitulant le sujet ainsi qu’il suit : « Les chants
de flagellation chez les Lokpa du Bénin : forme et style ». Pour mieux
comprendre l’analyse de ce sujet, il faut avoir une idée claire et commune de
chacun des concepts clés qui le composent. Ce sont :
la forme
Dans le dictionnaire universel, la forme est définie comme la figure
extérieure ou la configuration des choses ou chacun des différents aspects
qu’une chose abstraite peut présenter. Pour Rene Bailly (op. Cit.), la forme se
rapproche du style lorsqu’elle désigne la manière d’écrire, de présenter ou de
traiter un sujet par opposition au fond. En faisant allusion à la théorie des formes
en littérature, la forme désigne la structure, le genre mais aussi le type d’un
texte. C’est dans cette logique que la forme peut dans cette étude s’entendre
aussi comme la typologie des chants.
le style
Selon le dictionnaire Petit Larousse, Grand format, édition 2004, le style
vient du latin « stilus » qui signifie manière. Le style est (donc) une manière
particuliére d’exprimer sa pensée, ses émotions, ses sentiments. Pour les
écrivains du XVIè et XVIIè siécle, le style est :« ce qu’il y a de spécifique dans
17
la façon de s’exprimer est concurrencé notamment par le terme manière,
variation synonymique qui rappelle la main de l’auteur de l’œuvre9.».
Dans son entretien accordé à Cathérine Hélie de la maison Gallimard et
rapporté par Jean Marie Durand, Marielle Macé dit :
« Le style concerne l’aspectualité des choses, il en définit les
traits caractérisants, les reliefs, les accents qui permettent
d’identifier un individu (une singularité), mais qui convergent
aussi vers un sens qui excède cet individu : un style, c’est une
singularité qui s’excède elle-même, devient une véritable idée,
une proposition de sens, un genre d’être, un possible de la
vie.»10.
De ces différentes clarifications, on peut comprendre le style comme une
manière d’exprimer les idées, les sentiments à l’écrit ou à l’oral de sorte que cela
devienne une identité, une distinction de soi qui laisse exprimer une complicité et
une diversité dans la traduction.
le chant
Pour Rene Bailly11, le chant se dit d’une suite de sons modulés émis par
une voix humaine et qui, par la différence des intonnations, produisent sur
l’oreille des sensations variées.
Le chant est une composition musicale destinée à la voix ou encore un
genre particulier de la musique vocale telle que la chorale, le chant d’opera, le
chant folklorique, etc. On distingue des types particuliers de chants : les chants
d’adieu, de triomphe, de deuil ; les chants patriotique, profane, religieux, sacré,
etc. On trouve aussi des procédés particuliers notamment les chants alterné,
polyphonique ou encore le chant antiphonique faits de deux chœurs chez les
grecs. Par extension, le chant est tout bruit assez agréable. En musique
instrumentale, le chant est une mélodie très harmonieuse. On parle des chants
de flûte, de guitars. En littérature, le chant est un poème lyrique ou épique ou
encore une partie d’un poème. C’est aussi ce qui constitue l’euphonie verbale, le
9 Akouessi S. MADINDE, Les chansons auto-laudatives dans l’œuvre de GBEZE : Forme et style, mémoire de maitrise, UAC/FLASH/DLM, 2014, p. 13, citant Karl cogard, introduition à la stylistque, Flammarion, Paris 2001, p.14.
10Entretien est fait à propos de son essai styles,critique de nos formes de vie, Gallimard, Paris, 2016 , découvert le 19/06/17 sur le site internet www.mobile.Lesinrocks.Com. 11in Le dictionnaire des synonymes de la langue française, Librairie LAROUSSE, Paris, 1947.
18
12www.cnrtl.fr consulté le 19/06/17 à 10h, rapportant J. Combarieu, La musique, 1910, p.151. 13A.Bogniaho, Histoire du « HAN » ou la chanson populaire dans « WEME », thèse pour le Doctorat ès Lettres du
3ème cycle, Université de Paris XII, p.69 citant G. Calame GRIAULE, Ethnologie et langage, Gallimard, Paris
1965, p. 528.
14 fr. m. wikipedia.org, consulté le 10/06 / 17 à 13h.
19
exemple littéraire est la fessée reçue par le jeune homme de Mademoiselle de
Lambercier dans Les confessions de Victor HUGO ou encore comme l’indique le
titre La flagellation amouruse de Jean de villiot publié en 1904. Le mot flageller
selon Rene Bailly( op. cit), suppose l’emploi de fouet et comporte plus
particulièrement l’idée de pénitence volontaire. De nos jours, la flagellation est
une sanction pénale en Arabie Saoudith et en Iran. De même elle existe en tant
que rite chez les chiites, chez les peuls avec « kooja » sans oublier le Kamʋγʋ
des Lokpa, l’objet de cette étude.
Au termes de ce premier chapitre, il est à retenir que les Lokpa du Bénin
sont majoritairement originaires de la commune de Ouaké. Ce peuple à l’instar
des Bεtammaribε n’a pas connu une organisation royale puissante. Cependant,
sa vie culturelle comporte un nombre important de rites, bases des valeurs
diverses. On y trouve des rites de passage pour enfants, pour jeunes et pour
adultes. A présent, en quoi consiste le rite kamƲɣƲ des Lokpa ?
20
Chapitre II
Une épreuve d’endurance chez les Lokpa : kamʋɣʋ
Ce chapitre présente d’un côté, le rite de la flagellation ou kamƲγƲ dans son
ensemble et relate de l’autre, le procesus ayant conduit à l’élaboration du corpus
de textes, matériau de cette étude.
1. La description du rite
1.1. Historique du rite de flagellation
L’institution du rite kamƲγƲ dans la vie de la population lokpa remonte à
des temps immémoriaux. La cause fondamentale fait plus ou moins l’unanimité.
A la question : d’où vient la pratique de la flagellation chez les Lokpa ? Quelques
personnes ressources donnent des causes fondamentalement identiques : le chef
coutumier de Wodè (quartier de Badjoudè , lieu de lancement du rite au Bènin)
rapporte que dans l’ancien temps, les parents connaissaient des conflits tribaux.
Au cours de ces conflits, la majorité des jeunes gens de la communauté se
montrait très peureuse face à l’adversaire. Dans le but de disposer désormais de
jeunes courageux, les sages ont trouvé l’idée d’une coutume pouvant entrainer
les jeunes au courage. C’est ainsi que le rite kamƲγƲ est né. Il se pratiquait en
son temps, hormis le rituel, avec des chicottes à base de peau de bœuf
appelées « akpatεε ». Plus tard, il a été constaté que les jeunes ajoutaient à
cette chicotte des objets condondants qui laissaient de graves blessures sur la
21
15Y. B. A.Yessoufou, Sens et puissance du rite ‘’kamʋɣʋ’’ chez les Lokpa, mémoire de maitrise, Sociologie-
Anthropologie, FLASH/UAC, 2006, pp 40- 41.
22
initiative du Grec Thespis16. Le rite de kamƲγƲ se déroule dans un espace
ouvert, hormis les préparations ritualisées des initiés parce qu’il relève de
l’événement spectacle. Ce sont des espaces amenagés pour la circonstance ou
des lieux publics tels que les stades, la cour du roi, etc. Pour ce qui est de la
période, B. B. Sindjaloum( op-cit, p.9.) écrit : « …Les fêtes des Lanières
annoncent chaque année que le sorgho rougit sur les tiges, que le millet blanchit
et le haricot achève lentement sa maturité. ». Cette période correspond à la fin
du mois d’octobre et le début de novembre, une période faite de brouillard et de
fraîcheur. Autrefois, la célébration du rite se faisait uniquement le jour de
ηmasaɣa, c’est-à-dire jeudi. Mais de nos jours, on le fait aussi le jour de plaγasaa
(samedi) dans certaines localités à cause des contraintes liées à l’école moderne.
Cependant, cette modification n’est pas du goût de certains traditionnalistes qui
tiennent compte de la logique spirituelle des jours de la semaine. Dans le rite
kamƲɣƲ existe des étapes à franchir.
1.3. Les étapes dans le rite
Les meilleures sociétés du monde sont celles les mieux organisées, celles
qui ne badinent point avec l’ordre social. Paul N’DA disait :
« Les parents doivent être conscients de leurs responsabilités dans l’apprentissage des valeurs et normes de comportement, dans la socialisation de leurs
enfants ; ceux-ci ne seront que ce qu’ils auront fait d’eux »17.
On peut affirmer sans se tromper que le Lokpa a pris cette conscience et la
preuve est l’institution du rite kamʋyʋ par lequel l’enfant lokpa découvre l’ordre
et la hiérarchie dans la société. Puisque, dans ce rite, on y entre comme dans
l’armée et on gravit les échelons en se soumettant aux ordres des plus anciens.
Sur les dix tranches d’âge distinguées dans les us et coutumes lokpa (B.B.
Sindjaloum, op.cit. p.11.), les cinq premières sont plus ou moins impliquées
dans le rite kamʋyʋ.
16 Il fit la dramatisation profane, c’est-à-dire étymologiquement « hors du temple », des rituels dionysiaques sacrés de son époque, devant un public empreint de curiosité. In Pierre MEDEHOUEGNON, Le théatre francophone de l’Afrique de l’ouest : des origines à nos jours, CAAREC Editions, COTONOU, 2010 (thése de Doctorat d’Etat, DLM/FLASH/UAC, 2009) PP. 148-149. 17
Collectif, Littérature de Côte D’Ivoire : La mémoire et les mots, N°86, Janvier-Mars, 1987, p.35.
23
La première étape appelée ɩwaasʋtʋ est subdivisée en deux : ɩwaasisi,
compris entre 06 et 09 ans, puis awaasa âgés de 10 à 14 ans. C’est l’étape
inférieure. La deuxième est appelée ɩfalʋtʋ. Tout Lokpa atteint cette étape entre
15 et 18 ans environ. Elle est aussi repartie en deux sous-étapes : ɩfapiya dont
l’âge est de 15 ou 16 ans, puis ɩfasɔsɔ dont l’âge est entre 17 et 18 ans. C’est au
niveau de cette sous-étape que l’initié observe le rite de tϽɣϽsɩtƲ qui lui autorise
désormais à penser et manifester ouvertement ses désirs aux femmes en tant
que jeune. La troisième étape est désignée sous le nom atantʋtʋ. Les initiés à ce
niveau ont un âge compris entre 18 et 20 ans environ. C’est le dernier stade de
l’initiation normale du rite. Qui se marie à ce stade ne l’a fait ni par défaut ni par
excès. On y ajoute cependant, deux étapes supérieures dont les membres ont
déjà fini l’initiation pour le compte du rite kamƲɣƲ. Ce sont ɩsakpatʋ compris
entre 20 et 24 ans, puis celui de Kɔntɔtʋ dont l’âge des membres se situe entre
25 et 29 ans. Les individus non encore mariés dans ces deux dernières classes
sont vus comme des jeunes en retard. Les Kɔntɔnaa entrent dans « le groupe
des décideurs de la communauté » après avoir subi le rite des adultes appelé
waa.
1.4. Les règles pratiques du rite
L’un des objectifs de Kamʋyʋ est la cohésion sociale. Pour garantir l’atteinte
de cet objectif, des interdits et des obligations d’un côté, puis des devoirs de
l’autre, sont observés par les uns et les autres.
D’abord, les parents ont le devoir voire l’obligation d’inscrire l’enfant en âge
et de remplir les conditions qu’il faut pour que le rite soit une fête pour l’initié et
pour la famille. La nourriture, les bêtes à immoler notamment le cabri ou le
cochon et des poulets doivent être vu de tous, la veille au plus tard. Aussi les
conseils, les informations pertinentes, la préparation rituelle et la protection de
l’initié restent un devoir des parents, puis de tous les aînés adultes avertis et
proches de l’initié.
Ensuite, les femmes ne sont pas associées à la préparation ritualisée des
initiés. Cependant, elles, notamment les plus jeunes ou/et non mariées ont un
rôle important à jouer pendant la manifestation.
24
Quant aux initiés eux-mêmes, leurs droits et devoirs s’observent avant et
pendant le rite. Avant le rite, chaque candidat à une étape donnée, a le devoir de
gagner la confiance des parents et des autres membres de la communauté par
son travail, sa vivacité et son endurance. Il est suivit de près pour cela et évalué
surtout par les parents selon l’étape du candidat. C’est à cet effet qu’
« Il appartient cependant au futur candidat (à un stade) de
prouver à la communauté, par son assiduité et son ardeur dans
les travaux champêtres par son application à la fête qu’il mérite
la sollicitude de sa famille18 .».
Au moment du rite, chaque membre d’une classe est tenu de respecter la
conduite indiquée à celle-ci et jouer pleinement le rôle qui est le sien pour
l’honneur de son lignage comme pour sa distinction personnelle. Il lui appartient
de chercher les chicottes adéquates, de demander le matériel nécessaire pour
que le combat ne finisse point en sa défaveur. Un initié inférieur a le droit de se
mesurer à un supérieur mais ce dernier doit faire preuve de sagesse et de
courtoisie en cas d’échec de l’audacieux. En dehors de ces règles, il existe dans
la manifetation proprement dite un rôle spécifique pour les différents acteurs.
1.5. Les différents acteurs et leurs rôles
Le rite Kamʋyʋ a pour objectif principal la culture de l’excellence, la
formation à la vie sociale. De ce fait, l’oisiveté y est fortement combattue. La
preuve est à lire dans les rôles joués par les différents groupes d’acteurs en
présence. Déjà au petit matin, après le rassemblement en un lieu quelconque, la
classe des sᴐsaa (les sages) est chargée de conduire les candidats à la place
publique, lieu du combat. Durant la manifestation, « ils restent assez vigilants
pour annuler les effets des pièges ‘’magiques ‘’19 » ou mystiques éventuels à
l’encontre des initiés. Ce sont eux qui joueront le tam-tam sacré pour, en son
temps, annoncer la phase de l’ordre et du face-à-face.
Les vieux sont secondés par les jeunes aux étapes de ɩsakpatʋ et de
Kᴐntᴐtʋ. Depuis le lieu du départ jusqu’à la place publique et durant la
manifestation, ceux-ci se chargent de la surveillance et la canalysation des
18
B.B. SINDJALOUM, op. Cit. p.13. 19YOLOU B. A. Yessoufou, op. Cit. p.54.
25
initiés. Ils se mettent, certains au milieu des différents lignages d’initiés, d’autres
de côtés pour encadrer les plus petits. Mais dans le même temps, ils sont les
animateurs, joueurs de tam-tams, pousseurs de cris (pour éveiller les timides) et
aussi chanteurs. Il arrive qu’ils se flagellent soit par nostalgie du passé, soit au
constat du manque d’enthousiasme chez leurs jeunes frères. En un mot, ils
jouent parfois un rôle de lièvre. Lorsque à l’arrivée sur les lieux du combat, les
atantʋnaa (ou parfois eux-mêmes) déclenchent un sauf-qui-peut (phase de
désordre), il revient à eux (ɩsakpaa et Kɔntɔnaa) de donner la preuve de leurs
expériences en maîtrisant ce feu. Ils s’imposent par le combat pour éviter les
dégâts injustes et inutiles avant que les sages ne jouent le tam-tam kamƲɣƲ
pour lancer le face-à-face, c’est-à-dire la phase de l’ordre.
Mais les vrais troubleurs restent ceux de la classe en phase finale. Cette
étape appelée atantʋtʋ, est celui dont les membres sont les plus en joie dans ce
rite. Etant dans leur dernière phase d’initiation de Kamʋyʋ, ils s’y plaisent
abondamment, car l’expérience a chassé toute peur. Il leur appartient d’effrayer
les débutants et le public, de montrer que l’on est à présent mature. D’où ils
orchestrent le sauf-qui-peut, pour se distinguer ou non. C’est dans leur rang
qu’on rencontre souvent les audacieux qui souhaitent défier les plus anciens.
Atantʋ manifeste toujours un comportement difficile à maîtriser car, à ce stade,
« dans la même tranche d’âge la bravoure, le bon exemple, l’émulation vont bon
train au service du rang et du leadership âprement recherché20 ». Il faut dire qu’il
est aussi un vrai animateur avec son sifflet, ses castayettes et son accoutrement
particulièrement « bizarre ».
Les membres de l’étape de ɩfalʋtʋ notamment ɩfasɔsɔ (à un an de la fin du
rite) a une attitude distinctive sauf qu’il n’exagère pas comme atantƲ. Les
ɩwaasisi se distinguent à leur façon mais l’attention du public n’est pas si sérieuse
à leur endroit car, il leur reste du chemin à parcourir.
Enfin, il y a le public. Il est composé des autres spectateurs/acteurs
impliqués indirectement. Ces autres spectateurs observent et évaluent. Ils louent
et félicitent le candidat brave et/ou technique connu d’eux ou non, puis
20B. B. SINDJALOUM op. Cit. p. 11.
26
désapprécient voire crient sur le moins défenseur ou le lâche. B. B. Sindjaloum,
à ce propos, affirme ceci :
« A l’épreuve de chicottage, véritable épreuve d’initiation, tout
Lokpa est comme un enseignant et un membre du jury
impartial, peu importe que le jeune concurrent soit connu de lui
ou non. L’essentiel pour lui est selon le cas, de féliciter ou de
condamner, de rappeler à l’ordre, de faire reprendre et de
noter. Ce traitement édifie le parent qui observe et écoute les
jurés »21.
A ce rôle, les femmes en ajoutent un autre qui leur est propre. Elles
manifestent leurs états d’âme en couvrant les concurrents de la poudre blanche
soit par compassion ou par encouragement ; soit pour éviter l’horreur (que laisse
le sang qui coule) des blessures des candidats atteints par la chicotte. C’est aussi
le moment pour les non-mariées de se faire remarqué par les hommes. Les
réactions et les cris des hommes et des femmes spectateurs constituent un
élément indicateur du rythme et de l’ambiance de la fête pour les incapables
physiques restés à la maison. On le voit, ce moment très animé, bruyant et agité
ne peut permettre une meilleure audition des chants. C’est pourquoi, semble-t-il,
les chants sont produits en dehors de la phase de l’épreuve du combat.
21
Op.cit.p.13.
27
Photo1 : Les sages en pleine cérémonie Photo2 :Tam-tam sacré Kamʋɣʋ
Photo3 : Les filles en pleine cérémonie Photo4 : ɩsakpaa /kᴐntᴐnaa en pleine
cérémonie
Sources photos 1, 3, 4 : Ibrahim (2017) Source photo 2 : CD 2011
Photo 5 : 1 atantʋ et 2 ɩfalaa Photo 6 : 2 atantʋnaa en combat
28
Photo 7 : awaasa Photo 8 : Produit de protection contreles blessures
incurables
sources photos 5, 6, 7 et 8 : Ibrahim (2O16)
1.6. La production des chants
Les chants sont réellement produits avant et après l’épreuve de combat.
Ici, réside la particularité des chants de kamƲɣƲ. Le fait qu’ils ne sont pas
chantés au cours de la manifestation, donne l’impression d’une manifestation
culturelle. Pourtant kamƲɣƲ même, de par sa pratique, répond bien à la
définition d’un rite. Quant à la production, seuls les anciens initiés (ɩsakpa et
Kɔntɔnaa) sont habilités à chanter. C’est par les chants qu’ils démarrent la fête la
nuit de la veille. De vingt-trois heures à l’aube, toutes les concessions ou du
moins celles des sages de la localité d’accueil reçoivent leurs visites et leurs
chants. Ils sont les seuls autorisés à produire les chants de vigile. Mais, ils
continuent encore avec les chants après l’épreuve de chicottage jusqu’à la fin de
la journée. Les thèmes des chants produits la veille et ceux d’après le rite ne
varient pas.
2. Elaboration du corpus de chants
29
2.1. La collecte sauvage
Suivant la méthode expérimentale ou quasi-expérimentale, cette collecte a
consisté à aller sur le terrain dans des localités données pour recueillir des
renseignements indispensables à la recherche en interrogeant les personnes
ressources appropriées.
2.1.1. Les localités cibles
Les localités concernées par l’enquête sont les villages ou quartiers de ville
où la flagellation lokpa est pratiquée. Autrement dit, toutes les localités habitées
par les Lokpa ne sont pas forcément à consulter. Ainsi, l’enquête est faite dans le
département de la Donga en général. En particulier, ce sont les villages ou
quartiers de la commune de Ouaké ; les villages de Gaounga, Timba, Partago et
quartiers de Djougou dans la commune de Djougou, puis les villages d’Aoro, de
Koïwali, de Biguina I, Biguina II et Biguina III dans la commune de Bassila. Par
ailleurs, certaines personnes ressources vivant à Cotonou sont interrogées.
Comme sur la base de la pratique, le choix des localités est fait, l’enquête dans
lesdites localités cible une population précise.
2.1.2. Les paramètres de l’enquête
Groupe cible
Les séances d’entretien direct ou indirect ont eu lieu avec un groupe
particulier de personnes. Il s’agit des personnes sages reconnues impliquées
dans les affaires culturelles de leur localité. Les adultes et anciens initiés, les
femmes averties (dans les témoignages) sur le rite, les jeunes en cours ou en
fin d’initiation, les chanteurs des chants du rite.
Outils de la collecte
L’enquête sur le terrain est guidée d’une part, par un questionnaire à douze
grands points soumis aux personnes ressources. Aussi des cassettes CD-Rom
ont- elles contribué aux réponses aux questions dudit guide. Pour ce qui est de la
30
collecte des chants d’autre part, plusieurs outils y ont servi : un CD-Rom audio-
visuel, l’enregistrement automatique, la récupération des sons sur téléphone et
l’emprunt de quelques anciens chants du travail socio-anthropologique de M.
Yolou Bamisso A. Yessoufou.
Durée de l’enquête
Janvier 2013 : dans le cadre de l’établissement du projet de mémoire au
département.
Août 2013 : premières enquêtes lancées à Cotonou dont le résultat était la
découverte du Centre Culturel Lokpa suivi de l’achat des cassettes CD-Rom.
Novembre à Décembre 2013 : descente et premières investigations sur la
zone d’étude (période de l’exécution du rite) à Djougou, à Ouaké.
Octobre à Novembre 2015 : retour sur le terrain à Ouaké et à Bassila.
Octobre à Décembre 2016 : dernière investigation avec un questionnaire
écrit cette fois-ci dans les villages ou quartiers de Djougou, de Bassila et
de Ouaké.
2.1.3. L’échantillonnage
Le besoin d’informations fiables nécessite la rencontre des personnes
ressources. Les différentes composantes du groupe cible précédent forment
l’échantillon au niveau des personnes ressources. Il est fait sur la base du sexe,
de l’âge et du statut social des enquêtés. Le nombre de ces enquêtés est moins
préoccupant contrairement à leur implication et/ou témoignage quant à la
pratique du rite Kamʋyʋ. Ainsi, les enquêtés se présentent comme suit: 03 chefs
traditionnels, 02 guérisseurs, 02 journalistes, 04 femmes responsables ; 03
conseillers communal et royal, 05 sages locaux, 20 anciens initiés (élèves,
enseignants, artisans) ; 11 initiés à la phase finale, 01 tam-tameur, soit 51
enquêtés.
La constitution des chants du répertoire a aussi nécessité la recherche des
sources de conservations ou de production desdits chants. La première quête
faite à Cotonou en 2013 a conduit à la découverte de l’un des membres d’un
« Centre Culturel Lokpa » chez qui trois CD-Rom (Discs compacts) portant sur le
31
rite Kamʋyʋ ont été obtenus. Des trois CD, un seul notamment celui portant les
cérémonies de flagellation de 2011 comportait cinq chants enregistrés. Non
seulement c’est insuffisant, mais il était aussi nécessaire pour la viabilité de la
recherche que les chants du répertoire couvrent les années plus reculées, celles
récentes que celles des manifestations actuelles. A l’aide d’un magnétophone sur
le terrain, quinze (15) chants ont été récupérés lors des manifestations des
années récentes. Enfin, la collecte des 09 chants plus anciens a été un emprunt
des chants du corpus du travail socio-anthropologique de Yolou B. A. Yessoufou.
Au total, 29 chants ont été collectés. La limite des chants à ce nombre se
justifie par deux raisons : le manque ou la rareté des sources de conservation de
ces chants (qui conduit à l’indisponibilité des chants anciens), puis le caractère
simultané et caché de la production à l’intérieur d’un village ou de la commune.
C’est ce qui a contraint à se limiter à ce nombre de chants soumis plus tard à un
traitement.
2.2. Le traitement des chants
2.2.1. L’audition
Pour comprendre les chants collectés, ils ont été écoutés une dizaine de
fois. Les premières auditions (quatre précisément) ont eu pour objectifs de
prendre contact avec le contenu de chaque chant, puis de relever le thème
principal et voir, si possible, si l’auteur du chant est un atamtʋ ou un ancien
initié. A cet effet, on dénombre neuf (09) chants appartenant aux atantƲnaa et
vingt (20) pour ɩsakpa et kϽntϽnaa sur les vingt neuf (29) chants du répertoire.
Les auditions suivantes ont permis de s’intéresser au fond de chaque chant, de
tenter de le titrer, de confronter les contenus et de distinguer les chants qui
abordent un même thème ou aspect de thème. Le style aussi a été évalué au
cours de ces auditions. Le constat majeur était que les chants, en réalité, ont
chacun une thématique composite au fond et la fin peut être brusque ou non.
32
2.2.2. Le codage
La flagellation étant un rite social, les auteurs des chants ne sont pas
connus en tant qu’individus. Cela est dû aux conditions de production des chants
qui n’ont pas de titre. Ainsi, Il revient à qui le veut de trouver une manière plus
adéquate pour les coder.
Le codage des chants du répertoire s’est basé sur le fait que tous les chants
appartiennent au rite kamƲɣƲ, pour prendre K comme première lettre du code.
Ensuite, partant du thème dominant abordé par chaque chant, les deux
premières lettres de ce thème ont été mises à la suite de K, première lettre du
code. Ainsi, on a :
D’autres types de codages seraient possibles pour ces chants. Par exemple,
un codage pour faire identifier, à défaut des noms, le statut du chanteur: atamtʋ
(AKFA1, AKHO1, etc.) ou ɩsakpa/Kᴐntᴐ (KKFE1, KKPA1…), etc. Cependant, le codage
suivant les thèmes parait plus simple et clair pour ce travail.
2.3. La transcription et la traduction des textes
2.3.1. La transcription
33
34
35
36
38
Putain géant
39
40
Chien géant
41
NB : Le chœur prononce chaque verset au fur et à mesure que le pré
chantre l’improvise
Ce deuxième chapitre a permis de passer en revue le fonctionnement de
flagellation lokpa dans ses détails. On retient essentiellement que le rite
comporte cinq étapes pour finir cette initiation. La manifestation s’appuie sur des
règles qui assurent l’ordre à travers les rôles dédiés aux différents participants
mais aussi au respect du calendrier du rite et de la production des chants. La
seconde étape de ce chapitre a permis de comprendre le processus qui a conduit
à l’élaboration du répertoire de chants. Ce processus part de la collecte sauvage
à la traduction élaborée en passant par l’audition, le codage ainsi que la
transcription et la traduction des chants. En somme, le chapitre permet de mieux
appréhender le rite et d’apprécier le caractère scientifique de l’élaboration du
corpus. Après cela, il est nécessaire de faire la typologie des chants ainsi
récupérés.
42
Chapitre III
La typologie des chants de flagellation lokpa
En 1841, le mot typologie selon E. VILLEMIN (in Français peints par eux-
mêmes, Tome 4, le botaniste, p. 311), signifiait « classification, étude des
différents types » et le type se comprenait comme un « ensemble des traits
généraux caractérisant un genre d’êtres ou de choses ». De façon générale, la
43
typologie s’entend comme une science de l’analyse et de la description des
formes typiques d’une réalité complexe permettant la classification. La typologie
est encore l’étude des traits caractéristiques dans un ensemble de données à des
fins de classification. Faire la typologie des chants de flagellation revient à les
évaluer et à ressortir les indices répondant à tel ou tel critère.
1. Le critère du rythme
La flagellation comme rite est désignée sous le nom Kamʋyʋ en langue
Lәkpa tᴐm. Ce nom est emprunté à un tam-tam sacré qui, avant la naissance du
rite de flagellation existait et était joué en guise d’alerte à la population en cas
de danger public (envahissement, guerre, inondation, tempête, etc.). Quand fut
instauré le combat servant à distiguer le parrain du rite pour enfant, l’on
introduit l’instrument auquel est rattaché désormais non seulement l’esprit du
combat public, mais aussi celui du rythme de l’effervescence, d’encouragement
au cours des combats.
Même pendant ce temps, ledit tam-tam se jouait seulement à chaque
cérémonie du combat de parrainage juste au début comme pour faire appel aux
éventuels supporters ou pour donner du tonus aux cœurs des lâches et de la
chaleur au sang des courageux. C’est aussi pour demander la permission des
ancêtres. Lorsque ce combat montra ses défauts et fut remplacé par celui de la
flagellation, l’instrument défia le temps et se fit reconduit avec le même esprit.
Dans le but de corriger le caractère tragique du combat précédent, le nouveau
fut étendu d’abord aux plus jeunes. Ensuite, d’autres instruments comme les
castayettes à feuilles de rônier, les sonnettes et certains sifflets fûrent associés
au tam-tam sacré pour rendre la cérémonie plus ambiante. La mélodie produite
par l’ensemble de ces instruments ne put laisser les jeunes tranquilles. Suivant le
son des intruments, l’on dansa mais comprit très vite que la cadence nécessitait
la force et l’endurance. Enfin, les chants fûrent recommandés pour prouver la
liberté laissée aux jeunes de juger, critiquer ou suggérer surtout ce qui le mérite
dans la communauté. Le rythme de cette composition musicale à la cadence
pressée, rapide et continue parut particulier et différent des autres qui existaient
au sein de la communauté. On lui attribua alors le nom de l’instrument originel
44
qu’est Kamʋyʋ. Depuis ce temps, le patrimoine musical lokpa reconnait le rythme
kamʋɣʋ et les chants sont appelés Kamʋyʋ yontu.
2. Le critère de temps ou de la diachronie
Le critère permet de classer un fait en l’occurrence le chant par rapport au
temps, à une époque. Les chants de flagellation sont improvisés et chantés
majoritairement par des novices. Bien qu’orientés vers une thématique qu’on
peut leur reconnaître, les producteurs de ces chants recréent et laissent, par ce
fait, des empreintes de leur temps et de leur espace dans les pièces réalisées.
Certes, l’on y retrouve des noms de localités comme Badjoudè, Ouaké, Gaounga,
Wakitè, etc. ; des noms culturels et religieux tels que Dogo, Itagnitom, Adinath,
Alima, etc. qui tentent de donner à ces chants un caractère ancien.
Cependant, des indices de l’actualité prennent le pas sur ceux précédents.
Les chants se préoccupent beaucoup plus de l’actualité, du présent ou du récent
de la vie des hommes sur terre. En témoignent l’expression « le monde actuel »
ou « le monde d’aujourd’hui », fait comme titre du KPO1 ; du mot «Nᴐᴐnᴐ »,
c'est-à-dire « maintenant » répété plusieurs fois dans le chant KRE1. Dans ce
cadre faut-il rappeler que le procès du chanteur KFE1 est à l’encontre des
femmes modernes ? Mieux encore, le caractère moderne des chants se justifie
avec les emprunts des mots à d’autres langues notamment le français et l’Arabe.
Au français, sont empruntés les mots « paapa » dans les KPO1 et KPA1 ; le Nom
« Apenaa » (Abbés), « Directeur » dit «Tәlԑtԑ» au KPO1 ; et « laatio » (Radio)
dans le KSO1. A l’arabe, on trouve le nom «alәfa » dans le KRE1. Par ailleurs, il
arrive que les auteurs des chants improvisés soient connus de la communauté ou
du public soit à cause de la réussite de l’improvisation, soit à travers la voix de
l’improvisateur (ceci dit que ce dernier chante régulièrement) ou alors le
chanteur se fait lui-même identifié dans son chant. C’est le cas du chanteur du
KPA1 qui dit aux auditeurs que son nom est Gado, le cadet de la famille au
verset 40. Le second est celui du chant KSO1 qui, selon le verset 18 s’appelle
Abdou. Dans cette même veine, l’on peut évoquer un auteur reconnu par sa voix
dans notre collection sous le pseudonyme « Nᴐɣᴐfii » signifiant «petite bouche ».
Il peut être facilement identifié par tout Lokpa de la Donga qui écoute en
exemple le chant KPO2 bien que l’auteur n’y ait pas mentionné son nom. Enfin,
45
toujours avec ce dernier chant la mention du nom de Yayi Boni, ex-président de
la République du Bénin confirme que le chant de flagellation est moderne.
3. Le critère de thèmes
Les producteurs des chants de flagellation poursuivent tous un objectif
global en rapport avec le rite. Pour y parvenir, chacun aborde tel ou tel thème
qu’il pense privilégier dans son chant. Néanmoins, des thèmes secondaires
apparaissent volontairement ou non dans le développement du premier. Cette
caractéristique ne permet la classification d’un chant que suivant plusieurs
considérations. De l’analyse du répertoire suivant le contenu thématique, les
chants se classent en plusieurs catégories.
D’abord, les thèmes principaux dégagés de chaque chant depuis le codage
donnent huit thèmes privilégiés qui relevant de l’humaine condition se situent
entre la vie et la mort de l’Homme. Ce sont :
La femme : KFE 1 à 10, soit 34,48 %
La patience : KPA 1 à 4, soit 13,79 %
Le pouvoir : KPO 1 à 4, soit 13,79 %
La famille : KFA 1 à 3, soit 10,34 %
La solidarité : KSO 1 à 3, soit 10,34 %
L’homme : KHO 1 à 2, soit 6,89 %
La religion : KRE 1 à 2, soit 6,89 %
Et la mort : KMO, soit 3,44 %
Cette première catégorisation montre que la femme est de façon directe le
thème le plus abordé dans les chants de flagellation lokpa surtout par les
atantʋnaa.
Une autre analyse profonde fondée sur des aspects particuliers auxquels se
sont étendus les chants, une deuxième catégorisation aboutit à six thèmes plus
larges :
La culture de l’honneur ou de l’excellence. Il y a tous les chants du
répertoire sauf : KPO1 et KPO4 ; KFA2 et KFA3 ; KSO2 et KRE2 soit
79,31% dont aucun chant de atamtƲ.
46
La dénonciation regroupe : KFE1 à KFE10 ; KFA1, KFA2 et KFA3 ; KHO1
et KHO2 ; KRE1 et KRE2 puis KPO4 soit 62,06% dont 09/18 chants pour
atamtƲ.
La méchanceté de l’homme prend en compte : KSO1 à KSO3 ; KFA1 à
KFA3 ; KPA1 et KPA2 ; KFE1 puis KRE1 soit 34, 48% avec 01/10 chant
pour atamtƲ.
Le travail : on y trouve les chants qui évoquent les activités champêtres
ou économiques ou condamnent la paresse dans la communauté. Ce sont
les chants KHO1 puis KFE3, KFE6 et KFE9, puis KPA4 soit 17,24% avec
03/05 chants pour atamtƲ.
L’hypocrisie humaine : ce sont les chants dans lesquels le chanteur donne
à voir l’homme faire semblant d’être sérieux ou d’avoir abandonné une
pratique ou un comportement mais la réalité prouve le contraire. On peut
citer les chants : KRE1 et KRE2 soit 6,89% dont zéro chant pour atamtƲ.
L’analyse sous cet angle permet de conclure que la culture de l’honneur ou
de l’excellence est largement en tête suivi du thème de la dénonciation des
tares. Le premier thème est uniquement abordé par les anciens alors qu’au
niveau du second, et anciens et atamtƲnaa y sont également.
Une dernière évaluation basée sur la finalité des différents chants du
répertoire donne une catégorisation encore plus étendue et en rapport avec les
axes ou les plans d’activités. On dénombre des chants orientés vers :
Les affaires sociales : cette catégorie concerne les chants qui tentent de
défendre les cas sociaux, les populations parlent de la solidarité et des
affaires liées à la vie des familles ou des foyers. On y classe les chants :
KFE1 à KFE10 ; KSO1 à KSO3 ; KFA2 et KFA3 ; KRE1, puis KHO1 soit
62,06% avec 07/17 chants pour atamtƲ.
Les affaires morales : ce sont les chants qui prodiguent des conseils, font
des suggestions ou condamnent les déviances morales comme la
malhonnêteté. Sont dans cette catégorie, les chants : KPA1 à KPA4 ; KPO1
puis KHO2 soit 20,68% dont 01/06 chant pour atamtƲ.
La gestion du pouvoir : ceci concerne aussi bien la gestion au niveau local,
au niveau communal qu’au niveau national. Les chants qui répondent à ce
47
critère sont : KPO1 à KPO4 et KHO1 soit 17,24% dont 01/05 chant pour
atamtƲ.
Puis les affaires mystérieuses : les chants ici abordent les problèmes de
sorcellerie ou des réalités surnaturelles supérieures à l’homme ordinaire.
Trois chants répondent à ce critère. Ce sont : KRE1 ; KPA1 et KMO soit
10,34% avec zéro chant pour atamtƲ.
Cette dernière catégorisation beaucoup plus englobante donne à tirer la
conclusion selon laquelle les chants de flagellation lokpa se préoccupent plus des
affaires liées au social, puis à la morale sur les quatre axes de la vie qu’ils
abordent. Les anciens (ɩsakpa et kϽntϽnaa) dominent dans cette catégorie.
4. Le critère des entrées
Le critère des entrées permet d’évaluer la manière dont le chant a débuté,
c’est-à-dire l’ouverture de la pièce chantée. Si dans la réalité toute pièce orale a
une entrée, il existe diverses entrées auxquelles se rattache chaque chant en
fonction du projet esthétique choisi. Les chants de la flagellation s’inscrivant dans
cette logique semblent se départir de l’entrée directe ou ex-abrupto22 pour
opérer des choix à partir de l’entrée indirecte. En tenant compte de tout le
répertoire de textes, des entrées indirectes de différents types se dégagent23. On
y retrouve :
soit 31,03% du répertoire.
Les chants à entrée impératives : ce sont les chants dont l’ouverture est un
ordre, une invitation à un acte. On y distingue :
22 A. Bogniaho, « A la découverte de la chanson populaire au Bénin », Itinéraires et contacts de cultures, L’Harmattan, Paris, vol.8, 1988, pp.81-88. 23 Cette analyse s’appuie sur le travail de Mme Estella Clotilde Houngnihin, La forme et le style de la chanson d’EZIN GANGNON : Pour une image plurielle de l’Homme, mémoire de maîtrise, UAC/ FLASH/DLM, 2013.
48
Les chants à entrée déclarative : ils débutent par une phrase déclarative (ou
affirmative). Ce sont :
Les chants à entrée exclamative : Ces chants commencent soit par une
phrase déclarative, soit une interjection voire une onomatopée. Un seul
chant a répondu à ce type d’entrée dans le répertoire. C’est le chant KRE1
soit 03,44% du répertoire.
Enfin, les chants à entrée interrogative : le chant débute ici par une
question adressée aux auditeurs. Trois chants ont procédé ainsi dans le
répertoire. Ce sont :
KPO2 : Yayi Boni tala ntԑԑ (Yayi Boni n’a- t-il pas fait ?)
KMO : Leɣe η ηmԑlәɣә sɩm (Comment peux-tu éviter la mort?)
KFE9 : Pepoɣo pa laη na η yele kʋntʋɣʋ (Que doit-on te faire pour être
satisfaite), soit 10,34%.
Au terme de cette analyse des entrées, il ressort que les chanteurs du
rythme Kamʋyʋ ont d’habitude fait usage du critère de l’entrée indirecte. A
l’intérieur de cette entrée indirecte, en s’en tenant au répertoire, les types
pronominal, impératif, déclaratif, exclamatif et interrogatif sont utilisés.
Cependant, les deux premiers types sont plus préférés dans les chants que les
autres. Le privilège accordé à ces deux types a un rapport logique soit avec la
fonction assignée au rite, soit avec l’objectif du chanteur. Par l’entrée indirecte
impérative, le chanteur devenu mature se met dans la peau d’un responsable
qui a son savoir-faire et son savoir-vivre, puis les communique en toute autorité
49
aux auditeurs. Les ordres, les conseils et les recommandations se retrouvent
dans l’impératif. Quant à l’entrée indirecte pronominale, elle permet au chanteur
de flagellation de mettre en valeur lui-même, sa famille ou son clan (à travers les
premières personnes). Elle permet aussi de préciser à qui le chant s’adresse
particulièrement. C’est à ce niveau qu’il est possible de trouver d’autres types
d’entrée indirecte absents dans ce répertoire. C’est notamment l’apostrophe.
5. Le critère de l’énonciation
L’énonciation désigne l’ensemble des paramètres et des composantes qui
produisent l’énoncé24. Le critère de l’énonciation part du mode de délivrance du
chant pour le classer. A. Bogniaho à ce propos distingue trois modes : le mode
solo ou a cappella (le chanteur est seul et sans instrument), le mode responsoriel
(dans lequel le chanteur est accompagné d’un chœur) et le mode choriste où tout
le monde chante ensemble et simultanément. Des trois modes, les chants de
flagellation se situent dans le mode responsoriel. En effet, un chanteur ne peut
en principe chanter tout seul ni encore se joindre au chœur qui l’accompagne
pour entonner à la manière choriste. Ici, le pré chantre qu’est le chanteur guide
un chœur qui le suit et l’aide souvent à émettre des slogans. Il lui appartient
d’indiquer et de changer selon ses intentions littéraires, le(s) verset(s) refrain(s)
à prononcer par le chœur. C’est l’une des raisons de la remarque (NB)
mentionnée à la fin du chant présenté comme échantillon. En tout état de cause,
la logique du rythme Kamʋyʋ admet un pré chantre et un chœur pour produire le
chant qui respecte la coutume. Ce qui obéit sans doute au mode responsoriel.
6. Le critère du volume
Les chants de flagellation ne sont pas soumis à une contrainte liée à la
taille. Du fait de l’improvisation, leur volume varie d’un chant à un autre
relativement à l’inspiration, au talent et à la compétence de chaque
improvisateur. Cependant, la longueur d’un chant compte pour quelque chose.
En effet, sur les vingt-neuf(29) chants que compte le répertoire, plus de la moitié
ont au moins cinquante (50) versets chacun. Cela montre que les chants longs
sont de règle et les chants courts font l’exception émanant de l’incapacité de
24
Frédéric CALAS et Dominique- Rita CHARBONNEAU, Méthode du commentaire stylistique, Nathan/HER, Paris,
2000, p.27.
50
l’improvisateur. Cela est sous-entendu acceptée (inconsciemment) par la
communauté mais non exprimée peut être au nom de la liberté voulue dans ce
rite. Cependant, la longueur variable des chants n’est pas sans incidence sur
leur structure profonde.
De façon générale, l’on distingue dans les chants de flagellation lokpa une
introduction (hanbibԑ), un refrain (hanyiyi), un développement (hanko) et une
conclusion (hanfufo). En langue Lokpa, ces termes se traduisent respectivement
en : Kәtaalәtʋ, Kәtisitu, Hԑkʋtaa nyɩntʋ ou kʋyaasƏtʋ, puis Kԑtԑԑsaɣa nyɩntʋ ou
kƏtƏkɩtʋ.
L’introduction ou kƏtaalƏtʋ se présente globalement à travers les entrées
indirectes ci-haut identifiées et dont le sens reste une invitation, un ordre, une
demande, une interrogation, une exclamation ou une déclaration quelconque (se
référer au critère des entrées pour plus de compréhension). C’est à partir de
l’introduction ou l’ouverture que le refrain est précisé pour le chœur.
Le refrain ou kƏtisitu très souvent est un verset unique annoncé au début
du chant par l’improvisateur et qui s’en détache pour y revenir au besoin plus
tard. C’est l’exemple des chants KPO1 ; KPA1 ; KRE1 ; etc. Mais d’autre part
chez les atantʋnaa, le refrain n’existe pas car, le chœur répète chaque verset du
chant au fur et à mesure que le pré chantre les improvise. Le cas des chants
KHO1 et KFE3 en est une illustration. Dans ces conditions, l’émission des cris ou
des slogans est probable dans le développement.
Le développement ou kƲyaasƏtƲ quant à lui, est fait de description,
d’explication ou d’une narration de fait(s) comme c’est le cas dans les chants
KFA1, KFE2, KRE1, KFE3 et KHO1. On le trouve dans certains chants sous forme
d’argumentation ou de jugement de valeur notamment dans KPO1, KPA1et KFA1.
Le développement par ailleurs, suit une progression thématique à thèmes
dérivés. On y retrouve des détails sur des sous-thèmes à l’intérieur du
développement du thème principal. Le plus souvent, c’est l’occasion pour le
chanteur de revenir sur sa personne, sur celle de sa famille ou de son clan. C’est
l’exemple du KPA1 mais aussi et surtout du KRE1 où l’on retrouve une séquence
de vingt-six (26) versets (notamment de 58 à 83) consacrée à la personne du
chanteur lui-même. La longueur du développement d’un côté, la qualité du
51
7. Les intentions littéraires dans les chants
Samuel Martin Eno Belinga affirme que l’inspiration d’une œuvre littéraire
orale « exprime non seulement l’attitude mais aussi l’intention consciente ou
inconsciente de l’auteur initial et des auteurs traditionnalistes, vis-à-vis du thème
abordé… »25.. On déduit de cette affirmation que tout texte littéraire (orale ou
écrit) porte une ou des intentions. Celles-ci constituent le moyen par lequel on
25 Samuel Martin Eno Belinga, Comprendre la littérature orale africaine, Saint-Paul,Paris, 1978, p.104.
52
détermine les objectifs de l’auteur. Généralement, les intentions littéraires sont
de deux types : l’intention poétique et l’intention didactique.
7.1. L’intention poétique
Elle permet de créer chez le lecteur (ou l’auditeur) un ou plusieurs états
d’âme qui la subdivisent en de sous-intentions poétiques. Dans les chants de
Kamʋyʋ, on y découvre plus d’une.
Premièrement, il y a l’intention lyrique. Celle-ci, en se référant à la poésie
lyrique permet d’exprimer des sentiments personnels souvent passionnés à
travers l’usage des pronoms de la première personne ou en abordant le thème
de l’amour. A travers le répertoire, une remarque donne la preuve de l’existence
de l’intention lyrique. En effet, dans tous les chants ou presque les auteurs
s’identifient à travers les premières personnes « ma, mᴐ, ta ou tɩ ». Lorsque l’on
sait que l’objectif premier des chants selon le rite est de permettre aux jeunes
d’exprimer leurs opinions sur les faits de leurs localités, il est impossible de croire
que ces pronoms représentants les chanteurs ne traduisent pas leurs sentiments
par rapport aux faits abordés. Au-delà de cette analyse globale, il y a que dix
chants sur les vingt-neuf du répertoire traitent de la femme, c’est-à-dire un
symbole de l’amour. Aussi, l’usage des exclamations, des interjections puis des
interrogations respectivement dans les chants KHO1, KRE1, KPO2, KPO4, KFE1
KFE3 et KFE10 porte divers états d’âme des chanteurs.
Deuxièmement, on note l’intention pathétique. Elle crée une sorte de
compassion chez le lecteur qui vit psychologiquement les souffrances, les
lamentations ou la solitude involontaire des personnages qu’il lit. C’est l’exemple
du malade et de la famille victimes de l’anémie (ou de la sorcellerie) qui, dans le
chant KRE1 parcourent sans résultats les hôpitaux de la région. Dans le chant
KFE3, l’état de la mésaventurière enceinte devient pitoyable au moment où le
chanteur l’accable d’injures interminables.
Si la satire consiste à se moquer et dénoncer les tares dans la société,
l’intention satirique est un fait régulier dans les chants de la flagellation. Les
chanteurs n’ayant pas « honte d’appeler les choses par leur nom » cherchent
à « forcer le monde à venir au monde»26et, par ricochet l’on note dans les chants
une communication conflictuelle permanente. Ils ne tardent pas à s’attaquer à
26Propos empruntés à Sony LABOU TANSI, « Avertissement » in L’Etat honteux, Seuil, Paris,1981.
53
leurs éventuels adversaires. Dans le répertoire, les chants KFE1, KFE2 et KFE3 et
KFE10 s’en prennent à la femme pour dénoncer soit sa jalousie, soit sa paresse
ou son infidélité. Dans la même logique, le chant KHO1, le chanteur prononce
des invectives pour dénoncer la fainéantise d’un homme aux aventures
infructueuses. Celui du chant KPO4 promet le pire au maire de la commune si ce
dernier ne se resaisissait pas. A l’intérieur de ces dénonciations, les injures telles
que « chien géant » ; « yeux sales » ou des onomatopées comme « mԑԑsԑ mԑԑsԑ
wԑ », « caaʋ caaʋ wԑ » dans les chants KHO1 et KFE3 restent acerbes et
phobiques et situent ainsi le degré de la satire dans lesdits chants. Pendant ce
temps, les chants KRE1 et KRE2 soulignent l’hypocrisie religieuse dans la société.
Toujours à l’intérieur de l’intention poétique, l’on retrouve une intention
laudative. Celle-ci concerne les propos qui font l’éloge d’une personne. Dans le
contexte de kamʋɣʋ, les improvisateurs font d’abord leur propre éloge. C’est la
raison de la récurrence des pronoms de la première personne du singulier « Ma
ou Mᴐ ». On note aussi des expressions qui visent à vanter sa personne ou celle
de sa famille. L’exemple est le dernier verset du chant KFE3 : « Pʋlʋpʋ ɩ tԑԑ ma »
signifiant « Rien ne me passe inaperçu ». Un chef local est applaudit par l’auteur
du chant KPO3. Par ailleurs, l’on note aussi une intention didactique dans ces
chants de flagellation.
7.2. L’intention didactique
L’adjectif « didactique » désigne ce qui a pour objet d’instruire. Pour
Samuel Martin Eno Belinga, l’intention didactique « exprime la volonté de
connaître ou de transmettre des connaissances »27. En rapprochant cette
définition des chants, il ressort que l’intention didactique s’y manifeste de
différentes manières. Elle se note par des suggestions du chanteur après les
reproches faites au roi dans le KPO1. Ces suggestions en réalité communiquent
au roi des attitudes plus adéquates à tenir en public dans le monde d’aujourd’hui.
Dans le chant KFE1, le chanteur déconseille le trop d’ouverture avec la grande
famille à travers une parole insensée28.
27 S. M. E. Belinga, Op. cit. p.106. 28A. Bogniaho, Littérature orale au Bénin : «Littérature orale au Bénin : essai de classification endogène des
types de parole littéraire », in Ethiopiques, nouvelle série, Vol4, Dakar, N°3-4 des 3è et 4è trimestre, 1987, p.
61.
54
Chapitre IV
Au terme de ce chapitre, il est à retenir essentiellement que les chants de
flagellation fonctionnent sur le rythme Kamʋyʋ et restent modernes par la force
de l’improvisation. L’évaluation du critère de thèmes révèle une diversité de
thèmes dont le développement est orienté vers le social, la morale, la gestion du
pouvoir, etc. Sur le plan des entrées, les chants de flagellation adoptent l’entrée
indirecte et privilégient les ouvertures pronominale et impérative. Ils répondent
par ailleurs, au mode responsoriel à travers leur énonciation et se présentent
comme des chants longs de par leur structure profonde. Cependant, des chants
courts ne sont pas exclus au regard de l’improvisation et des talents des
improvisateurs. Partant de leurs inspirations, les chants de flagellation répondent
d’une part au critère de l’intention poétique et y développent aussi bien le
lyrique, le pathétique, le satirique que le laudatif. D’autre part, il y a l’intention
didactique qui n’est pas négligeable dans ces chants. Au regard de cette
typologie, l’on peut raisonnablement penser que les chants de flagellation dans
l’analyse s’accentuent thématiquement plus sur l’éducation.
55
Les chants de flagellation : regards sur la vie d’une communauté
Les chants de flagellation abordent des thèmes variés. Ce sont la femme,
l’homme, la patience, la solidarité, la religion, la famille, le pouvoir, la paresse…
mais aussi d’autres thèmes plus englobant comme : la méchanceté humaine, la
double facette de l’homme, l’autoglorification... Avant de montrer comment les
chants de flagellation éduquent, il est nécessaire d’illustrer quelques de ces
thèmes mineurs.
1. Les thèmes mineurs
1.1. L’homme
L’homme est l’un des sujets les plus abordés dans la flagellation d’autant
plus qu’il est au centre de cette coutume à la fois comme bénéficiaire direct,
puis animateur et conservateur des normes coutumières. La flagellation est une
occasion qui lui est offerte pour montrer quel que soit l’âge sa bravoure et
s’autocritiquer à travers les chants.
Dans le répertoire, l’homme est mis en valeur dans tous les chants par les
exécuteurs qui sont eux-mêmes des hommes. Cette mise en relief peut être
relative au rang social de l’homme comme c’est le cas dans les chants KPO1,
KPO2, KPO3 et KPO4 où l’homme est un dirigeant traditionnel ou politique : roi,
chef local ou maire. On l’aborde au plan des activités en tant qu’un cultivateur
(KFE1), un religieux (KRE1). Son comportement est divers. Il est paresseux
comme le mésaventurier du chant KHO1, hypocrit et méchant dans KRE1, mais
élégant tel le père du chanteur du chant KPA1.
Dans le contexte du foyer, l’homme est polygame et on éveille sa
consience sur les difficultés liées à la polygamie dans le chant KFE1. Ailleurs,
l’homme est perçu traditionnellement sous deux angles : mélioratif et péjoratif.
L’aspect mélioratif montre que l’homme doit être un responsable actif, capable
de prouver à la femme qu’il est le chef du foyer et par conséquent il lui revient
de décider face à une situation donnée. C’est l’exemple de mari que donne le
chanteur du chant KFE2 qui se veut catégorique dans les versets 25, 27 et 29
présentés comme suit :
Yé nyá máγánà lέέl -Quand tu as retrouvé quelqu’une
56
Ná ŋ tŋ sé ŋ γ cáá lέέl -Et tu refuses l’autre
Mŋná nyá waalɩ tϽϽ -Retourne-toi
Sous l’angle péjoratif, l’homme au foyer est un faible, un mou devant la
femme et y occasionne beaucoup de bruit. Tel est le cas de Karim souligné par
un verset du même chant. Le mari faible y est semblable à Ahouna, le mari
d’Anatou dans Un piège sans fin d’Olympe-Bhêly QUENUM qui préfère
abandonner le foyer à la femme. Cet aspect péjoratif prend aussi en compte
l’homme paresseux tel que le mari aventurier du chant KHO1 qui passe son
temps à faire des va-et-vient infructueux entre son village Tchalinga et le
Nigéria.
1.2. La femme
La coutume de la flagellation taille une grande importance à la femme bien
qu’elle ne soit pas concernée par l’initiation. Elle est perçue comme l’autre de
l’homme et par conséquent deux êtres qui doivent se compléter pour le
développement du foyer et de la communauté. Dans le répertoire, dix chants ont
touché le sujet de la femme avec des observations beaucoup plus focalisées sur
ce qui n’est pas conforme au bon sens commun, à l’éthique, à l’exemple voulu
par la communauté et qui mérite correction.
A cet effet, dans le chant KFE1, le chanteur a tenu à faire une distinction
entre les femmes. Il trouve les femmes des parents de l’ancien temps plus
modèles, laborieuses, aimantes et tolérantes que les femmes modernes. C’est
pourquoi il donne son témoignage avec les versets 39 à 45. Il y raconte que
quand il était plus petit, il a appris que dix femmes au temps des anciens parents
vivaient sous le toit d’un même homme et, pourtant, personne n’entendait ni
« a » ni « i ». C’est-à-dire aucune dispute.
Au niveau des femmes actuelles, c’est le contraire. La femme actuelle
excelle dans le péjoratif. Elle est satanique et superstitieuse selon les versets 77
et 78 que voici :
Pálɩ ná pá tŋ Elles sortent pour chercher
Álfáná tέέsί Les maisons des marabouts
Sur cette voie, il lui arrive de tomber dans la criminalité en décidant de tuer
son prochain comme cette femme l’a voulue contre sa coépouse au verset 93 :
57
Ma caa se ŋ kƲ ɩ kԐ, ce qui signifie : je veux que tu la tues.
La femme est aussi paresseuse comme la mésaventurière du KFE3 et la
belle-sœur du chanteur de KFE6. Elle est infidèle dans les chants KFE5 et KFE10,
insatisfaisante et capricieuse au point où l’improvisateur du KFE9 demande à la
femme : Weɣe paa laη na η sa, c’est-à-dire : que doit-on te faire pour être
satisfaite ?
Cette attitude est aussi caractéristique d’un autre défaut qui est la femme
profiteuse. C’est celle qui accepte le mariage à cause des biens de son conjoint.
L’illustration d’un tel caractère de la femme ramène au chant KFE1 avec les
versets 87 à 89 où dans l’exposition de son problème au marabout, la jalouse
martèle :
Mέwέná m páál -J’ai mon mari
Tlέέtέntέ -C’est un directeur
Litéé twà -L’argent est beaucoup
Mánáŋ ί ίsύύkί -Ma chambre, il n’entre pas
Cette précision, inopportune dans ce contexte de communication, est la
preuve que cette femme n’est avec ce mari qu’à cause des biens de ce dernier.
1.3. La paresse
La paresse est selon le dictionnaire de l’académie française,
une disposition qui porte à éviter l’effort, le travail, à négliger de remplir ses
obligations, à se complaire dans l’oisiveté. Elle est critiquée dans toutes les
civilisations du monde. La Bible dira à ce propos « Tu mangeras à la sueur de ton
front ». Elle ne l’est pas moins dans la culture lokpa. Le rite de flagellation qui
est un facteur de culture de l’excellence ne saurait pardonner le paresseux. Le
thème de la paresse se constate régulièrement dans les chants de KamƲɣƲ. Le
paresseux est reconnu par les caractéristiques qui lui sont propres. Il peut être
aussi bien un homme qu’une femme, un enfant comme un adulte.
Dans le chant KFE1, la paresse ne permet pas à la femme de distinguer le
moment des activités champêtres des temps libres, le travail de son époux aux
autres travaux. C’est pourquoi, à travers les versets 75,76, et 77, le chanteur fait
remarquer qu’elle ne va pas aux champs alors que l’époux souffre du manque
58
de récolteuses de coton. L’improvisateur du chant KFE4 se plaint de la paresse
des jeunes femmes qui déclinent totalement toute leur responsabilité
traditionnelle envers la belle-mère. L’homme paresseux dans le chant KHO1 est
reconnu par son aventure inutilement répétée entre son village natal et le
Nigéria, puis la fille paresseuse dans le chant KFE3 est caractérisée par une
aventure vers la ville à la quête de tout sauf le travail. Dans de telles conditions,
la personne paresseuse ne reste pas sans conséquences négatives. C’est dans ce
sens que Baoum Akéouli Nouhoum citant un conteur écrit : « Tu écoutes, le
paresseux, celui qu’on appelle paresseux, toutes les rétributions et ses
difficultés, aujourd’hui, tu vas entendre d’où cela vient29.» Effectivement, des
difficultés, on en compte dans le rang des paresseux ci-haut relèvés. Par
exemple, le paresseux aventurier du chant KHO1 avait trouvé une chance de se
rattraper puisqu’il a réussi à devenir chef de village aux versets 25 et 26, mais
hélas ! Le chanteur informe l’auditeur aux versets 27 à 30 que ce chef ne
s’intéresse qu’à des problèmes ignobles tels que : les vieux indisposés, les
querelles conjugales, etc. Jusqu’à ce que le verset 32 le qualifie de « Bavard ». Il
s’agit là d’une incompétence caractéristique de la paresse. Le point commun des
conséquences pour tous les paresseux est la honte, les injures. La
mésaventurière du chant KFE3 s’est vue attribuer les qualificatifs les plus
ignobles après avoir attrapé une grossesse. Ce sont : l’interjection « loo ! »,
« Chienne géante », « Les yeux sales » respectivement aux versets 12, 16 et
18. Cette interjection « loo ! » au verset 12 traduit l’état mou et fragile de la
femme enceinte qui, au lieu d’inspirer pitié suscite la colère au contraire sans
doute à cause de son caractère de paresseux auparavant. Est-ce là une
méchanceté humaine ?
1.4. La méchanceté humaine
La flagellation lutte beaucoup pour la cohésion sociale, la solidarité entre le
peuple lokpa. C’est pourquoi même si l’on constate avec Thomas Hobbes
que l’Homme est un loup pour l’Homme, les Lokpa se disent que c’est dans le
cas où l’individu n’a pas compris que l’Homme est le remède pour l’Homme pour
paraphraser Seydou Badian.
29 Le conte et l’éducation chez les Lokpa du Bénin, Maitrise, DLM/FLASH /UAC, 2011, p.79.
59
Alors dans les chants de Kamʋɣʋ, les chanteurs abordent souvent la
méchanceté humaine dans le seul but de conscientiser davantage les méchants
d’une part et de l’autre, faire comprendre aux ignorants telle ou telle méchanceté
afin d’éveiller leurs esprits. Pour le faire, certains chanteurs peuvent taire les
détails comme le cas de l’exécuteur du chant KPO1. En effet, la répétition à
outrance du verset « Le monde actuel est mauvais» reste un non-dit qui sous-
entend beaucoup de méchanceté dans le monde. Conscient que son interlocuteur
le roi comprend déjà le fond dudit verset, il passe alors aux solutions en
enseignant la patience, puis en prodiguant des conseils pratiques au roi. Pour
d’autres, il faut préciser clairement le mal afin d’éviter les risques d’erreur. C’est
dans cette logique que le chanteur du chant KFE1 les propos l’épouse chez
marabout au verset 94 : « Je veux que tu la tues ». Au niveau du chant KRE1,
l’on lit à partir des versets 17 à 23, une explication de la souffrance qu’endurent
certaines victimes parcourant les hôpitaux de Bèmbèrèké, de Tanguiéta, de
warahatè, etc. pour sauver leur malade anémié. Cette souffrance est l’oeuvre
d’un malfaiteur qui, aux versets 45 à 47 préfère la chair humaine aux éléments
nutritifs conventionnels (le frommage sojà, la viande, etc.). Les chants KFA2 et
KFA3 illustrent aussi la méchanceté humaine à travers la dénonciation du
traitement fait aux orphelins dans les familles et la société.
1.5. La double facette de l’Homme
Les croyances disent de l’Homme qu’il est créé à l’image de Dieu. Montaigne
pour sa part le trouve « ondoyant et divers ». En tout état de cause, l’Homme
n’est pas ce que l’on voit, entend de lui ou parfois ce qu’on connait de lui. Il est
loin d’être unifacial. Les actes qu’il pose chaque jour de sa vie laissent découvrir
tel ou tel coté positif ou négatif confirmant ou non sa personne.
Dans le contexte de kamʋɣʋ, les chants prouvent qu’à des moments donnés
l’Homme trompe ses prochains en posant des actes contraires à ce qu’on sait ou
voit chez lui. C’est l’exemple les Alphas, des pasteurs et abbés qui, reconnus
comme représentants de Dieu sur terre ne reflètent pas toujours l’image du
Créateur. C’est le message que porte le chanteur du chant KRE1 en ses versets
26, 27et 28 suivants :
Mɩ sԑԑkί ίsϽ ntԑ, -Vous priez Dieu ainsi
60
Ahoo yuγu ίlԑ -Quand il fait nuit
Na ɩ kpiki mә lalaa piya - Vous m’attaquez les enfants
De ces versets se dégage la double facette de certains hommes de Dieu. La
première est celle présentée et reconnue comme jouant le rôle du Tout-Puissant
et la seconde est celle camouflée et inconnue des fidèles surtout : le sorcier, au
sens négatif du terme. L’on peut approuver cette pensée lorsque ce dernier
écoute les recommandations du roi belge Léopold II à l’endroit des prêtres
coloniaux en mission au Congo belge :
« S’ils (les congolais) vous demandent pourquoi vous
agissez contrairement à ce que vous prêchez, répondez-
les : vous les Noirs, suivez ce que nous lisons et non ce
que nous faisons.»30
Dans les chants KFE1 et KFE2, la double facette est lue dans les différentes
descriptions des manèges des épouses jalouses qui, face à leur mari sont
humaines mais intolérantes voire cruelles à l’endroit des coépouses.
2. L’éducation comme thème majeur
KamƲɣƲ en tant que rite de passage a pour mission la transmission d’un
certain nombre de valeurs éducatives. Dans ce cadre, l’ensemble des thèmes des
chants sont utilisés comme des outils pour servir une intention, un objectif ou
mieux un thème majeur : c’est l’éducation. La présence de l’éducation dans les
chants du rite kamʋγʋ est très évidente. Pour mieux se convaincre des preuves
qui en témoignent, il est nécessaire d’avoir une compréhension plus claire de
l’éducation.
Pour Jean Marie Schaeffer, le but de l’éducation est « d’amener l’être
humain à coincider avec sa propre essence »31. A la question ‘’qu’est ce que
l’éducation ? ‘’, F. Macaire et alii, dans leur manuel de pédagogie appliquée32
répondent en citant Carrel :
30 Discours du roi Léopold II aux missionnaires accueillis au congo belge en 1883. 31 Schaeffer Jean Marie, « Eduquer », in communications 72, 2002, l’idéal éducatif,p. 72. 32 F. Macaire, F.Gauthier et J. SABIN, Notre beau métier, manuel de pédagogie appliquée , Les classiques africains, nouvelle édition, 1993, p. 5.
61
« L’éducation consiste à guider les tendances héréditaires de
l’enfant afin de produire un développement harmonieux. Son
but est de tirer le meilleur parti possible de chaque individu…
Son second but, c’est de développer des individus qui soient
en harmonie avec leurs milieux.».
Et puis à eux-mêmes de conclure que l’éducation c’est « L’art d’apprendre
aux enfants à se passer de nous. ».
33 Op. Cit, p.6.
62
-ɩsԑntáá nyɩnɩnyɩnɩ tέ kέ teu -La coloration du visage n’est pas la beauté
- ŋkʋ sέέməŋ tέ kέ teu -Aussi le teint clair n’est pas la beauté
- Nim sɔɔsəŋ tέ kέ teu -La pommade n’est pas la beauté
Ces versets montrent aux femmes qu’une beauté artificielle ne peut être
acceptée véritablement au sein de la société. Dans la même logique, il y a une
métaphore utilisée dans les versets 43 et 46 du chant KFE3 traduits comme :
- Quand elle marche ; - Très repoussant
- Très repoussant ; - Les déchets mouillés par la pluie
Cette métaphore souligne d’une part que le comparant « la démarche de la
fille » est vilaine et montre par le comparé «les déchets mouillés » le caractère
dégoutant de ladite démarche et par conséquent, la rectification s’impose à la
fille. La même observation peut être faite avec les versets 18 et 19 du même
chant pour prouver que le chanteur indique à la fille mais aussi aux auditeurs
que le physique doit être suivi de prêt. Mais ces improvisateurs ne s’arrêtent pas
au physique, ils parlent aussi de l’éducation intellectuelle.
2.2. L’éducation intellectuelle
Elle consiste à affiner les sens, ouvrir et développer l’intelligence, puis
former le jugement de l’éduqué. C’est aussi d’exercer, meubler sa mémoire ou
de diriger son imagination.
A ce niveau, c’est beaucoup plus à la personne du chanteur lui-même que
cette éducation s’applique. D’abord à l’étape de l’improvisation du chant,
l’imagination du chanteur est mise à l’épreuve et il fait aussi usage de son
intelligence surtout au cas où l’inspiration n’est pas au rendez-vous pour sauver
son honneur. Une illustration de cette réalité se note dans le KFE1. Dans le but
de dénoncer les attitudes des femmes jalouses chez les marabouts, le chanteur
laisse entendre ceci dans les versets 82 au 87 voire plus :
- Po puki na pa tala tɔ… -Une fois arrivées
- Halɩ pԑ kԑԑsɩ aləfaa… -Elles narrent ainsi au marabout
- Sɩ aləfaa ŋ nɩɩwa a… -Marabout, écoute
63
-Mԑ wέná mə páálʋ… -J’ai mon mari
-Təlέέtέέ ntԑ -C’est un directeur
- Litéé tɔɔwà… -L’argent est beaucoup
Dans cette séquence de bon mensonge, les deux premiers versets donnent
l’impression que le chanteur était un témoin oculaire de la scène. Ce qui ne
peut, dans ce cas, être possible. Il s’agit du fruit d’une imagination travaillée
par son intelligence pour créer le « mentir-vrai » aux auditeurs. Des exemples
pareils pouvaient être multipliés à travers d’autres chants notamment certaines
séquences des chants KHO1 et KFE3. Quant à l’exercice de la mémoire du
chanteur, il survient aussi bien avant et pendant la production du chant.
Puisque les chants doivent nécessairement porter sur les faits de la
communauté, deux possibilités s’offrent à tout improvisateur : imaginer les faits
vraisemblables à dire ou raconter les faits passés, vécus ou appris par l’impr
ovisateur au cours de sa vie réelle. C’est cette dernière possibilité qui sollicite la
mémoire et le chant y prend une allure narrative. C’est cette preuve que donne
le chant KHO1. Le chanteur y relate les aventures infructueuses d’un fainéant
précisément entre les versets 12 et 23. Si dans cette séquence, les versets à
l’intérieur (c’est-à-dire 13, 14, 15, 16, 17, 19,20, 21 et 22) rendent compte des
va-et-vient du fainéant dans le passé à travers les verbes d’action « ramassa »,
« amena », « ramassa à nouveau » et « ramena », les versets de bornes (12 et
23) disent :
-Pá l lɩ ɩ cálәŋa -Il nait à Tchalinga
-ɩ məlί tá cálәηa -Il retourna dans notre Tchalinga
L’analyse de ces versets révèle le caractère objectif et réel du récit par le
nom « Tchalinga », village du fainéant mais aussi celui du chanteur comme le
prouve la présence de le possessif « notre » dans le dernier verset. Il s’agit ici
d’un témoin plus ou moins proche qui a vécu ou appris le fait et l’a enregistré en
lui pendant longtemps avant de le transformer en chant de la flagellation au
moment venu. De même, le chanteur du KSO2 a fait preuve de mémoire pour
rappeler à l’auditoire l’état de la solidarité dans le passé de Ouaké afin de mieux
faire constater la disparition progressive de cette valeur dans la localité
64
aujourd’hui. Celui du KRE2 en a fait de même pour parler de la pratique de
l’Islam actuellemnt dans sa localité. En somme, la récurrence de cette référence
à l’histoire, au passé dans les chants de flagellation joue deux fonctions. D’une
part, elle contraint les chanteurs (en phase) moins imaginatifs à beaucoup
s’intéresser à l’histoire et de l’autre, les initiés inférieurs gardent en mémoire les
faits quotidiens (bons ou mauvais) en vue de se faciliter la tâche à leur tour.
L’éducation intellectuelle, c’est aussi la formation ou la préparation d’un
esprit de jugement chez l’Homme. La nature des chants de Kamʋyʋ prédispose
le Lokpa à cet esprit. Dans le jugement, l’on sous-entend l’acte de juger ou le
résultat de cette action. C’est aussi une approbation ou une condamnation d’une
action morale, c’est encore un avis, une opinion. Un comportement intellectuel
se remarque non seulement au niveau des chanteurs à travers leurs
productions, mais aussi à l’endroit des auditeurs par rapport aux messages
desdites productions.
Dans le répertoire, certains chants montrent diversement l’attitude
intellectuelle des chanteurs. Dans le chant KPO1, le chanteur se présente
comme un maître ou du moins un savant qui transmet des connaissances au roi
par rapport à la gestion du pouvoir. Aux versets 37, 39, 41, 43 et 45, il conseille
au roi un savoir-être :
- Yé ƞ wέ yɩla taa -Quand tu es en public
- Nyԑ fέέlέ ɩ tɔɔwà -Et tu as trop de crainte
-Nà ƞ kàƞ nyá nyύγύ kέ támmə -Et tu évites de fixer les gens
-Nà ƞ tələkʋγʋ nyέ ɩsέ -Et tu tritures les yeux
- Lalàà cákɩ ƞ kpàɣànʋ -Les gens te prendront pour cheval
En dehors de ce comportement intellectuel instructif, les chanteurs font
une critique qui consiste à faire constater au fautif ses erreurs en les soulignant.
Avant de dire au roi le savoir-être ci-dessus noté, l’improvisateur de ce chant a
fait comprendre à ce dernier, ce qui ne va pas aux versets 17 puis 27 livrés
comme suit :
65
66
caché. Les chants leur permettent de savoir que « la société est comme un
individu chez qui le bon grain est mêlé de l’ivraie»34 afin que le Lokpa sache ne
pas se mêler de ce qui ne le regarde pas. Au niveau du KFA1, la dénonciation et
l’appel à la prudence, à l’éveille de conscience se situent au plan familial.
L’improvisateur refuse un attachement acharné à la famille « manche longue »
et déclare à son père :
-Ma caa taa nɩɩ Koople - Mon père méfie-toi de la parenté
Ce refus d’accord de confiance au verset 2 du chant est dû à certaines
raisons que le chanteur livre aux versets 5 à 8 qui stipulent :
-Koopəle taa sιm kԑ -Dans la parenté se trouve la mort
-Ye ƞ tɩƞà koopəle -Si tu t’attaches à la parenté
-Ma tɔmàà pa piƞ nya -Je dis que tu ne vis pas longtemps
-Yaa pa saa ƞ tɔkι -Ou tu vis malade
Si ces versets se présentent comme la leçon d’une expérience de vie du
chanteur, ils mettent en évidence la nouvelle considération rétrécissante de la
famille en Afrique.
1.3. L’éducation sociale et civique
Dans cette partie, l’éducation concerne les droits et les devoirs d’un
individu dans la société. Elle attire l’attention sur les dangers et les
opportunités, développe l’esprit de cohésion, d’harmonie, de solidarité dans la
vie sociale de la communauté. Pour le démontrer, les chants de flagellation
procèdent de différentes manières.
Dans le chant KFE1, l’improvisateur milite pour le respect des droits en
procédant par la défense d’une vie. En effet, dans la critique faite à la femme à la
jalousie morbide, c’est la décision de cette dernière de tuer sa coépouse, qui a
réellement fait l’objet de la phobie du chanteur. Le début du chant montre cette
préoccupation de l’improvisateur. Les deux versets suivants sont une preuve :
34 F. Macaire et alii,, op.Cit. p.372.
67
-Yɔtɔƞ kε puƞ naa -La coépouse est-elle une bête ?
-Mɔ pɔɔsaƞ γɔtɔƞ kε puƞ naJe te demande :la coépouse est-elle une bête ?
Ces interrogations sont posées par le chanteur dès le début du chant après
avoir rappeler la décision de la jalouse aux trois premiers versets. Dans cette
interrogation présentée sous deux styles différents, le nom « bête » est
significatif au regard des verbes « laaƞ » ou « kƲ »(signifiant
respectivement « immole » et « tue ») des versets précédents. Le chanteur
rappelle à la jalouse et au public que c’est la bête qu’un être humain est autorisé
à tuer ou immoler. Il n’a donc pas le droit sur la vie d’un autre humain. La
répétition de cette interrogation ainsi que son choix comme refrain pour le chœur
concourent à l’intensification de ce message à l’endroit des auditeurs. Ailleurs,
dans les chants KHO1 et KFE3, ce sont les devoirs dans les sociétés qui
préoccupent les improvisateurs. Tous deux condamnent, chacun de son coté, la
paresse de tel ou tel membre de la communauté. Pour eux, c’est une violation
d’un tabou social dont la réparation nécessite la violence langagière afin
d’amener tout paresseux à aimer le travail. Ils choisissent alors de prosférer des
invectives. Pendant que l’improvisateur du KFE3 traite la mésaventurière
enceinte de « chienne géante ; la dangereuse, la petite folle…», celui du KHO1
fait de même en disant au fainéant mésaventurieux : « chien géant, putain
géant, le bavard, etc. ». Il s’agit, à travers ces « insultes ontotypiques
situationnels»35, de toucher psychologiquement l’incriminé ; de le livrer à la
honte afin qu’il change pour reconnaitre que rester paresseux, c’est manquer à
son devoir de travailler. Les onomatopées « mԑԑsԑ mԑԑsԑ wԑ ; caaʋ caaʋ wԑ ;
kpaayɩ cooce » dans le KFE3, par parallélisme dans la signification36 traduisent la
démarche de la fille et participent à cet idéal par leurs rôles à la fois moqueur et
comique.
Les chants de flagellation éveillent les consciences et les esprits des
populations pour rester prudentes et vigilantes dans leur quotidien. Les chants
KRE1 et KFA1 préviennent les auditeurs des dangers de la vie. Dans le premier,
35Il s’agit d’une péjoration ontotypique qui apparait comme une caractérisation momentanée de la victime de
l’agression verbale ; José Watunda KANGANDIO, « Les inultes dans la fin tragique de Philomène TRALALA de FOUAD LAROUI », Littératures africaines : langues et écritures, Apey Esobe LETE et Mahougnon KAKPO, Les Editions des DIASPORAS, Cotonou, 2011, p. 295. 36 Geneviève CALABRIS ; « Le parallélisme phono-gestuel » ;In Collectif ; GRAINES DE PAROLES puissance du verbe et traditions orales, CNSR, Paris, 1989, p. 408.
68
le chanteur dénonce les soi-disant hommes de Dieu de la communauté. Ces
derniers se cachent derrière Dieu et les religions modernes pour nuire aux
enfants d’autrui par la sorcellerie. Les alphas, les pasteurs, les abbés endorment
la conscience des populations avec la religion car, le jour ils sont ‘’hommes de
Dieu’,’ mais la nuit ils attaquent les humains. C’est ce que disent les versets 8, 9
et 10 parmi tant d’autres :
- Pԑ sԑԑkɩ ɩsᴐ ntԑ Ils prient Dieu ainsi
- Aho yuɣu lԑ Quand il fait nuit
- Pe kpiki me lalaa piya Ils m’attaquent les enfants d’autrui.
Si ces versets se présentent comme la leçon d’une expérience de vie du
chanteur, ils mettent en évidence la nouvelle considération rétrécissante de la
famille en Afrique.
69
L’autoglorification, quant à elle, se manifeste par l’utilisation de « Je » ou
ses correspondances. Dans les KPA1, KHO1 et KFE3 l’on lit respectivement :
(V41)Yʋlʋ ɩsәlԑ ɩ Tᴐkɩ ma L’œil de l’homme me tue pas
(V34) Ta paa fԑɩ Tәlԑ Notre crainte n’est pas à ce niveau
(V50) Pʋlʋpʋ ɩɩ tԑԑ ma Rien ne me passe inaperçu
Une analyse sociocritique révèle que les auteurs de ces trois versets
possèdent de forces mystiques et sont ici à la quête, par l’exagération, de la
reconnaissance par l’auditoire de ce mérite non moins rare. L’improvisateur du
KRE1 s’inscrit dans cette quête à travers les versets 63 et 64. Il s’y considère
70
comme « un petit enfant » « Mais qui dit grands choses ». Plus loin, aux versets
74 à 76, il s’est respectivement appelé « Garçon » puis « chasseur ». Celui du
KHO1 se prend pour une personne particulière censée relever le défi dans leur
concession. Alors, parlant de lui- même au verset 6, il dit : « Pʋlʋpʋ naa lɩɩwa »
signifiant « Quelque chose est née» avant de poursuivre avec « Ils faisaient en
vain », verset 7 et finir au verset 8 en disant : « Autrefois était pitoyable ».
L’ensemble de ces différents propos témoigne de ce que l’autoglorification prend
des formes particulières dans les chants de la flagellation. Elle permet aussi bien
à l’improvisateur qu’à l’auditeur de découvrir en eux la qualité particulière, d’en
être fiers et si possible de la développer pour la diversité de talents et la
complémentarité des compétences pour le bien de la communauté.
Les chants de flagellation invitent aussi à la culture de la solidarité et de la
cohésion. Dans ces chants, des propos divers tentent de développer un esprit
social. Dans le répertoire par exemple, trois chants abordent le thème de la
solidarité. Tous regrettent le manque ou la disparition progressive des habitudes
liées à celle-ci. Le chant KSO1, s’intéresse à l’entraide à Ouaké. L’improvisateur
lance aux auditeurs un message aux versets 2, 3, 4, et 5 :
Awanla ɩ fepiya mԑ Jeunes d’Awanla
ɩcam tuuki mpʋɣʋ Le faible évolue ainsi
ɩnɩɩkɩ yʋlʋ waasʋɣʋ lԑԑlʋ Comprenez que c’est l’Homme qui aide son prochain
ɩ nɩɩkɩ wake ɩcatԑ tɩ waasɩ ta tәma Populations de Ouaké entraidons-nous
Le chanteur, par ces versets, invite les jeunes à reconnaître que nul ne se
suffit tout seul dans la vie. Pendant que certains sont en dessous de la moyenne,
d’autres en sont au-delà. Pour une vie commune harmonieuse, il appartient aux
forts, de venir en aide aux faibles. C’est par cette solidarité que « nous
obtiendrons tout », complète-t-il au verset 7. Au niveau du KSO2, le regret de la
disparition progressive de l’amour du prochain à Wakitè est manifesté à travers
une comparaison des époques. De par le passé, il existait toujours des gens
magnanimes pour venir en aide à qui en a besoin à Wakitè. Mais aujourd’hui,
non seulement, ils n’en ont pas la volonté mais ils manifestent des intentions
71
machiavéliques. L’auteur du KFE2, en invitant la femme jalouse à accepter la
coépouse, montre à cette dernière les avantages de la vie à deux dans un foyer
aux versets 19 et 21. Ce comportement dépend de la morale de chacun. C’est
pourquoi, l’éducation morale n’est pas laissée pour compte.
2.4. L’éducation morale
La morale, selon le dictionnaire universel, est un ensemble de principes de
jugement de conduite qui s’impose à la conscience individuelle ou collective
comme fondés sur les impératifs du bien.
L’éducation morale, selon F. Macaire et alii (op.cit. p. 6), a pour objectif de
faire de l’enfant un citoyen honnête, travailleur, loyal, et consciencieux. Elle lui
inculque le sens du devoir, lui apprend à éviter le mal. Pour amener le fils lokpa
à ces valeurs, les chants de la flagellation utilisent plusieurs moyens et couvrent
plusieurs plans.
Les improvisateurs saisissent l’occasion pour blâmer le vice, sanctionner le
vicieux et le corriger si possible. Dans les KHO1 et KFE3, la paresse est
condamnée chez l’homme comme chez la femme. Les injures sont prononcées
contre les paresseux. Ces injures publiques se présentent comme des sanctions
contre les fautifs. Elles ont un rôle de corrections psychologiques et morales
lorsque l’on se situe et évalue les conditions de productions des chants. Si les
vices sont blâmés, les vertus et les bonnes actions sont louées pour maintenir la
logique des valeurs morales. C’est l’exemple que donne le chanteur du KSO1
lorsqu’il loue le roi défunt de Sonaholou et finit son chant par :
- Sᴐɣᴐna ta sɩ na fԑԑlԑ Sona est mort dignement
- ɩ heeli ɩcatԑ Informez ainsi tout le monde.
Le rappel du fait, doublé de l’invitation à la propagation de l’information
s’interprète comme une défense du bon vécu, des vertus et de la dignité du roi
par l’improvisateur. D’autre part, la justice équitable est recherchée comme c’est
le cas dans le KPO1. Le chanteur refuse au roi un jugement qui tient compte non
pas des faits, mais des situations ou du rang des jugés. Aux versets 25,27, 29,
et 31, il lui dit :
- Ye η kʋla tᴐm hʋʋ Quand tu commences le jugement
72
-Tәηʋɣʋ tᴐm lona Il faut respecter la logique
- Taa hʋ suluwa tᴐm Ne juge pas selon la situation de l’orphelin
-Taa hʋ kʋnyᴐηtʋnaa tᴐm Ne juge pas selon la situation du pauvre
Par ailleurs, on peut noter dans le KFE1 un autre refus d’un acte mauvais.
Le chanteur dénonce la jalousie morbide de la femme et l’assaille de
l’interrogation : « la coépouse est-elle une bête ? ». Cette interrogation oratoire37
avec sa métaphore, vise à ramener la jalousie à la l’état d’une personne de
morale normale mais aussi à éviter de porter atteinte à la vie de son prochain au
nom d’un sentiment. Dans le chant KPO2, le chanteur refuse l’ingratitude envers
l’ex-président Yayi Boni.
Dans l’analyse de l’éducation morale dans les chants de la flagellation, la
culture du courage fait aussi son entrée. Ceci consiste à montrer par le fond
d’un chant son audace à toucher ce qui est fui par bon nombre d’improvisateurs.
Le premier élément évaluateur des chanteurs reste le thème principal choisi.
Dans cette perspective, la dénonciation de la sorcellerie, la critique acerbe de ses
parents, des chefs locaux, des marabouts, l’appel à un défi, sont caractéristiques.
Ainsi, les improvisations des KRE1, KFA1, KPO1 et KPO4, se distinguent.
Cependant, dans le développement d’un thème, les invitations au défi
permettent à l’auditoire d’identifier les courageux.
A titre d’exemple, non seulement le chanteur du chant KFA1 dénigre
la parenté mais lance aussi au public spectateur un défi dans les versets 9 et 10
suivants :
-Ye η wԑna kәnaaʋ Si tu as de forces mystiques
-Ma ca sɩ η nyɩnɩ ma Je veux que tu me défis
Les versets ci-dessus révèlent un courage du chanteur car s’il est vrai que
l’on soupçonne que lui-même (le chanteur) soit « puissant », il est impossible de
se rassurer que personne d’autre n’ait une force supérieure à la sienne. Malgré le
risque de la honte publique, ce chanteur a osé. Plusieurs propos dans le corpus
notamment ceux destinés à l’autoglorification des chanteurs adhèrent à cette
37 Estella C. Houngnihin, op. Cit. p. 43. « Nous appelons interrogation oratoire, une question dont le poseur
connait d’avance la réponse de l’auditeur.»
73
interprétation relative au courage. Toutefois, la culture religieuse peut jouer en
faveur ou non du chanteur.
2.5. L’éducation religieuse
Elle consiste à faire connaître à l’éduqué ses devoirs envers Dieu ou les
dieux et à l’entrainer à la pratique de la volonté de ce(s) dernier(s). Son but,
selon F. Macaire et alii, est à la fois temporel et spirituel, personnel, familial et
social. Il s’agit de craindre Dieu/dieux ou/et de sauvegarder des valeurs
ancestrales. (F. Macaire et alii, op cit, p.383.).
Ces réalités se retrouvent d’une manière ou d’une autre dans les chants de
flagellation. A titre illustratif, dans certains chants, des versets font état de la
reconnaissance, la conservation et la perpétuation des coutumes ancestrales à
travers la pratique. Ce sont « c’est la tradition ancienne » (verset 11, KPO1) ;
« cette année, c’est notre année » (versets 2 et 3 KHO1) ; « Que Dieu nous
préserve» (versets 10 KSO1) ; « Qui cherche les pratiques traditionnelles vient à
Awanla ». Mieux encore le témoignage du chanteur du KSO1 selon lequel les
sacrifices dans le village d’Awanla auraient délivré la radio locale de Ouaké, reste
une preuve de croyances et d’invitation au valeurs ancestrales et fétichistes. Les
défis mystiques lancés par le chanteur du KFA1 sont une autre preuve de
croyance aux forces mystiques chez les Lokpa. Dans ce même chant,
l’improvisateur défend les coutumes ancestrales au détriment de l’Islam. D’où il
interroge ses adversaires aux versets 9, 10 et 11 suivants :
o Pourtant vos grands parents en avaient pratiqué (la flagellation)
o Vos parents aussi o Et pourquoi vous vous y renoncez ?
L’intention de ce chanteur est simplement de sauvegarder la pratique de
flagellation. Pour lui, il n’y voit aucun handicap à être un bon fidèle musulman.
Dans le KRE1, le champ lexical composé des noms comme « alphas, pasteur,
abbés, Dieu » doublée de la dénonciation de ceux-ci témoigne d’une bonne
guerre entre les participants des religions modernes et ceux des religions
ancestrales ou endogènes.
En somme, il est à reconnaître à travers cette étude thématique que les
chants de flagellation abordent des thèmes divers qui en réalité se présentent
74
comme des motifs38. Mais leur développement aboutit principalement à
l’éducation dans son ensemble. Quelle soit physique ou intellectuelle, sociale ou
civique ; morale ou religieuse, les chanteurs de flagellation ont toujours leurs
manières d’exploiter ces ‘’motifs’’ pour éduquer les auditeurs en particulier et le
peuple lokpa en général.
Chapitre V
L’esthétique des chants de flagellation lokpa
Pour Oswald DUCROT et Jean Marie Schaeffer, « la description stylistique
d’un ensemble de texte se ramène à la description des propriétés
d’exemplification verbale qu’ils ont en commun »39. Frédéric CALAS et Dominique
Rita CHARBONNEAU de leur côté pensent qu’
« elle est sans cesse au service de l’interprétation littérairedu texte,
en s’attachant au prime abord aux modalités de l’écriture de l’œuvre.
C’est-à-dire au choix des mots, des phrases et des figures qui
permettent aux auteurs de livrer leur vision du monde, de construire
leurs univers et de les faire partager au lecteur.»40
Sur la base de ces deux clarifications, l’étude de l’esthétique des chants de
flagellation va s’appuyer sur les univers actantiel, syntaxique et rhétorique des
chants.
1.Personnages, actions et conséquences
1.1. Les personnages
38Terme emprunté à Oswald Ducrot et Jean Marie Schaeffer, in Nouveau dictionnaire des sciences du langage, Editions du Seuil, Paris, p.530. 39 op. cit.p. 543. 40 op. cit. p.6 .
75
Les énoncés des chants de flagellation pour construire leur message
procèdent par des actions. Celles-ci sont orchestrées par des acteurs. Le
principal et le plus régulier des acteurs dans ces chants est l’Homme dans sa
généralité, à qui s’ajoute souvent Dieu et la mort. L’Homme en tant que
personnage se décline dans les chants en : l’homme (KPO1, KPO2, KHO1) ; la
femme (KFE1, KFE2, KFE4, KFE6, KFE9, KFE10) ; la fille (KFE3, KFE5, KFE7,
KFE8) ; un corps professionnel (KRE1) ; un parent ou membre de famille (KFA1,
KHO2) ; un groupe social ( KSO1 , KSO2, KRE2) ; un vicieux : sorcier,
paresseux, jaloux, etc.( KRE1, KHO1, KFE3) ; un chef traditionnel ou politique
(KPO1 à KPO4). Le locuteur ou le narrateur peut aussi être un personnage à
travers les pronoms personnels tels que : Mɔ, Ma.
Les personnages restent toujours humains et réels dans les chants de
flagellation mais ils prennent plusieurs formes à l’intérieur d’un même énoncé. Il
existe des personnages autonomes, sans rapport avec d’autres. C’est le cas de la
digression pour l’autoglorification du chanteur ou il reste le bénéficiaire des effets
de ses actions ou ses propos. Sinon les autres personnages sont liés par les
actions comme dans tout récit.
1.2. Les actions et les conséquences
Les actions posées par les personnages produisent des effets sur ces
derniers et permettent de définir l’ambiance dans laquelle ils vivent. On y
trouve :
Le refus de partage d’un bien ou d’un être qui entraine à la jalousie voire au
crime ou encore à la perte de ce qu’on aimait tant. C’est l’exemple des
femmes jalouses dans les KFE1 et KFE2.
Le bonheur des uns nécessite la souffrance des autres comme c’est le cas du
malade et de la famille victimes de l’anémie orchestré par les sorciers dans
les chant KRE1.
Le refus de la souffrance qui entraine au déshonneur dans les KHO1 et KFE3.
L’homme fainéant manquant de labeur a échoué même dans sa fonction de
chef local. La paresseuse a écopé d’une grossesse dans sa mésaventure et est
revenu au point de départ, le village.
On note aussi l’ignorance qui hadicape la réussite personnelle ou collective.
L’illustration est donnée dans les KPO1, KSO1 et KSO2, KRE2 et KPA1.
76
L’enregistrement des coups bas dans le silence conduit à la méfiance, à la
crise puis à la rebellion. Ce fut le cas du chanteur du KFA1 contre ces parents.
Enfin, il y a dans le cadre des digressions pour l’autoglorification, le rappel
des exploits produisent la joie et l’honneur chez les chanteurs
particulièrement.
2. L’univers syntaxique des chants
Il faut y distinguer la phrase et le mot :
2.1. La phrase
Comme dans le cas général, la phrase dans les chants de la flagellation peut
être simple ou complexe.
2.1.1. La phrase simple
Elle comprend principalement un sujet et un verbe. Elle donne une
proposition indépendante, un verset minimal complet. Son utilisation manifeste
un besoin de déclaration, d’ information ou d’annonce parfois parallèle au
contenu des autres versets qui l’encadrent. On en a pour preuve :
KPA1 : kεsεɣa kε tι kɔma Nous sommes venus pour les salutations(V2)
KHO1 : Pə tapa ta pənaγa Notre année est arrivée (V3)
Elle peut prendre d’autres types ou formes de phrase pour exprimer une
idée particulière. A titre d’exemple, on a :
-La forme nominale ou phrase elliptique du verbe. Elle permet d’être
laconique et peut donner un caractère proverbial au plan sémantique. C’est le
cas des versets :
KRE1 : Nɔɔnɔ ιsɔ sεεla Les adorateurs actuels de Dieu (V2)
KFE1 : Antulinya ιnε ι taa Dans ce bas monde (V33)
La forme interrogative : elle assure un maintien de contact du chanteur
avec l’allocutaire. De même, elle lui sert d’un argument implicite ou lui
permet d’inciter l’auditeur à la réflexion. En voici un exemple :
KFE1 : Yɔtɔƞ kε pʋƞ na La coépoue est-elle une bête ? (V4)
KRE2 : Na mɩ ɩ kιsιɣι mapʋ tɔ Et pourquoi vous y renoncez ? (V11)
77
La forme impérative : les chanteurs l’utilisent pour encourager une
situation, pour maintenir aussi le contact mais aussi pour donner des ordres
ou inviter à un acte. L’exemple récurrent est :
KFE2 : ι nιι mə ceewa Ecoutez moi le message (V1)
La forme exclamative : c’est à travers elle que les états d’âme et les
émotions sont exprimés. Le chant KRE1 en porte beaucoup d’illustations
parmi lesquelles on trouve le verset : Hei ιsɔ sεεla, c’est-à-dire : Attention
les adorateurs de Dieu.
2.1.2. La phrase complexe
Elle contient plusieurs verbes conjugués et s’ouvre à plusieurs
subordonnées : la relative, la complétive, la conditionnelle, les circonstancielle de
temps, d’opposition ou de concession… Quelques exemples sont :
La causale : KFA1 : Pətɔɔ kε ma yɔɔlʋɣʋ kʋyɔɔlʋ C’est pourquoi je
suis capricieux (V19).
La relative : KFE2 : Nya kpe na C’est toi qui rentreras (V2)
La complétive : KFE1 : ƞ tɔmaa pa kυn yaγa yɔtɔƞ Tu as demandé qu’on
te tue la coépouse (V2).
La diversité des propositions subordonnées dans les chants signifie les
différents moyens syntaxiques que nécessitent les situations pour une régulation.
Pour mieux comprendre cette explication, voici quelques exemples du corpus.
Dans le KFE2, tout en pensant catégorique face à la femme qui refuse de
coépouse, le chanteur, selon ses dires dans ce chant, n’a vraiment pas envie de
renvoyer cette dernière. Pour mieux jouer le tour et éviter d’aller à l’acte toute
suite, une condition s’avère nécessaire. C’est son application qui a donné lieu à la
conditionnelle devenue prédominante dans le chant par la force de la répétition.
Une raison semblable justifie l’abondance de la subordonnée complétive dans le
KFE1. Ces jeux à l’intérieur du verset passent d’abord par le mot.
2.2. Le mot
Le mot prend différentes natures et son rôle n’est pas toujours le même
selon qu’il est un nom, un pronom, un adjectif qualificatif, un verbe, un adverbe
ou une interjection dans un chant de flagellation lokpa.
78
2.2.1. Le nom
Il est propre ou commun, simple ou composé.
Dans un chant, le nom propre permet au chanteur de nommer et de
préciser l’allocutaire principal à un moment donné de son discours. C’est dans ce
contexte que sont cités les noms : Adinath, alima (KFE3), Bénoit, Dogo (KHO1),
Abel (KPO1), Karim et Itagnitom dans le (KPA1). Le nom propre sert aussi à
préciser aux auditeurs spectateurs l’identité nominal du chanteur lui-même. Tel
est l’illustration que founissent les noms : Gado du KPA1, Abou du KSO1, etc. De
même, ces noms propres permettent de reconnaître l’identité religieuse voire les
origines de leurs propriétaires. S’agissant des noms propres de lieux, ils situent
les auditeurs par rapport à la provenance des locuteurs. Ce sont : Badjoudè,
Ouaké, Tchalinga , Wakitè, Awanla, Gaouga, etc.
Quant aux noms communs, ils servent premièrement à recueillir des
informations relatives à la profession, au mérite d’un personnage ou du
chanteur. Dans le corpus, on retrouve : Alpha, Pasteurs, Abbés (KRE1) ; « le
phénomène », surnom du chanteur du KSO1, verset 21. Deuxièment, ils
permettent aux improvisateurs de traiter les personnages de façon méliorative
ou péjorative. C’est l’exemple des noms « chienne, putain, la dangereuse »
attribués aux mésaventuriers dans les KHO1 et KFE3. Pour finir, les noms
communs permettent de prendre au besoin un peu de distance avec son
allocutaire principal. Ils renseignent par ailleurs, sur le rang social ou le stade
des personnages. Les noms illustratifs dans ce cadre sont : Wulau, Alʋ, Pεεlaa,
Atantʋ, Kɔntɔ, ιsakpa, etc.
2.2.2. Le pronom
Des différents pronoms de la langue française, les pronoms personnels
sont essentiellement utilisés dans les chants de la flagellation à des fins
esthétiques. Ils se répartissent selon leurs emplois en des déitiques et des
représentants41.
41 Frédéric CALAS et Dominique Rita CHARBONNEAU , Op. Cit, P.35.
79
Les déitiques sont des pronoms personnels qui ne prennent leur sens que
dans la situation d’énonciation dans la relation qui s’établit entre un locuteur (Je,
Nous) et un allocutaire (Tu, Vous) dans un lieu et un moment communs. Dans
notre corpus, les déitiques du locuteur sont : ma, mɔ, tι et ceux de l’allocutaire
sont : ƞ, nya et mε. Dans le chant KHO1 par exemple, le verset 47 porte un
pronom déitique allocutaire :
ι yaa ɩ na ɩ kɔᴐ Appelez-le et qu’il vienne.
Le premier pronom de ce verset est à la deuxième personne du pluriel. Il
renvoie dans le contexte aux auditeurs-spectateurs à qui le chanteur demande
de lui appeler le fainéant avanturier désigné par les seconds pronoms dans le
même verset. Par contre, dans le KFE1, le pronom « mɔ » dans le verset « Mɔ
pɔɔsaƞ yɔtɔƞ kε pυƞ na » désigne le locuteur qui est ici le chanteur. L’utilisation
du pronom déitique permet d’une part au locuteur de demeurer inconnu des
auditeurs jusqu’à la fin du chant. L’importance de l’utilisation de ce type de
pronom se note plus lorsque l’on sait que la quète des défis mystiques ne sont
pas rares à l’occasion de ces chants.
Pour ce qui est du pronom représentant, son usage, moins important, est lié
à des fins cataphorique ou anaphorique. Le chanteur du KFE2 y a fait une
illustration impotante.
2.2.3. L’adjectif qualificatif
L’usage de l’adjectif qualificatif se retrouve beacoup plus dans les chants
phobiques de flagellation. Il se charge alors des descriptions relatives à la qualité
physique du corps, à la qualité morale ou comportementale des victimes de la
phobie du chanteur. On peut citer les mots comme : seece, macaaci, kυpaγalυ,
piyaya ; tooko dans les KHO1 et KFE3.
2.2.4. Le verbe
Les chants de la flagellation utilisent les verbes de différentes sortes selon
le besoin. Les verbes d’actions : lʋlʋγʋ (naitre), lɩɩʋ (sortir), kɔntε (venir), tεεʋ
(partir), sənaʋ (aider), cɔɔʋ (se promener), caaʋ (chercher), kpente (rentrer),
sεεt etc. Les verbes d’état et de perception : caɣaʋ (rester), kεʋ (être), nɩɩʋ
80
(entendre), nəγəsənaʋ (ressembler), nyɩnʋɣʋ (regarder)…Ils sont utilisés pour la
description mais sont aussi utilisés pour ridiculiser l’incriminé ou louer le juste à
l’aide des comparaisons et des métaphores. Les verbes de déclaration : yɔγɔtʋɣʋ
(dire, parler), yaaʋ (appeler), heeluɣu (dire)… Avec les verbes de déclaration les
chanteurs traduisent ou rapportent les propos. Ils permettent de lancer des défis
aux adversaires ou d’inviter à accomplir un acte.
2.2.5. L’adverbe
Les adverbes sont utilisés pour des besoins particuliers :
une précision de la période, du temps, de l’époque amène à observer les
adverbes de temps tels que : nɔɔnɔ (maintenant), kayana (actuellement),
lɔƞtaa (dans l’ancien temps), pəntɔ (cette année), tootɔ (avant), etc.
les besoins d’amplification, d’intensification conduisant à l’emploi des
adverbes de quantité et d’intensité : tɔɔυ (beaucoup), kpem (trop, très).
Les adverbes : mpʋ (ainsi), ɩsɩɩ (comme), permettent de manifester les
besoins d’égalité, de ressemblance. Ils sont beaucoup utilisés dans les séquences
descriptives pour faire des comparaisons. L’exemple est dans les versets 32,35
et 44 du KHO1.
3. Les techniques d’expression
3.1. Les figures de sens ou tropes
Le terme trope désigne en rhétorique les figures de sens qui utilisent les
signifiés des mots en les « détournant » de leur sens premier. Les tropes sont :
la métaphore, la métonymie et la synecdoque. Au niveau de la flagellation, les
chanteurs font usage des tropes surtout des deux premiers sus cités.
3.1.1. La métaphore
C’est une figure microstructurale qui, par une transposition de sens permet
de rapprocher des éléments par association d’idées. C’est par la métaphore que
la plupart des chanteurs touchent les auditeurs qui peuvent promptement réagir
à leurs propos soit par des cris ou des slogans soit par des acclamations ou
encore à travers des jurons pour traduire l’état d’âme péjoratif né en ce moment
précis chez l’auditeur. Revenant au répertoire, un exemple est à chercher dans le
KFE1 avec l’interrogation « La coépouse est- elle une bête ? ». Cette
81
interrogation métaphorique résume toutes les questions que l’on pourrait poser
à la jalouse pour souligner l’immaturité de sa décision de tuer la coépouse. Au
verset 76 du KRE1, l’on lit : « Maɣalԑ tᴐtᴐlʋ » traduit comme « C’est moi le
chasseur » alors que le verset précédent signifiait « ɩ náá ttl pàà fέί », c’est-
à-dire : vous savez que le chasseur n’a pas peur. Cette comparaison sans terme
comparatif est un transfert de la puissance du comparé « chasseur » vers le
comparant « chanteur ». Dans les chants KHO1 et KFE3, l’injure « chienne
géante » constitue une métaphore qui met en rapport l’attitude de la victime
avec celle du chien.
3.1.2. La métonymie
C’est un glissement de sens. Elle désigne un objet par le nom d’un autre
objet autonome, les deux entretenant un lien de voisinage. Ainsi, on nomme la
cause pour l’effet, le contenant pour le contenu, l’abstrait pour le concret, la
partie pour le tout et vice versa.
Dans les chants de Kamʋyʋ, cette figure est en usage pour des fins
similaires à celles de la métaphore. A l’intérieur du chant KFE2 par exemple, le
chanteur, pour donner plus de sens à l’expression a préféré dire : « Tu as dit que
tu n’aimes pas deux » à « Tu n’aimes pas la coépouse ». Ce glissement du mot
coépouse (yᴐtᴐη) au mot deux (naalԑ) ici, prête à une confusion qui généralise
l’effet d’intolérance de la jalouse envers tout autre personne. Au verset 41 du
KPA1, on lit : « Yʋlʋ ɩsәlԑ ɩ ɩ tᴐkɩ ma » traduisant « L’œil de l’Homme ne me tue
pas ». Cette métonymie de la partie (l’œil) pour le tout (l’Homme) fait allusion à
la force mystique appelé kәnaaʋ, souvent jetée comme sort au chanteur à
travers l’œil. Dans le KFE2, la métonymie se lit dans le verset « L’odeur de la
pommade n’est pas une beauté ».Le nom « odeur » est mis pour la pommade
qui concrètement participe à la beauté du corps. Au niveau du KRE1, c’est le
titre « Ataakpi » qui, servant de métonymie traduit par parallélisme de
signification la violence de l’acte d’attaque du sorcier selon le contexte. Aussi,
les noms alphas, abbés, pasteurs sont une métonymie qui prend les membres
pour le corps afin de ternir l’image de ces religions modernes. Dans le KFE3, les
versets 32 et 33 sont constitués d’onomatopées qui respectivement sont : Mεεsε
mεεsε wε Cááwύ cááwύ wε. Cette construction onomatopéique est aussi
82
doublée d’une métonymie qui traduit toujours par le même parallélisme, la
démarche de la fille victime des critiques du chanteur.
3.2. Les figures de pensée
Elles transgressent la relation entre le concept et le référent d’un point de
vue logique et permettent de dire autrement. On peut à travers elles opérer un
déplacement de sens, modifier l’expression, mettre en valeur ou cacher quelque
chose. Les figures de pensée sont nombreuses. Il s’agitde parler de
lacomparaison, l’apostrophe, l’exclamation, l’interrogation, l’antiphrase et
l’hyperbole.
3.2.1. La comparaison
Elle consiste à rapprocher à l’aide d’un terme comparatif deux éléments
afin de ressortir un point de ressemblance ou de dissemblance. Dans les chants
de Kamʋyʋ, la comparaison est fréquemment utilisée pour soit faire vite
comprendre l’idée exprimée, soit la rendre plus concrète ou encore pour y mêler
le ridicule.
Au niveau du répertoire, une comparaison des époques est à noter dans le
KRE1 notamment avec les versets 30 à 35 dont les deux pôles sont
respectivement traduits comme : « Le temps de nos parents » (…) et « Mais
aujourd’hui ». En effet, elle distingue la qualité de vie des temps anciens à celle
des temps modernes pour mieux faire comprendre la complicité autour du mal de
l’anémie dans les sociétés actuelles. Dans le chant KHO1, les versets 41, 42, 43
et 44 constituent une autre comparaison. Voici ce que disent ces versets :
-Ye ɩ kʋla tᴐηtԑ -Quand il commence à marcher
- Na η nyɩnɩ ɩ tәnaɣa -Et tu observes sa hanche
-η tᴐη sɩ awe -Tu diras quoi
-antʋʋlԑԑ ɩsɩɩ kakpalaηa pulaɣa -Direct comme la montée de Kakpalanga
Il s’agit d’une injure dans laquelle la comparaison mêle le comique tout en
restant concret à travers cette montée que la majorité des spectateurs lokpa
peut connaitre. De même dans le chant KFE3, l’insulte adressée à la paresseuse
en état de grossesse laisse entendre aux versets 18 et 19 représentés par :
« Les yeux sales comme »
« L’insecte des saisons pluvieuses »
83
Cette comparaison contrairement à la précédente ne fait aucunement rire
puisque l’insulte est ontotypique essentialiste (José Watunda Kangandio, op.cit.
291) le comparé qu’est « l’insecte » (awiilu) est inconnu du grand nombre mais
peut énerver davantage la victime selon qu’elle connaisse ou non cet animal.
Après la comparaison, l’apostrophe sert aussi les chanteurs de la flagellation
lokpa.
3.2.2. L’apostrophe
Elle consiste à mentionner l’allocutaire dans le discours. Dans les chants de
Kamʋyʋ, l’apostrophe fonctionne en des interpellations. C’est le cas par exemple
au verset 19 du KFE1 : « T yóntisilá mέ », c’est-à-dire « Vous le chœur ». Il
s’agit d’une interpellation du chœur qui sert de pathos42 pour chercher
l’implication complète de celui-ci dans son message au chanteur. Plus loin le
verset 35 dit : Páápà ŋ nίίwàà signifiant « Papa as-tu entendu ? ». L’objectif est
de maintenir le contact avec l’allocutaire nominé (Papa) ou non nominé comme
c’est le cas de l’utilisation de la deuxième personne du singulier dans le chant
KFE2. Par ailleurs, l’interpellation vise aussi une exhortation. Le chanteur cherche
à amener les auditeurs à réaliser une action. C’est cette intention que justifie
dans les versets 2 et 5 livrés respectivement dans le KSO1 comme suit :
-Awanla ɩfepiya mԑ Jeunes d’Awanla
-Wake ɩcatԑ tɩ sәna tәma Populations de Ouaké, entraidons-nous
3.2.3. L’exclamation
Elle est l’expression de l’état d’âme de quelqu’un face à un fait heureux
ou malheureux. Au niveau de Kamʋyʋ, les chanteurs traduisent leurs sentiments
à travers des exclamations diverses, des interjections, des onomatopées ou
encore par d’autres propos capables de traduire un état d’âme. Dans ce
contexte, l’on peut constater une modification dans la structure du discours en
l’occurrence du chanteur. A titre de preuves, la description plus profonde de la
malice des femmes jalouses dans le KFE1 émane d’une inquiétude du chanteur
qui imagine à la manière de l’expérimenté, les conséquences possibles que peut
entrainer la décision grave d’attenter à la vie humaine. Ce même cri se note
42 Ruth AMOSSY, Images de soi, la construction de l’éthos et identité verbale, PUF, Paris, 2010, compte rendu de lecture d’EQUOY HUTIN Sévérine.
84
dans les détails sur le fonctionnement de la sorcellerie des hommes de Dieu dans
le chant KRE1. Le chanteur s’exclame aux versets 92 et 93 :
Héi atakpi -Attention sorcier !
Héi ίs sέέla, -Attention les adorateurs de Dieu !
Ces exclamations traduisent non seulement l’étonnement du chanteur quant
aux agissements des sorciers mais aussi la crainte, la peur quant aux
conséquences subséquentes sur la population. Cependant, ce caractère effrayant
des actes n’existe pas que chez le sorcier, on le souligne aussi chez les jeunes
tels que l’exclame le chanteur au verset 24 du KFE3 traduit comme : « C’est la
dangereuse ! ». Toujours dans ce chant, l’emploi des interjections
onomatopéiques qui traduisent aussi plusieurs sentiments dont la colère, la
désapprobation. du comportement de la jeune fille. Telle l’exclamation,
l’interrogation est d’usage dans les chants de flagellation lokpa.
3.2.4. L’interrogation
85
auditeurs. Dans ce cas, l’interrogation présente dans le chant KRE1 sert
d’exemple. Elle est doublement posée aux versets 37 et 40 qui suivent :
-Leɣelԑpәlɩnaa na saŋa se calәm fԑ ɩ D’où sort aujourd’hui l’anémie ?
- ɩlԑ ɩsәmaγalԑ pә lapa Mais comment se fait-il ?
Comme on peut le voir, donner une réponse exacte ou précise reste moins
aisée face à ces deux interrogations. Et justement, c’est cette difficulté à
répondre qui fait obtenir l’approbation de l’auditeur présent qui reliera aussi le
mal au monde mystique comme le veut le chanteur.
3.2.5. L’hyperbole
Elle est une exagération qui touche aussi bien la syntaxe que le lexique.
En d’autres termes, c’est une excessive augmentation sémantique qui consiste à
mettre en valeur un acte ou un fait. Ce procédé est aussi d’usage dans les
chants de flagellation.
A titre d’illustration, on peut citer le cas du chanteur qui, dans l’intention de
montrer le négatif au niveau des femmes modernes dans le KFE1, apprécie avec
exagération l’harmonie et la convivialité qui régnaient entre les anciennes
femmes dans le foyer. Les versets 43 et 44 disent à ce propos :
- Pʋcᴐ η nɩɩ « A » fa -Pourtant tu n’entends point « A »
- ԑlԑ η nɩɩ ɩ « I » fa -Aussi tu n’entends point « I »
Les lettres A et I représentent le bruit. Mais, l’emploi du morphème de
négation « point (fa) » suppose l’absence totale de disputes dans la vie des
coépouses de l’ancien temps. Et c’est là l’hyperbole qui traduit l’admiration de
l’attitude de ces femmes par l’improvisateur. En revenant au chant KPA1, on
peut noter une hyperbole dans le processus de glorification du père par le
chanteur. En effet, il parle de la première rencontre amoureuse de son père avec
sa mère aux versets 27, 28 et 29 :
ɩ kᴐma ɩ na ɩ ɩlԑ -Quand il le vit
ɩ tԑԑkɩ pɩɩ tԑԑ -Il partit en vain
ɩ caη na ɩ saa ɩ -Il se résolut à le marier
Le pronom « il » en se référant aux versets précédents est mis pour
« saapʋ » c’est-à-dire « le fait » qui à son tour représente la maman du
86
chanteur, amante de son père. Selon ces versets précédents, c’est l’habillement
en costume ou l’élégance du père qui a séduit la mère, fille d’alors qui n’a eu de
choix que de se marier au jeune devenu père du chanteur. L’hyperbole ici trouve
son existence dans la considération du fait de séduction et surtout dans
l’immédiateté de l’acte de décision du mariage par la fille. Mais l’on peut
comprendre lorsque ce dernier reconnait que le chanteur est dans une
glorification parentale.
Pour conclure ce chapitre, il faut retenir que les chants de flagellation lokpa
ont un style à la fois laudatif et phobique. Il est construit sur l’usage des
éléments grammaticaux et syntaxiques que l’on doit savoir décoder. De même
les figures de styles ou de rhétoriques sont beaucoup exploitées. Parmi elles,
celles de sens et de pensée sont particulièrement très dominantes.
Conclusion
Ce travail a permis de mieux comprendre le rite le plus aimé des populations
lokpa, Kamʋyʋ. Une pratique initiatique dont les origines sont liées à l’histoire et
à la vie de ce peuple. Il lui est très indispensable car il est le rite qui forme pour
l’intégration social des plus jeunes. Son organisation prouve combien le Lokpa a
compris que le désordre peut prendre le pas sur l’ordre si aucune précaution
n’est prise pour canaliser et guider les ignorants que sont les enfants. Kamʋyʋ
ou le rite de flagellation est le système installé par les ancêtres pour établir
l’ordre entre les enfants eux-mêmes et entre ces enfants et les adultes : c’est le
principe du respect de la hiérarchie et du mérite, mais aussi celui de l’amour de
chez soi. C’est donc un processus par lequel la communauté suit l’individu du
87
bas-âges à l’étape mature d’une part, mais d’autre part, c’est une fête puisque
entourée de manger, de boire, puis fait de danse et de chants. La danse de la
flagellation lokpa n’est pas gratuite. Elle mesure la force, la vivacité et la capacité
de résistance à la fatigue de chaque danseur selon son âge et sa posture. C’est
une formation « militaire ».
La préoccupation première de cette recherche était de faire une étude de la
forme et du style des chants de ce rite. L’on est donc allé collecter des
informations et recueillir des chants sur le terrain, puis les a soumis à un
traitment. Pour réaliser un travail scientifique, on s’est appuyé sur des objectifs
et des hypothèses et on a choisi six méthodes de traitement des textes. De ces
outils d’analyse, l’on a fait une typologie des chants du répertoire, une étude de
la thématique et puis une étude du style des chants.
De la typologie des textes, il est à retenir que les chants de flagellation
lokpa fonctionnent sur un rythme propre appelé Kamʋγʋ. Ils sont modernes et
abordent l’Homme en général mais aussi des sujets relatifs aux affaires sociales,
morales, religieuses et à la gestion du pouvoir. Ce sont des chants de critique
sociale. Sur le plan des entrées, les chants de flagellation adoptent l’entrée
indirecte et privilégient les types pronominal, impératif, déclaratif, exclamatif et
interrogatif. Leur énonciation répond au mode responsoriel et restent des chants
longs de par la structure profonde. Ils possèdent deux intentions littéraires
majeures : l’intention poétique et l’intention didactique. L’analyse de la
thématique révèle que les chants abordent des thèmes divers mais ces thèmes
sont traités comme des motifs pour aboutir à un thème majeur vu comme
l’objectif final : c’est l’éducation. Elle s’y retrouve dans tous ses aspects :
physique, intellectuel, social et civique, morale et puis religieux. De l’étude du
style, il faut retenir que les chants de flagellation lokpa ont un style à la fois
laudatif et phobique. Sa marque de littérarité repose suffisamment sur une
grammaire spécifique, sur les tropes et sur les figures de pensée.
Il ressort donc que les chants de kamƲɣƲ sont des productions littéraires et
la thématique concourt à l’éducation.
Cependant, il est à souligner, relativement aux obstacles rencontrés sur le
terrain, un certain nombre nécessités. En effet, il urge de prendre des
précautions relatives à la conservation des chants de Kamʋyʋ sur une durée plus
88
longue en vue de contrôler l’évolution du contenu des chants à travers les
générations. Du côté organisationnel, il va falloir éviter que la politique influence
négativement voire dénature la valeur intrinsèque de Kamʋyʋ, car cela est à la
base d’une tendance matérialiste à l’occasion de la production des chants qui,
non seulement complique la récupération des chants mais peut négativement en
modifier la thématique.
Toutefois, il est à reconnaitre que le rite Kamʋyʋ et ses chants constituent
une véritable institution traditionnelle de mobilisation, de formation, de
distraction, de disciline, de contrôle de la couche juvénile et de la liberté
d’expression. Il n’y a point de doute que des recherches plus poussées sur ce rite
ou d’autres révèlent des résultats plus utiles et étonnants. C’est pourquoi nous y
pensons et souhaitons q’une chance nous soit donnée à la fin de ce travail.
Bibliographie
1. Sources orales
Nous avons consulté plusieurs personnes ressources mais nous présentons
ici les plus importants du point de vue des informations fournies. Ce sont :
-ABALOUNOROU Daniel, enseignant à la retraite, Sage local, Badjoudè, 82 ans.
-ABALLO Soulémane, élève, initié en phase final, Talinta/Badjoudè, 20 ans.
-AMOS Abel, journaliste, Djougou, 47ans.
-ASSIGNETOU Aya, cultivateur, tam-tameur, Biguina III, 53ans environ.
-ATTI Boukari, guérisseur traditionnel, Koiwali, 42 environ.
-BINDA ADAM Ibrahim, élève, chanteur de la flagellation, Gaounga, 23 ans.
89
-BOUSSOULOUFEYE Salifou, cultivateur, Badjoudè Talinta, 55 ans.
-MAKOULOUWE ALASSANE Safiou, guérisseur traditionnel, Biguina I, 45 ans.
-MOUSSA Amadou, cultivateur, conseiller au palais, Aoro, 50 ans.
-SOSSAFEY Barthélémy, pasteur à la retraite, sage local, Gaounga, 101 ans.
-TCHAO Ali Bernard, directeur d’école à la retraite, Djougou, plus de 75 ans.
-YAYA Fouléra, ménagère, chef de groupement de femmes, Biguina III, 48 ans. -
YOLOU Félicien, chef culturel, Badjoudè Wodè, plus de 70 ans.
2. Sources écrites
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Silex, 1984.
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1975.
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De Bock, 2005.
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2001.
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pédagogie appliquée, Les Classiques africains, 1993, nouvelle édition.
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HOUNGNIHIN (Estella Clotilde), La forme et le style de la chanson d’EZIN
GANGNON : Pour une image plurielle de l’Homme, mémoire de maitrise,
DLM/FLASH/UAC, 2013, inédit.
MADINDE (Akouessi J.Sourou), Les chansons auto-laudatives dans l’œuvre
de GBEZE : Forme et style, mémoire de maitrise, DLM/FLASH/UAC, 2014,
inédit.
MEDEHOUEGNON (Pierre), Le théâtre francophone de l’Afrique de l’ouest:
Des origines à nos jours, CAAREC Editions, Cotonou, 2010.
SOLITOKE (Essoham), L’interaction du pouvoir centralisé en pays Lama :
le cas des LOGBA du XVIIè au XXè siècle, mémoire de maitrise, Histoire,
FLESH/ UK (Togo), 2007.
YOLOU BAMISSO (Alsèkè Yessoufou), Sens et puissance du rite kamʋɣʋ chez
les Lokpa, mémoire de maitrise, SA/FLASH/UAC, 2006.
2.6. Articles et contributions diverses
BARTHE (Rolland), « Introduction à l’analyse structurale des récits » in
Communication 8, Paris, Seuil, 1981, pp. 7-33.
92
BOGNIAHO (Ascension), « Littérature orale au Bénin : essai de classification
endogène des types de paroles littéraires » in Ethiopiques, nouvelle série, vol 4,
Dakar, n°3-4 des 3è et 4è trimestre 1987.
« La créativité en littérature orale », in La Plume, n°3
du 2è semestre, 1987.
« A la découverte de la chanson populaire au Bénin »,
in Itinéraires et contacts de cultures, Paris, L’Harmattan, Vol. 8, 1988.
« Littérature orale et
développement », Littératures, arts et société, Cotonou, Editions Les
Flamboyants, 1999.
« Méthodologie de la recherche en littérature orale »,
in Voix et voies nouvelles de la littérature Béninoise, Cotonou, Les Editions
des Diasporas, 2012.
Collectif, Littérature de Côte D’Ivoire : la mémoire et les mots, N°86,
Janvier-Mars, 1987.
Collectif, Graines de paroles : puissance du verbe et traditions orales,
C.N.S.R, Paris, 1989.
DERIVE (Jean) et DERIVE (M. J.) « Processus de création et valeur d’emploi des
insultes en français populaire de Cote d’Ivoire », in Langue 144 française,
revue trimestrielle, décembre 2004, Paris, Larousse, PP. 4-10.
EQUOY HUTIN (Sévérine), « Compte rendu de lecture de l’ouvrage de Ruth
AMOSSY : Image de soi dans le discours, la construction de l’éthos »,
Lausanne, Delachaux et Niestlé, 1999, découvert sur google le 23/02/15 à11h.
HOUNKPE (Adjignon Débora Gladys), « L’éducation dans les couvents vodous au
Bénin », in L’éducation en débats : analyse comparée, Vol. 5, découvert sur
google les 16 et 17 août 2016 respectivement à 14h et à 8h.
KANGANDIO (José Watunda), « Les insultes dans La fin tragique de Philomène
TRALALA De Fouad LAROUI » in Littératures africaines : Langues et
écritures, Cotonou, Les Editions des Diasporas, 2011, PP.287-3O2.
93
NTETE NKATU MUKOKO (Gérard), « Lecture thématique de psaumes sur le fleuve
zaire de Z. Batukezanga », in Littératures africaines : Langues et écritures,
Cotonou, Les Editions des Diasporas, 2011, PP. 121-134.
SALOMON (Reinach), « La flagellation rituelle », in Cultes, mythes, religion,
Paris, Edition Ernest LEROUX, 1905, PP. 173-183.
SCHAEFFER (Jean Marie), « Eduquer » in Communications 72, 2002.
SMITH (Pierre), ‘’Rite’’, in Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie,
Paris, PUF, 1991.
YEBOU (Raphaèl), « Constructions syntaxiques et représentations langagières
chez Paul Hazoumè », in Repères pour comprendre la littérature béninoise,
Cotonou, CAAREC éditions, 2008, PP.113-134.
« Créativité, représentations langagières et identité culturelle
dans le roman béninois », in Littératures africaines : Langues et écritures,
Les Editions des Diasporas, Cotonou, 2011, PP. 249- 268.
2.7. Dictionnaires et encyclopédies
RENE (Bailly), Dictionnaire des synonymes de la langue française, Paris,
Librairie Larousse, 1947.
-Le dictionnaire universel, 5è édition.
-Le petit Larousse, Grand format, édition 2004.
-Dictionnaire Hachette encyclopédique, édition 2000.
2.8. Sites internet
-www.google.fr, pade consultée le 11 janvier 2017 à 6h 42 min.
-www.fr.m.Wikipedia.org, page consultée le 22 janvier 2017 à 14h 33min.
-www.mobile.Lesinrocks.com, page consultée le 26 juin 2017 à 22h 03min.
-www.cnrtl.fr, page consultée le 05 juillet 2017 à 17h 10 min.
94
Annexe
L’alphabet de la langue Lokpa
Les voyelles Les consonnes
A a a-Simples b-Diagrammes
E e C c KP kp
Ǝ Ə F f NY ny
95
La liste des abréviations utulisées dans la traduction des chants :
Adj………………………………………………………………………………………………………………….adjectif
Adv………………………………………………………………………………………………………………..adverbe
Comp…………………………………………………………………………………………………….comparaison
Conj……………………………………………………………………………………conjonction/conjonctive
Cord………………………………………………………………………………………………………Coordination
Déf……………………………………………………………………………………………………………………défini
96
Dém ………………………………………………………………………………………………….…démonstratif
Ind ……………………………………………………………………………………………………..………indéfini
Insist………………………………………………………………………………………………………….insistance
Interj………………………………………………………………………………………………………..interjection
Interr……………………………………………………………………………………………………interrogation
Intro……………………………………………………………………………………………………………introductif
Loc…………………………………………………………………………………………………………………locution
Morph………………………………………………………………………………………………………morphème
Nm……………………………………………………………………………………………………………………nom
Num…………………………………………………………………………………………………………….nominal
Ord…………………………………………………………………………………………………………………ordinal
Pass………………………………………………………………………………………………………………….passé
Pers……………………………………………………………………………………………………………personnel
Poss……………………………………………………………………………………………………………..possessif
Prép………………………………………………………………………………………………………….préposition
Qual……………………………………………………………………………………………………………qualificatif
Rel……………………………………………………………………………………………………………………..relatif
Sub………………………………………………………………………………………………………subordination
Syntag………………………………………………………………………………………………………
Syntagme
Verb……………………………………………………………………………………………………………………verbe
Ø ……………………………………………………………………………………………………………..aucun sens
CORPUS DE REFERENCE ET TRADUTIONS
KPO1 : káγánà antùlinyà Le monde d’aujourd’hui
1) káγánà antùlinyà ί féί téù, (bis) 1-Le monde actuel est mauvais
Adj qual //nm.//pr pers //syntag verb//adj qual
97
Actuel monde il ne pas bon
2) Yáá wé,… (2) 2-Ou bien ?
Conj.cord//pr interr.
Ou quoi
3) Nyé ŋtiké ŋ là wé 3-Que peux-tu faire seul ?
Pr pers / / adj qual // pr pers/ /verbe// pr.interr
Toi seul tu fais quoi
4) Yáá wé, ………….. (2) 4-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
5) Apέέlί wέ, ………(1) 5-Abel et autres
Nm // Pr pers
Abel eux
6) Yáá wé, ………….. (2) 6-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
7) Ládiyóná sɔsɔ……….(1) 7-Le chef de radio
Nm // adj qual
Radios grands
8) Yáá wé, ………….. (2) 8-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
9) Sàγá kύyàkύ kύnέ (1) 9-La journée d’aujourd’hui
Adv // nm // pr.dem
Aujourd’hui jour çi
10) Yáá wé, ………….. (2) 10-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
11) Lɔƞtáá sɔɔsί kέ,……(1) 11-Ce sont les pratiques traditionnelles
Adj qual// nm// morph.insist.
98
Anciennes traditions Ø
12) Yáá wé (2) 12-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
13) Pə tέ kἑ nɔɔnɔ sé (1) 13-Ce n’est pas de notre temps
Pr.dém //morph neg //verbe //adv //morph. insist
Ce ne pas est maitenant Ø
14) Yáá wé (2) 14-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
15) Antùlinyà ί féί téù, ………( 1) 15-Le monde est mauvais
Nm //pr.pers //morph nég.//adj qual
Monde il ne pas bon
16) Yáá wé, ………….. (2) 16-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
17) Páápà làγàsί ləmàγàsέέ … (1) 17-Papa, change le mode de penser
Nm // verbe// nm
Papa change pensées
18) Yáá wé, …………..(2) 18-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
19) Nyé kéwùláγà tááƞί,…(1) 19-Pour que ton règne dure
Adj poss // nm // verbe
Ton règne dure
20) Yáá wé, ………….. (2) 20-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi ?
21) Pààcύγύ ná ί nyύγύ tənέ (1) 21-Badjoudè dans son entièreté
Nm // conj cord //adj poss//nm//adj ind
99
Badjoudè et sa tète toute
22)Yáá wé (2) 22-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
23) Nɔɔnɔ nyáγá tί nyίmà 23-C’est toi que nous reconnaissons
Adv. // pr pers.// pr pers//verbe
Maintenant toi nous reconnaissons
24) Yáá wé (2) 24-Ou bien ?
Conj cord// pr.interr
Ou quoi
25) Yé ƞ kύlá tɔm hύw…(1) 25-Pendant le jugement
Adv//pr pers//verbe // nm// nm
Si tu commences problème jugement
26) Yáá wé (2) 26-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
27)Tύγύ tɔm lonà 27-Respecte la logique des faits
Verbe // nm // nm
Suis problème place
28) Yáá wé (2) 26-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
29) Tá hύύ sùlùwà tɔm,…(1) 27-Ne juge pas selon la situation de l’orphelin
Loc adv//verbe // nm// nm
Ne pas juge orphelins problème
30) Ápáláá mέ (2) 30-Chers amis !
Nm //pr pers
Amis vous
31) Tá hύ kύnyɔƞtύnàà tɔm,…(1) 31-Ne juge pas selon la situation des pauvres
Loc adv//verbe //nm // nm
100
Ne pas juge pauvres problème
32) Yáá wé ….. (2) 32-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
33) Mà cáá páápà ίnέ,…(1) 33-Mon cher papa !
Adj poss//nm //nm//pr dém
Mon père papa çi
34) Yáá wé (2) 34-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
35) Káγánà antùlinyà,…(1) 35-Le monde actuel
Adj qual // nm
Actuel monde
36) Yáá wé (2) 36-Ou bien
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
37) Yé ƞ wέyίláá táá,…(1) 37-Quand tu es en public
Adv//pr pers//verbe // nm //adv
Si tu es gens dedans
38) έέh 38-Einh
Interj.
Ø
-Einh
39) Nyέ fέέlέ ί tɔɔwà…(1) 39-Et tu as trop de crainte
Adj poss//nm//pr pers//adj qual
Ta honte elle grande
40) Yáá wé (2) 40-Ou bien ?
Conj cord // pr.interr
Ou quoi
41) Nà ƞ kàƞ nyá nyύγύ kέ támmə (1) 41-Et tu évites de fixer les gens
101
Conjcord//prpers//verbe//adj poss//nm.//morph insist.//adv
Et tu baisses ta tète Ø toujours
42) Yáá wé (2). 42-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
43) Nà ƞ tələkύγύ nyέ ίsέ 43-Et tu tritures les yeux
Conj cord//pr pers//verbe// adj poss//nm…(1)
44) Yáá wé (2).
Conj cord// pr interr
Ou quoi
45) Lálàà cákί ƞ kpàγànύ,…(1) 45-Les gens te prendrons pour cheval
Pr ind. // verbe //pr pers //nm
D’autres roulent te cheval
46) Yáá wé….. (2) 46-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
47) Nɔɔnɔ ƞ lápà kύpáγálὑ…(1) 47-Tu es grand
Adv // pr pers//verbe //adj qual
Maintenant tu fait grand
48) Yáá wé………….. (2) 48-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
49) Nyá tááləm ί tɔɔwà…(1) 49-Si tes ridiculités sont considérables
Adj poss// nm//pr pers//adv
Tes ridicultés elles abondantes
50) Yáá wé…….. (2). 50-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
51) ŋpiù kà táá ŋ tɔləmà (1) 51-La souris te colorera de cendre
Nm//morph futur//verbe // pr pers//nm
102
52) Yáá wé ………….. (2). 52-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
53) Súúlù tà wίί pύlύ sé(1) 53-La patience peut tout
Nm//loc adv//verbe //pr ind//morph insist
Patience ne pas rate quelque chose Ø
54) Yáá wé…….. (2). 54-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
55) Káγánà antúlinyà,…(1) 55-Le monde actuel
Adj qual // nm
Actuel monde
56) ί fέί téù,…(2) 56-Il est mauvais
Pr pers//morph nég// adj qual
Il ne pas bon
57) Yé ŋ nyəná káγánà antúlinyà(1) 57-Si tu observes le monde actuel
Adv//pr pers// verbe//adj qual//nm
Si tu regardes actuel monde
58) Yáá wé…….. (2). 58-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
59) Mà càà páápà ίnέ,…(1) 59-Mon cher papa !
Adj poss//nm// nm // pr dém
Mon père papa çi
60) Yáá wé…….. (2). 60-Ou bien ?
Conj cord // pr interr
Ou quoi
NB : chaque vers est suivi de deux voix alternées du chœur qui sont :
1)káγánà antùlinyà ί féί téù (1) 1-Le monde actuel est mauvais.
103
2) Káγánà antùlinyà,…(2) 2-Le monde actuel
KFEN°1 : Pá láá ŋ yɔtɔŋ Qu’on t’immole la coépouse !
Pr pers //verbe//pr pers//nm
On immole toi coépouse
1) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 1-Tu veux l’immolation dela coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
2) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ… 2-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
3) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 3-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers.//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
4) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná… 4-La coépouse est-elle une bête
Nm// verbe//nm//morph interr
Coépouse est bête Ø
5) Mɔ pɔɔsá ŋ yɔtɔŋ kέ pύŋ ná… 5-Je te demande : la coépouse est-elle une bête
Prpers//verbe//prpers//nm//verbe//nm//morph interr.
Je ai demandé te coépouse est bête Ø
6) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná… (Bis) 6-La coépouse est-elle une bête
Nm //verbe //nm//morph interr
Coépouse est bête Ø
7) Mɔ pɔɔsá ŋ yɔtɔŋ kέ pύŋ ná… 7-Je te demande : la coépouse est-elle une bête ?
Prpers//verbe//pr pers//nm//verbe//nm//morph interr
Je ai demandé te coépouse est bête Ø
8) Ná ŋ cáákί sé pá láá ί… 8-Et tu veux qu’on l’immole
Conj cord//pr pers//verbe//conj sub//pr ind//verbe//pr pers
Et tu veux que on immole la
104
9) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 9-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers. //verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
10) ŋ nyίίlá pá lááŋ ί … 10-Tu as envie qu’on te l’immole
Pr pers/syntag verb//pr ind//verbe//prpers//pr pers
Tu as envie on immole toi la
11) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ (Bis) 11-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
12) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 12-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
13) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná… 13-La coépouse est-elle une bête ?
Nm //verbe //nm.//morph interr.
Coépouse est bête Ø
14) Mɔ pɔɔsá ŋ yɔtɔŋ kέ pύŋ ná (bis) 14-Je te demande : la coépouse est-elle une bête
Prpers//verbe//pr pers//nm//verbe//nm//morph interr.
Je ai demandé te coépouse est bête Ø
15) Kὐfàlàŋ àláá mέ… 15-Femmes de modernité
Adj qual// nm //pr pers
Modernes femmes vous
16) Antúlinyà ίnέί táá… 16-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//pr pers//adv.
Monde celui-ci son dedans
17) Mɔ pɔɔsá ŋ yɔtɔŋ kέ pύŋ ná (bis) 17-Je te demande : la coépouse est-elle une bête ?
Prpers//verbe //pr pers//nm//verbe//nm//morph interr
Je ai demandé te coépouse est bête Ø
18) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 18-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
105
19) Tɔ yóntisilá mέ… 19-Vous le choeur
Morph intro//nm//pr pers
Ø chœur vous
20) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 20-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on immole toi coépouse
21) ŋ nyίίlá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 21-Tu as envie qu’on t’immole la coépouse
Pr pers// syntag verb//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as envie on immole toi coépouse
22) ŋ tɔmáá pá kὑnyáγá yɔtɔŋ… 22- Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
23) Pύŋ kpέέtὑ ntέέ … 23-Est-ce la bête noire ?
Nm//adj qual//morph interr.
Bête noire est-ce
24) Yáá pὑŋ hὐlὑmὑ ntέ… 24-Ou est-ce la bête blanche ?
Conjcord// nm//adj qual//morph interr.
Ou bien bête blanche est-ce
25) Yáá pὑŋ cáŋkpàlà kpém… 25-Ou encore c’est la bête pourpre ?
Conj cord//nm//adj qual//morph insist
Ou bien bête pourpre Ø
26) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 26-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//pr pers//adv
Monde celui-ci lui dedans
27) Pá láá ŋ yɔtɔŋ… 27-Qu’on t’immole la coépouse
Pr ind//verbe//pr pers//nm
On immole toi coépouse
28) ŋ nyίίlá pá láá ŋ yɔtɔŋ 28-Tu as envie qu’on t’immole la coépouse
Pr pers//syntag verb//pr ind//verbe//prpers//nm
Tu as envie on immole toi coépouse
106
29) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ 29-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue te coépouse
30) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná 30-La coépouse est-elle une bête ?
Nm//verbe//nm//morph interr
Coépouse est bête Ø
31)Mɔpɔɔsá ŋ yɔtɔŋ kέ pύŋ ná… 31-Je te demande : la coépouse est-elle une bête
Prpers//verbe//pr pers//nm//verbe//nm//morph interr
Je demandai toi coépouse est bête Ø
32) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná… 32-La coépouse est-elle une bête?
Nm// verbe// nm// morph interr.
Coépouse est bête Ø
33) Antúlinyà ίnέ ί táá… 33-Dans ce bas monde
Nm // pr dém //pr pers//adv
Monde celui-ci lui dedans
34) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 34-Tu veux l’immolaton de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu dis on immole toi coépouse
35) Páápà ŋ nίίwà à… 35-Papa as-tu entendu ?
Nm //pr pers//verbe//morph interr
Papa tu entendus Ø
36) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 36-Dans ce bas monde
Nm // pr dém //adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
37) Má kύlá tɔ má nίίwà sé… 37- Dès mon enfance j’ai appris que
Pr pers//verbe//morph insist//pr pers//verbe//conjsub
Je me levai Ø je appris que
38) Tá cááná wáátὑ… 38-Au temps de nos parents
Adj poss// nm // nm
Nos parents temps
107
39) Áláá kέ náánύwà… 39-Les femmes peuvent atteindre dix
Nm // verbe //adj num
Femmes sont dix
40) Ná pá ná mə pá páálὑ… 40-Et elles sont avec leur époux
Conj cord//pr pers//verbe//pr pers//adj.poss//nm
Et elles sont me leur époux
41) Ná pá cákί pύtɔɔ kέ… 41-Et ils vivent (ensemble) pendant longtemps
Conj cord//pr pers//verbe//adv//morph insist
Et ils restent beaucoup Ø
42) Antúlinyà ίnέ ί táá… 42-Dans ce bas monde
Nm //pr dém//adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
43) Pύcɔ ŋ nίί ι« A » fá… 43-Pourtant tu n’entends point « A »
Prép // pr pers//verbe// morph nég//A //morph insist
Malgré tu entends ne pas A Ø
44) έlέ ŋ nίί ι « I » fá … 44-Aussi tu n’entendras point « I »
Adv//pr pers//verbe//morph nég// I//morph insist.
Aussi tu entends ne pas I Ø
45) ί nίίwà kὑfáláŋ áláá tɔm… 45-Avez-vous compris l’attitude des femmes modernes
Pr pers//verbe //adj qual // nm // nm
Vous comprites modernes femmes problême
46) ί ná pέ fέίná tίntί (bis) 46- Vous voyez qu’elles manquent cela
Pr pers//verbe//pr pers//verbe//pr dém
Vous voyez elles manquent cela
47) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 47-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//pr pers//adv
Monde celui-ci son dedans
48) ŋ tɔmáá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 48-Tu veux l’immolation de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu dis on immole toi coépouse
108
49) ŋ nyίίlá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 49-Tu as envie qu’on t’immole la coépouse
Pr pers//syntagverb//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as envie on immole toi coépouse
50) Sámàà yίláá mέ… 50-Cher public
Nm // nm // pr pers
Public Hommes vous
51) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 51-Dans ce bas monde
Nm // pr dém // pr pers //adv
Monde celui-ci son dedans
52) Pá láá ŋ yɔtɔŋ… 52-Qu’on t’immole la coépouse
Pr ind//verbe//pr pers // nm
On immole toi coépouse
53)ί nίί tá fááwί ί… 53-Avez-vous écouté le message ?
Pr pers//verbe//adj poss// nm//morph interr
Vous écoutates notre message Ø ?
54) Hólúγútέ ápálὑpù 54-Garçon de(village) Holoudè
Nm // nm
Holoudè garçon
55) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 55-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//pr pers//adv
Monde celui-ci son dedans
56) ŋ náá má lápáŋ sáƞlámà 56-Je te demande de m’excuser
Pr pers//verbe //pr pers//verbe//pr pers//nm
Tu vois je fais toi excuses
57) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 57-Dans ce bas monde
Nm.// pr dém//adj ind//adv.
Monde celui-ci
58) Má càà sé mέ sέέ nyáγá 58- J’ai voulu te saluer
Pr pers//verbe //conj sub//pr pers//verbe//pr pers
Je voulu que je salue toi
109
59) Tɔ pə táγá ίsί pύlύ tɔm… 59-Ce n’est rien de grave
Morph intro//pr dém//syntag verbe//adv//pr ind//nm
Ø ce n’est pas comme chose problème
60) Nyá láŋlέ ί táá cέ… 60-Que ton cœur soit tranquille
Adj poss//nm// pr pers// adv nég//verbe
Ta poitrine elle ne pas bat
61)ŋ ná pnáγá ί cɔɔwà… 61-A chaque fin de l’année
Pr pers//verbe //nm//pr pers//verbe
Tu vois année elle circule
62) Tί cɔɔkί mί sέέtὑ kέ… 62-Nous nous promenons pour vous saluer
Pr pers// verbe//adj poss//nm//morph insist
Nous circulons vos salutations Ø
63) Pətɔɔ kέ mέ sέέ nyá… 63-C’est pouquoi je te salue
Prép // pr dém//pr pers//verbe //pr pers
A cause de ça je salue toi
64) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 64-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
65) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ… 65-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
66) Pətɔɔ kέ tί sέέkί ί … 66-C’est pouquoi nous le saluons
Prép //pr dém//pr pers//verbe//pr pers
A cause de ça nous saluons le
67) Sί ί yáálá tɔɔwà… 67-Parce que ses femmes sont nombreuses
Conj sub//adj poss// nm // adv
Parce que ses femmes beaucoup
68) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 68-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
110
69) Pá lί ná pá tɔŋ tɔ 69-Quand elles sortent
Pr pers//verbe//conj cord//pr pers//verbe//morph insist
Elles sortent et elles marchent Ø
70) Pátəmáγá pá tɔŋ ná… 70-Elles s’enveulent
Grp nom// pr pers// verbe //prép
Entre elles elles marchent contre
71) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ (bis) 71-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
72) Áláá lίkί ίlέ… 72-Lorsque les femmes sortent
Nm //verbe //conj sub
Femmes sortent quand
73) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 73-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
74) ŋ nàà pá á kpá táálέ… 74-Les violà qui ne vont pas au champ
Pr pers//verbe//pr pers//morph nég//verbe//nm
Tu vois elles ne pas montent champ
75) ŋ hálύγύ kpóŋkpóŋtù tɔ… 75-Quand tu cultives le coton
Pr pers//verbe // nm // morph insist
Tu cultives coton Ø
76) ŋnáá á kpέέlá… 76-Tu ne trouves pas de récolteuses
Pr pers//verbe//morph nég/// nm
Tu vois ne pas récolteuses
77) Pá lί ná pá tɔŋ … 77-Elles sortent pour chercher
Pr pers//verbe//conj cord//pr pers//verbe
78) Álfá ná tέέsί… 78-Les maisons de marabouts
Nm// morph pl // nm
Alphas Ø maisons
79) Pá ŋtáŋkpálà tέŋ yém… 79-Leurs chaussures finissent inutilement
111
Adj poss // nm // verbe // adv
Leurs chaussures finissent inutilement
80) Yɔtɔŋ tɔm ntέ… 80- Ce sonte les affaires de la coépouse
Nm // nm // pr dém
Coépouse problème ça
81) Pá lί ná pá lákί fá… 81-Elles s’occupent
Pr pers//verbe //conj cord//pr pers//verbe//morph insist
Elles sortent et elles font Ø
82) Pó púki ná pá tálà tɔ… 82-Une fois arrivées
Pr pers//verbe //conj cord//pr pers//verbe//morph insist
Elles vont et elles arrivent Ø
83) Hálί pέ kέέsί áləfá… 83-Elles narrent ainsi aumarabout
Adv //pr pers//verbe // nm
Ainsi elles narrent alpha
84) Sί áləfá ŋ nίwá á… 84-Marabout, écoute
Conj sub//nm//pr pers//verbe//morph insist
Que alphas tu entends Ø
85) Mέ wέná mə páálὑ… 85-J’ai mon mari
Pr pers// verbe// adj poss // nm
Je ai mon mari
86)Təlέέtέntέ… 86-C’est un directeur
Nm // pr dém
Directeur ce
87) Litéé tɔɔwà… 87-L’argent est beaucoup
Nm // adv
L’argent beaucoup
88) Má náŋ ί ί sύύkί… 88-Ma chambre, il n’y entre pas
Adj poss//nm//pr pers//morph nég//verbe
Ma chambre il ne pas entre
89) Má sáá ί ί tɔkί kpém… 89-Je prépare, il ne mange point
112
Pr pers//verbe //pr pers//morph nég//verbe//adv
Je prépare il ne pas mange jamais
90) ŋ náá mέ wέná mə yɔtɔŋ… 90-J’ai ma coépouse
Pr pers//verbe//pr pers//verbe//adj poss//nm
Tu vois je ai ma coépouse
91) ίlέ ί tɔɔ ntέ… 91-C’est à cause d’elle
Pr pers//pr pers//prép//pr dém
Elle elle sur ça
92) Má náŋ ί ί sύύkί… 92-Ma chambre, il n’y entre pas
Adj poss//nm//pr pers//morph nég//verbe
Ma chambre il ne pas entre
93) Má cáá sé ŋ kύ ί Kέ … 93- Je veux que tu la tues
Pr pers//verbe//conj sub//pr pers//verbe//pr pers//morph insist
Je veux que tu tues la Ø
94) ŋ náá mέ wέná mə yɔtɔŋ… 94-J’ai ma coépouse
Pr pers//verbe//pr pers//verbe//adj poss//nm
Tu vois je ai ma coépouse
95) ί nίkί fááwί… 95-Comprenez-vous le message
Pr pers// verbe // nm
Vous comprenez message
96) ŋ tɔmáá pá kὑ nyáγá yɔtɔŋ… 96-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe //pr ind//verbe//pr pers// nm.
Tu as dit on tue toi coépouse
97) ŋ nyίίlá pá láá ŋ yɔtɔŋ… 97-Tu as envie qu’on t’immole la coépouse
Pr pers// syntag verb//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as envie on immole toi coépouse
98) ŋ tɔmáá pá kὑnyáγá yɔtɔŋ… 98-Tu veux la mort de la coépouse
Pr pers//verbe//pr ind//verbe//pr pers//nm
Tu as dit on tue toi coépouse
99) Yɔtɔŋ kέ pὑŋ ná… (n fois) 99-La coépouse est-elle une bête ?
113
Nm // verbe //nm // morph interr
Coépouse est bête Ø
NB : ce dernier verset est celui prononcé par le chœur après chaque verset.
KRE N°1 : Atakpi Sorcier
1) Kpiiatakpi (BIS) 1-Attaque de sorcier
Onomat // nm
Attaque sorcier
2) Nɔɔnɔ ίsɔ sέέla,… 2-Les adorateurs actuels de Dieu
Adv// nm// nm.
Maintenant Dieu adorateurs
3) Héi ίsɔ sέέla,… (BIS) 3-Héi adorateurs de Dieu !
Interj // nm // nm
-Héi Dieu adorateurs
4) Nɔɔnɔ ίsɔ sέέla,…(BIS) 4-Les adorateurs actuels de Dieu
Adv //nm // nm
Maitenant Dieu adorateurs
5) Nɔɔnɔ álfánáá,…(BIS) 5-Les alphas actuels
Adv //nm // morph pl
Maintenant alphas Ø
6) Pəkpέŋná apé náá,… 6-Y compris les abbés
Prép //nm // morph pl
Avec abbés Ø
7) Nɔɔnɔ pastέ náá,… 7-Les pasteurs actuels
- Adv //nm //morph pl
Maitenant pasteurs Ø
8) Pέ sέέkί ίsɔ ntέ,… 8-Ils prient Dieu ainsi
Pr pers //verbe //nm //pr dém
Ils prient Dieu ça
9) Ahóó yúγú ίlέ,… 9-Quand il fait nuit
114
Nm //verbe //conj cord
Nuit noircit et
10) Pé kpiki mə láláá piyà,… 10-Ils m’attaquent les enfants
Pr pers// Verbe / /pr pers//pr ind nm d’autrui
Ils attaquent me d’autres enfants
11) Pέ sέέkί ίsɔ ntέ,… 11-Ils adorent Dieu ainsi
Pr pers // verbe // nm // pr dém
Ils adorent Dieu ça
12) ŋ nίίkί fááwί ί,… 12-Ecoutes-tu le message
Pr pers// Verbe // Nm // Morph interr
Tu écoutes message Ø
13)Tɔ páápà ŋ nίίwá á ,… 13-Papa, m’écoutes-tu ?
Morph insist //Nm // Pr pers //Verbe //Morph interr
Ø Papa tu écoutes Ø
14) Pέ sέέkί ίsɔ ntέ,… 14-Ils adorent Dieu ainsi
Pr pers// verbe // nm// pr dém
Ils adorent Dieu ça
15) Cáləm fέί tέŋ tὑ ὑ,… 15-L’anémie nous finit-elle ?
Nm.//Adj qual//Verbe//Pr pers//Morph interr
Sang absent finit nous Ø
16) Ná sáγà sé cáləm fέί,… 16-Et aujourd’hui, anémie
Conj cord //Adv // Conj sub//Nm // verbe
Et aujourd’hui que sang finit
17) Ná célé sé cáləm fέί,… 17-Et demain, anémie
Conj sub//Adv //Conj sub//Nm // verbe
Et demain que sang finit
18) Pέ tέέnà wáláγá tέ,… 18-On amène à Walahatè
Pr ind// Verbe // Nm //Prép
On amène Walahatè chez
19) Pá lákί ná pá wίί tɔ,… 19-Après le traitement en vain
115
Pr ind//Verbe //Conj cord//Pr ind//Verbe //Morph insist
On fait et on rate Ø
20) Pέ tέέ Tancέέtá,… 20-On amène à Tanguiéta
Pr ind//Verbe // Nm
On amène Tanguiéta
21) Pá lákί ná pá wίί tɔ,… 21-Après letraitement en vain
Pr ind//Verbe//Conj cord//Pr ind//Verbe//Morph insist
On fait et on rate Ø
22) Pέ tέέ Pέmpέlέkέ,… 22-On amène à Bembéréké
Pr ind// Verbe // Nm
On amène Bembéréké
23) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 23-Dans ce bas monde
Nm // pr dém //pr pers//adv
Monde celui-ci son dedans
24) Héi atakpi,…(BIS) 24-Héi sorcier !
Iterj. //nm
Héi sorcier
25) Nɔɔnɔ ίsɔ sέέla,…(BIS) 25-Les adorateurs actuels de Dieu
Adv // nm // nm
Maintenant Dieu adorateurs
26) Mί sέέkί ίsɔ ntέ,… 26-Vous adorez Dieu ainsi
Pr pers//verbe // nm //pr dém
Vous adorez Dieu ça
27) Ahóó yúγú ίlέ,… 27-Quand il fait nuit
Nm // verbe // conj cord
Nuit noircit et
28) Ná ί kpiki mə láláá piyà,… 28-Vous m’attaquez les enfants
Conj cord//pr pers//Verbe //pr pers //pr ind //nm d’autrui
Et vous attaquez me d’autres enfants
29) Páápà ŋ nίίwá á,… 29-Papa, écoutes-tu ?
116
Nm //Pr pers//Verbe //Morph interr
Papa tu écoutes Ø
30) Tá cááná wáátὑ,… 30-Au temps de nos parents
Adj poss//nm // nm
Nos parents moment
31) Kέkpέέtί kɔ tɔɔlίnà,… 31-La gale était répandue
Nm // Verbe //Verbe
Gale était répandue
32) Kέkpέέtί kɔ tɔɔlà,… 32-La gale était répandue
Nm //Verbe //Verbe
Gale était répandue
33) Ná ί Tέŋ mə yίlá piyà,… 33-Et elle finissait les enfants
Conj cord//pr pers//verbe //pr pers//nm//nm
Et elle finissait me gens enfants
34) Antúlinyà ίnέ ί táá,… 34-Dans ce bas monde
Nm // pr dém //adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
35) ίlέ nɔɔnɔtáá ίlέ,… 35-Mais aujourd’hui
Conj cord //adv //morph insist
Mais maintenant Ø
36) Kέkpέέtί tίfέί,… 36-La gale n’est plus
Nm //morph nég// verbe
Gale ne pas absent
37) Léγélέ pə lίnáá ná sàŋà sé cáləm fέί 37-D’où vient aujourd’hui l’anémie ?
Adv//pr dém//verbe//conj cord//adv//conj sub//nm//verbe
D’où ça sort et aujourd’hui que sang absent
38) Célé sé cáləm fέί,… 38-Demain, l’anémie
Adv // conj sub //nm //verbe
Demain que sang absent
39) Pέ sέέkί ίsɔ ntέ,… 39-Ils adorent Dieu ainsi
117
Pr pers//verbe //nm //pr dém
Ils adorent Dieu ça
40) ίlέ ίsəmáγálέ pə lápá,… 40-Mais comment se fait-il ?
Conj cord//Adv interr//pr pers//verbe
Mais comment il passé
41) Ná sáγà sé cáləm fέί,… 41-Et aujourd’hui, anémie
Conj cord//Adv//Conj sub//Nm // verbe
Et aujourd’hui que sang finit
42) Ná célé sé cáləm fέί,… 42-Et demain, anémie
Conj cord //Adv //Conj cord//Nm //verbe
Et demain que sang finit
43) Náá sóócá tɔɔlà, … 43-Regarde le (fromage de) sojà existe en abondance
Verbe // nm // adj
Regarde sojà abondance
44) ίlέ pá á cáákί sóócá,… 44-Mais ils ne veulent pas le (frommage de) sojà
Conj cord //pr pers//morph nég//verbe //nm
Mais ils ne pas veulent sojà
45) Tɔ táγálέ pá cáákί fá,… 45-C’est nous qu’ils préfèrent
Morph intro//pr pers//pr pers//verbe //morph insist.
Ø nous ils veulent Ø
46) Pá cáákί sé pέ tέŋ tύγὑ,… 46-Ils veulent nous finir
Pr pers//verbe //conj sub//pr pers//verbe //pr pers
Ils veulent que ils finissent nous
47) Páápà ŋ nίίwá á,… 47-Papa, écoutes-tu ?
Nm // Pr pers //Verbe //Morph interr
Papa tu écoutes Ø
48) Má cáá sé ŋ cέkənà, … 48-Je veux que tu saches
Pr pers//verbe//conj sub//pr pers//verbe
Je veux que tu saches
49) ŋ náá ásəpàà yáákί ίlέ,… 49- Tu constates quand l’aube s’annonce
118
Pr pers//verbe//nm//verbe //morph insist
Tu vois aube appelle Ø
50) Ná látánί səŋ ná ί kóóki, … 50-Et le muezzin se point pour
Conj cord//nm //verbe //conj cord//pr pers//verbe crier
Et muezzin se pointe et il crie
51) ί kɔŋ sé ί súŋ tɔ,… 51-Avant qu’il ne se taise
Pr pers//verbe//conj sub //pr pers//verbe//morph insist
Il vient que il se taise Ø
52) ŋ nίίkί kpέŋkpέŋ wiliγi,… 52-Tu entends le gong sonner
Pr pers//verbe // nm // verbe
Tu entends gong pleurer
53) Pá yáákι mə pátəmà,… 53-Ils s’appellent
Pr pers// verbe //pr pers// gr nom
Ils appellent me entre eux
54) Pá lίίnà tɔγɔὑ tɔ,… 54-Du retour de leur logis
Pr pers//verbe //verbe //morph insist
Ils viennent manger Ø
55) Wéi ί cáγáá pə nyáálί,… 55-Qui s’attarde est surpris par le jour
Pr dém//pr rel//verbe//pr dém//verbe//pr pers
Celui qui reste ça éclaire le
56) Átákpi átákpi (4 Fois) 56-Sorcier sorcier ! (4 Fois)
Nm // nm
Sorcier sorcier
57) Mɔ yɔγɔtəná mpὑ… 57-C’est moi qui parlecela
Pr pers//verbe // pr dém
Je parle ça
58) ί náá pὑlὑpὑ ίί tέέkί ί 58- Voyez rien ne le passe inaperçu
Pr pers//verbe //pr ind//pr pers//morph nég//verbe//pr pers
Vous voyez chose elle ne pas dépasse le
59) Mɔ Yɔγɔtὐγὑ mέ tέ tɔ 59-Après mes propos
119
Pr pers//verbe // pr pers // Verbe //morph insist
Je parle je finis Ø
60) Pɔ pɔɔsὐγὑ pátəmá,… 60-Ils vont se demander
Pr pers// verbe // gr nm
Ils demandent entre eux
61) ίlέ léγélέ ká lίίnáá,… 61-D’où vient ce petit ?
Conj cord // adv //adj qual // verbe
Mais d’où petit sortit
62) Pίyáγá kέ yátέ kέ,… 62-Un si petit enfant
Nm // verbe //nm //morph insist
Enfant est œuf Ø
63) Ná kɔ yɔγɔtὐγὑ tɔm péé,… 63-Mais qui dit grand chose
Conj cord//pr pers//verbe/nm // nm
Et il parle probléme grains
64) Káhὑŋà kέ má lίίnáá,… 64-Je viens de Gaounga(village de Djougou)
Nm //conj sub//pr pers //verbe
Gaouga que je viens
65) Antúlinyà ίnέ ί táá… 65-Dans ce bas monde
Nm // pr dém//adj poss//adv
Monde celui-ci son dedans
66) Pɔγɔmtɔɔ ápálὐpù… 66-Le garçon de Pohomtoho (village de Ouaké)
Nm // nm
Pohomtoho garçon
67) Tɔ pὐlὑpὑ ίί tέέkί ί … 67-Rien ne le passe inaperçu
Morph intro //pr ind//pr pers//morph nég //verbe// Pr pers
Ø chose elle ne pas dépasse le
68) ί nίί máγá fááwί … 68-Vous m’écoutez le message
Pr pers//verbe//pr pers// nm
Vous écoutez me message
69) Ciγità ákpéŋ kέ … 69-C’est une jeune fille en perle
120
Nm // nm // morph insist
Perle fille Ø
70) Kámátέ álià kέ … 70- Femme de Kamatè
Nm // nm //morph insist
Kamatè femme Ø
71) Ná ί tέsί mə Pɔγɔmtɔɔ … 71-Et elle a rejoint Pohomtoho
Conj cord// pr pers//verbe//pr pers// nm
Et elle traversa me Pohomtoho
72) Kéésúlù tίyáγá táá … 72- Dans la maison de Késsoulou
Nm prop // nm // adv
Késsoulou maison dedans
73) Ná pə lὑlί ápálὐpù … 73-Et le garçon y naquit
Conj cord// pr dém//verbe //nm
Et ça naquit garçon
74) ί náá tɔtɔlὑ pàà fέί … 74-vous savez que le chasseur n’a pas peur
Pr pers//verbe// nm // nm// verbe
Vous voyez chasseur crainte absent
75) Máγá lέ tɔtɔlὑ … 75-Je suis le chasseur
Pr pers// verbe // nm
Moi suis chasseur
76) Tι sέέ mə páápà … 76- Nous m’avons salué papa
Pr pers// verbe//pr pers// nm
Nous saluames me papa
77) Tι mələγə kpénté… 77-Nous repartons pour la maison
Pr pers//verbe //verbe
Nous retournons rentrer
78) Tá mpáá tɔɔwá … 78-Notre chemin est distant
Adj poss// nm // adv
Notre chemin beaucoup
79) Tι cɔɔ mə mί sέέtὑ… 79-Nous promenions pour vos salutatoins
121
Pr pers// verbe// pr pers//adj poss// nm
Nous promenames me vos salutations
80) Célé pə féŋ ίlέ … 80-Demain après le réveil
Adv// pr dém//verbe //conj cord
Demain ça réveille et
81) Tιcáγá ná tι yɔγɔtί … 81-Nous allons causer
Pr pers//verbe //conj cord//pr pers//verbe
Nous restons et nous parlons
82) Má məlί kpénté… 82-Je repars (pour la maison)
Pr pers// verbe // verbe
Je retourne rentrer
83) Átákpi átákpi,… (BIS) 83-Sorcier sorcier !
Nm // nm
Sorcier sorcier
84) Nɔɔnɔ ίsɔ sέέla,…(BIS) 84-Les adorateurs actuels de Dieu
Adv // nm // nm
Maintenant Dieu adorateurs
85) Pέ sέέkί ίsɔ ntέ…(BIS)
Pr pers//verbe //nm // pr dém 85-Ils adorent Dieu ainsi
Ils adorent Dieu ça
86) Ahóó yúγú ίlέ… 86-Quand il fait nuit
Nm // verbe // conj cord
Nuit noircit et
87) Pé kpiki mə yίláá piyà…(BIS) 87-Ils m’attaquent les enfants d’autrui
Pr pers//Verbe // pr pers// nm // nm
Ils attaquent me gens enfants
88) Átákpi átákpi,… (BIS) 88-Sorcier sorcier !
Nm // nm
Sorcier sorcier
89) Mί sέέkί ίsɔ ίlέ,… 89-Vous adorez Dieu
122
Pr pers //verbe // nm // conj cord
Vous adorez Dieu et
90) Ahóó yúγú ίlέ… 90-Quand il fait nuit
Nm // verbe //conj cord
-Quand il fait nuit
91) Átákpi átákpi,… (BIS) 91-Sorcier sorcier !
Nm // nm
Sorcier sorcier
92) Héi atakpi,…(BIS) 92-Héi sorcier !
Iterj // nm
Héi sorcier
93) Héi ίsɔ sέέla,… 93-Héi adorateurs de Dieu !
Interj // nm // nm
Héi Dieu adorateurs
94) Héi ίsɔ sέέlὑ,… 94-Héi adorateur de Dieu !
Interj // nm // nm
Héi Dieu adorateur
95) Nyέ sέέkί ίsɔ ntέ…(BIS) 95-Tu adores Dieu ainsi
Pr pers// verbe // nm // pr dém
Tu adores Dieu ça
96) Hátóó nyá náŋ táá… 96-Au fond de ta chambre
Prép // adj poss//nm // adv
Depuis ta chambre dedans
97) Tɔ tɔγɔnásί káá tənέ … 97-Nos vivres sont emmagazinés
Adj poss// nm // verbe // adv là-bas
Nos vivres enmagazinés là-bas
98) Ná ŋ lίkί ná ŋ cɔɔkί … 98-Et tu sors te promener
Conj cord//pr pers//verbe//conj cord//pr pers//verb
Et tu sors et tu promènes
99) Ná ŋ lίkί ná ŋ púúsúγú … 99-Et tu sors pour mentir
123
Conj cord//pr pers//verbe//conj cord//pr pers//verbe
Et tu sors et tu mens
100) Héi atakpi,…(BIS) 100-Héi sorcier ! (2fois)
Iterj // nm
Héi sorcier
NB : Chaque verset de ce chant est complèté par le chœur qui reprend á chaque fois le premier verset.
KSO N°1 : Pəsύγὑ nanɔγɔkὑlὑmaγa tɔm Le pouvoir et la solidarité
1-Tuu pἑpἑ tuu 1-Fais ce qui est de ton pouvoir
Verbe //adv //peu // verbe
Traine peu peu pousse
2-Awaƞla ifepià mἑ 2- Jeunes d’Awanla (village)
Nm // nm // pr pers
Awanla jeunes vous
3-ιcam tùùki mpὐγὑ 3-Le faible évolue ainsi
Nm // verbe // adv
Faible traine ainsi
4-ι nιιkι yὐlὑ waasὐγὑ lἑlὑ 4-Comprenez que c’est l’Homme qui aide son prochain
Pr pers//verbe//nm //verbe //pr ind
Vous écoutez Homme sauve l’autre
5-ι nιιkι waké ιcatἑ tι wààsι təma 5-Populations de Ouaké, entraidons-nous !
Pr pers//verbe//nm //nm //pr pers//verbe//grp nm
Vous écoutez Ouaké ville nous sauvons entre nous
6-Nɔγɔ kὐlὐmaγà ι tɔɔwà 6-S’il y a la solidarité
Nm // adj qual // pr pers//verbe
Bouche unique elle grandit
7-Pətənἑ tι naa kἑ 7-Nous obtiendrons tout
Pr ind // pr pers//verbe//morph insist
Tout nous voyons Ø
124
8-Waké latió 8-La radio (rurale) de Ouaké
Nm // nm
Ouaké radio
9-Kὐlἑ kὐ tɔƞ lapὑ 9-Elle joue sa partition
Pr pers//pr dém// verbe// verbe
Elle ci marche travailler
10-ιsɔ ι ponà pooliƞ 10-Que Dieu nous préserve
Nm // pr pers//verbe// adv
Dieu il amène loin
11-Wei ι nyιnàm kənaaὑ 11-Qui me défie mystiquement
Pr rel// pr pers//verbe// nm
Qui il regarde défi
12-Lὑm kἑ ι cεlá mà 12-C’est l’eau qu’il m’apporte
Nm // conj sub//pr pers//verbe//pr pers
L’eau que il donne moi
13-Iwiiu sι kə liki mà 13-L’esprit malins qui tente de m’avaler
Nm conj sub//prpers//verbe//pr pers
Esprit que il avale moi
14-Kə pəsəγə atἑἑlι kε 14-Devient un criquet
Pr pers//verbe // nm //morph insist
Il se transforme criquet Ø
15- ι nyɔɔsι mətəγə téù 15-Préparez-vous en conséquence
Pr pers//verbe//pr pers // adv
Vous préparez vous-mêmes bien
16-Lɔƞtàà sɔɔsι 16-Les pratiques anciennes
Adj qual // nm
Anciennes traditions
17-Tə tàà sɔɔ sι 17-Ne les oublions pas
Pr pers// adv neg//verbe//pr pers
Nous ne pas oublions elles
125
18-Pιyáγà aputu ma 18-Moi Abdou
Nm //nm //pr pers
Enfant Abdou moi
19-ιféleù leγe ι lιιnà 19-Quel que soit le sorcier
Nm // adv // pr pers// verbe
Sorcier d’où il sort
20-Maγà pa yàà kἐƞkἑ 20-C’est moi qu’on surnomme « ce petit »
Pr pers //pr ind //verbe //gr nm
Moi on appelle ce petit
21-Maγà pa yàà kὐƞkὑ 21- C’est moi qu’on surnomme « le phénomène »
Pr pers// pr ind//verbe // gr nm »
22-Nɔɔnɔ ma paγàlà 22-Maintenant je suis grand
Adv // pr pers// verbe
Actuellement je grandis
23-ι nàà ma tantὐγὑ tɔɔwà 23- Vous remarquez ma grande barbe
Pr pers //verbe // adj poss//nm //verbe
Vous voyez ma barbe grandit
24-Awaƞlà ιfépù ma 24-Moi digne fils de Awanla
Nm // nm // pr pers
Awanla jeune moi
25-Ye ntι tι wἑ 25-S’il y a quelque chose
Conj sub//pr ind//prpers//verbe
Si quelque chose elle est
26-Mɔ yɔγɔtὐγὑ kἑ 26-Je dénoncerai
Pr pers// verbe // morph insist
Je parlerai Ø
27-Wei ι caakι sɔɔsι ι pɔɔsι awaƞla 27-Qui cherche les pratiques traditionnelles vient à Awanla
Pr rel//pr pers//verbe//pr pers//verbe//nm
Qui il veut traditions il demande Awanla
28-Laatio tɔlaa tɔ 28-Lorsque la radio était tombé en panne
126
Nm // verbe //morph insist
Radio tomba Ø
29-Pa kaalà awaƞla kὐ kὐlι kὐ páálι 29-C’est à Awanla qu’on fit les sacrifices qui l’ont dépanné
Pr pers//verbe//nm //pr pers//verbe//pr pers//verbe
On sacrifia Awanla elle se leva elle repandut
30-Kaγanà lampu tἐmà 30- Il n’y a plus l’impot de nos jours
Adv // nm // verbe
Maintenant impots finit
31-Leγe pə lιιná 31-Savez-vous pourquoi ?
Adv // pr dém // verbe
D’où cela vient
32-Tι pàà holuγùtἑ 32-Célébrons (le village de)Sonaholou
Pr pers// verbe// nm
Nous dansons Sonaholou
33-Sɔγɔnà tιyaγa asé tι páákἑ 33-Nous devons célébrer (le roi) Sona
Nm // nm // conj sub// pr pers//verbe
Sona maison que nous dansons
34-Sɔγɔnà ta tεεnà fεεlἑ 34-Sona est mort dignement
Nm // morph nég// verbe // nm
Sona ne pas partit honte
35-ι heeli ιcatἑ tənἑ 35-Informez ainsi tout le monde
Pr pers //verbe // nm // adj ind
Vous informez ville toute
NB : Le premier verset est à chaque fois repris par le chœur
KFA N°1 : koople tɔm A propos de la parenté
1-Asa pəlι weγe lε 1-Quel avantage y a-t-il ?
Conj cord //verbe//adv interr//morph insist
Et donne quoi Ø
127
2-Ma caa taa nιι kɔγɔpəlé 2-Mon pére méfie -toi de la parenté
Adj poss//nm //adv nég// verbe //nm
Mon père ne pas écoutez parenté
3-ƞ tɔƞ hámà nyιma pεlἐγἑ 3-Ils sont des sorciers
Pr pers//verbe // nm //nm // pr pers
Tu cherches sorcellerie propriétaire eux
4-Yaa ιsəmaγà pə lapá 4- Ou bien comment c’est ?
Conj cord// adv //pr dém//verbe
Ou bien comment ce fait
5-Koopəlé taa sιm kἑ 5-Dans la parenté se trouve la mort
Nm //adv // nm //morph dém
Parenté dedans mort c’est
6-Ye ƞ tιƞà koopəlé 6-Si tu t’attaches à la parenté
Conj sub// pr pers//verbe// nm
Si tu suis parenté
7-Ma tɔmàà pa piƞ nya 7-Je dis que tu ne vis pas longtemps
Pr pers//verbe // pr ind//verbe //pr pers
Je dis on enterre toi
8-Yaa pa saa ƞ ƞ tɔkι 8-Ou tu vis malade
Conj cord//pr ind//verbe//pr pers//adv nég//verbe
Ou bien on prépare tu manges ne pas manges
9-Pənἐpətáγà kἐlἑ ma kɔmà 9-Maintenant je me sens ma peau
Adv //conj sub// pr pers//verbe
Maintenant que je viens
10-Ye ƞ wἐnà kənaaὑ 10-Si tu as de forces mystiques
Conj sub//pr pers// verbe // nm
Si tu possèdes forces mystiques
11-Ma caa sé ƞ nyιnι ma 11-Je veux que tu me défies
Pr pers//verbe//conj sub//pr pers//verbe//pr pers
Je veux que tu regardes moi
128
12-ƞ nyιnι pə nyaalι maγà téù 12-Cela m’encouragerait
Pr pers//verbe//pr dém//verbe// pr pers// adv
Tu regardes cela nettoie moi bien
13-ιlἑ ιsɔ hana ma 13-C’est un don de Dieu
Conj cord//nm // verbe// pr pers
Mais Dieu donne moi
14-Waké apalaa taa 14-Des fils de Ouaké
Nm // nm // adv
Ouaké hommes dedans
15-Ma làkι mἐγἑ ceewa 15- Je me confie à vous
Pr pers// verbe //pr pers// nm
Je fais vous message
16-ƞ tɔƞ ƞ ta nyιta mə 16-Tu ne me connais pas
Pr pers// verbe// pr pers//adv nég//verbe// pr pers
Tu dis tu ne pas connais moi
17-Pəntɔ ƞ nyιƞ ma 17-Cette année tu me connaitras
Nm //pr pers// verbe // pr pers
Année tu connaitras moi
18-Ma nɔγɔléléƞ tɔɔwà 18-J’ai une grande liberté de parole
Adj poss //parole // adv
Ma parole beaucoup
19-Pətɔɔ kἑ yιlaa ι caa mə 19-C’est pourquoi je suis détesté
Prép //morph insist//nm//adv nég//verbe//pr pers
A cause de Ø gens ne pas aiment moi
20-Ye ƞ təƞa koγopəle 20- Si tu t’attaches trop à la parenté
Conj sub// pr pers//verbe// nm
Si tu suis parenté
21-Sιm kἑ pə tἐƞ nà 21-Tu risques la mort à la fin
Nm /conj sub//pr dém//verbe//morph insist
Mort que ce finit Ø
129
22-ƞ tɔƞ hámà nyιma palaγa a 22-C’est à eux la sorcellerie
Pr pers//verbe//nm// nm // pr pers//morph insint
Tu dis sorcellerie propriétaire eux Ø
23-Pa lιι pa pἐἐtι ƞ 23- Ils vont te vendre
Pr pers//verbe//pr pers//verbe//pr pers//
ILS sortent ils vendent toi
24-Pa lakι ƞ kɔlɔmɔtɔ 24-Ils vont te médire
Pr pers//verbe //pr pers// nm
Ils font toi médisance
25-Maγa lὐmpὐγὑ taa apalὑ 25-Moi digne fils du bas-fond
Pr pers// nm // adv// nm
Moi bas-fond dedans garçon
26-Pə lὐla mə ιkpaməlἑ 26-Je suis fils unique
Pr dém//verbe//pr pers// nm
Ça nacquit me unique
27-Pətɔɔ kἑma yɔɔlὐγὑ kὑ yɔɔlὑ 27-C’est pourquoi je suis capricieux
Prép // conj sub//pr pers//verbe//morph insist//verbe
A cause de que je m’amuse Ø m’amuse
NB : Le premier verset est repris par le chœur juste une fois après le préchantre
Résumés succints des autres chants du répertoire
KFA1 :
La parenté est le sujet de ce chant. Le chanteur atamtʋ se demande
l’avantage qu’il y a en suivant une famille « manche longue ». Il y retrouve plus
le risque de s’exposer aux gens de mauvaise sorcellerie. C’est pourquoi son pére
doit se méfier de leur famille. De son expérience, la plupart de ceux qui se sont
attachés à la parenté n’ont pas connu une vie heureuse.
KFA2 :
130
Le chanteur plaint le cas d’un orphelin dont personne ne se soucie dans la
famille. L’enfant se promène comme s’il n’est né de personne. Un tel manque
d’humanisme existe-t- il chez les gens qui ont foi en Dieu ? Que quiconque
sache que cela n’a pas été un souhait de cet enfant.
KFA3 :
L’orphelin est encore le sujet. Pour celui-ci, signifie le chanteur, perdre ses
parents est synonyme de perdre son bonheur. C’est ce que certains pensent.
Malgré l’effort répété de cet enfant au Nigéria, il n’a qu’à raconter son passé
parce que le présent est vide et, ceux qui ont créé ce vide sont là. Ce sont des
méchants. Que tout orphelin sache qu’il doit être éveillé pour ne pas être une
proie pour les gens de mauvais cœur car ils sont là. On ne fait confiance à une
personne parce qu’elle est de sa famille mais parce qu’elle est de bon cœur.
KFE1 :
Il s’agit de la dénonciation de la jalousie morbide d’une femme. Celle-ci
semble totalement vivre des biens de son époux. Pour se sentir plus à l’aise,
elle décide de tuer sa coépouse. Ainsi sait-elle mise à fréquenter un marabout à
qui elle confie la tâche. Mais aussi, elle embarque d’autres femmes dans son
bâteau. Pendant ce temps, l’époux souffre du manque de récolteuse de coton.
KFE2 :
Le chant aborde la femme et dénonce sa jalousie au foyer. IL y en a qui
pensent que le mari doit renvoyer les autres épouses à cause d’elle. Le mari
responsable doit la demander de quitter si elle veut. La vie à deux au foyer n’est
pas mauvaise, c’est l’humilité et l’amour du prochain que chacun doit avoir.
KFE3 :
Le chanteur relate l’histoire d’une fille qui, fuyant le travail, a choisi aller
en aventure en ville. Une fois là-bas, s’étant rendue compte que le travail est
pire, elle s’est jetée dans les bras des garçons et revint aussitôt en état et
131
malheureuse. C’est en ce moment qu’elle pense qu’on doit avoir pitié d’elle,
Hélas !
KFE4 :
La femme abordée ici est la belle-sœur. Le chant dénonce le manque de
considération de celle-ci à la belle-mère. Elle immite les blancs alors qu’elle ne
peut pas faire ce que font ces derniers. Elle doit changer.
KFE5 :
Le chanteur déclare qu’il n’a plus de petite amie. Les filles d’aujourd’hui
aiment être partagées par plusieurs hommes à la fois. Cela ne doit pas être
tolérée par un garçon digne. Lui, il a préféré cela et le recommande a
quiconque. C’est la meilleure jeunesse.
KFE6 :
L’on dénonce ici encore la paresse d’une belle-sœur. Elle ne sait rien faire
de bon en matiére culinaire mais au lieu de faire l’effort pour se rattrapper, elle
manque d’humilité. Il ne lui reste que la bouche et le sexe. Une telle femme se
prépare une grande honte.
KFE7 :
Ce chant dénonce l’attitude des filles d’aujourd’hui envers leurs parents.
Elles engagent les parents dans des dépenses en disant : je veux l’école ; je
veux apprendre tel ou tel métier. Mais au beau milieu du processus, eller sort
un beau matin avec son diplôme à elle : la grossesse. C’est le parent qui sort
donc perdant.
KFE8 :
Contrairement au chant précédent, le chanteur s’attaque à une mère
inexemplaire. Après avoir foutu sa vie en l’air, cette tante enseigne à sa fille
132
l’escroquerie. C’est ainsi que lui, chanteur, a été victime. Cependant un même
piège ne saurait prendre la biche deux fois au même endroit.
KFE9 :
Le chant dénonce les caprices des femmes au foyer. Un homme, le
chanteur, fatigué de l’insatisfaction de sa femme, énumère les différentes
révendications auxquelles il a répondu pour le bonheur de cette dernière.
Jamais satisfaite, elle se plaint toujours et nie souvent certains bons actes de
l’époux. Pourtant, elle évite les activités champêtres du mari. La femme est
ainsi faite, que tout époux sache gérer.
KFE10 :
C’est le comportement des femmes infidèles qui est décrit ici. Ce sont elles
qui aiment vivre loin de leur vrai époux. Le grand alibi de nos jours est le
commerce. Après le marché, on achète de cadeau et on va à la rencontre de
l’amant. La nature vend toujours la mèche de ces femmes. C’est pourquoi eux
autres, les hommes, le savent. Ces femmes doivent changer.
KHO2 :
L’homme dont parle le chanteur ici est un oncle. Il dénonce sa
malhonnêteté. Il ne tient pas à ses promesses alors qu’il est grand. Il n’a pas
donné au chanteur son cadeau rituel. A chaque rite, il le remet à plus tard. Mais
quand ses enfants prennent chez d’autres oncles, il est fier.
KMO :
Le chant parle de l’invincibilité de la mort. L’Homme ne doit pas réfléchir
longtemps quand elle fait son œuvre. Il n’y a pas d’intelligence ni de moyens
quand elle est là. On ne l’évite point. L’Homme doit se souvenir d’elle dans tous
ses actes.
KPA1 :
133
Le chant explique aux auditeurs, la grandeur de la patience et ce qu’un
Homme patient peut gagner en retour. Sans donner une réponse claire, le
chanteur relate sa vie privée. Les gens savent que ce n’est pas par plaisir que
son père avait quitté Badjoudè pour Tahapouka où lui autre, il a vu le jour. Mais
aujourd’hui, ils reviennent plus en force.
KPA2 :
Avec pour refrain « Laisse-les te tuer afin de mieux te résusciter », ce
chant exhorte l’auditeur à ne point faire face aux on-dit. Que l’on mette la
patience en avant et persévère. C’est ainsi qu’il ira de l’avant.
KPA3 :
Abondant dans le même sens que le précédent, le chanteur relate l’histoire
d’un homme surnommé, suite à un malheur, « L’homme aux côtes sèches » par
ses détracteurs. Ce dernier prit son mal en patience, accepta la réalité et le
surnom. Mais il se dit que ce n’est pas la fin du monde pour lui. Le moment
venu, la nature qui l’avait puni le béni fortement. Il devint l’emprunteur de
l’argent à ces ex-détracteurs.
KPO1 :
Le chanteur fait une observation de la vie humaine actuelle et la juge
mauvaise par rapport à celle des générations précédentes. D’où il attire
l’attention du chef local de Badjoudè afin de changer son mode de règne. Il doit
éviter de se laisser berner par certains capricieux qui tentent de le changer à
leur manière. Il faut que le chef soit chef sinon ces gens l’auront dans leur
piège.
KPO2 :
Le chant aborde la gestion du pouvoir de l’ex-président de la République. Il
trouve ingrat que l’on dise que Yayi Boni n’a rien fait de son règne. Lui, il a vu
quelque chose de bon. Ce président a ouvert les yeux aux gens et même aux
aveugles, dit-il.
134
KPO3 :
Se prononçant sur la gestion du pouvoir local, le chanteur exhorte les chefs
locaux à mieux penser le développement de leur localité. Qu’ils s’évitent les
coups-bas car, le Bénin a besoin de leurs actions pour son évolution.
KPO4 :
C’est la gestion du maire de la commune qui est critiquée dans ce chant.
Insatisfait de la gestion du maire qui pense que les illetrés n’ont pas de tête
pour réfléchir, le chanteur lui rappelle que, non seulement la nature va lui payer
cela mais eux aussi vont le descendre à leur manière s’il ne se resaisit pas.
KRE1 :
L’improvisateur s’attaque aux prétendus hommes de Dieu et dévoile qu’ils
sont des sorciers. La plupart d’entre eux sont à la base de la régularité de
l’anémie dont souffrent certains malades surtout enfants. C’est pour cacher leur
manœuvre qu’ils sont des fanatiques religieux.
KRE2 :
L’improvisateur se demande en quoi la pratique de la flagellation empêche
l’homme de mieux pratiquer l’Islam. Pour montrer aux adversaires qu’il dit vrai,
il leur rappelle que leurs ancêtres et leurs parents en ont pratiqué jusqu’à leur
mort. Pourtant, ils étaient aussi musulmans.
KSO1 :
Fais ce qui est de ton pouvoir. C’est par cette phrase que le chanteur invite
les jeunes d’Awanla à la solidarité. L’homme doit aider son prochain, c’est
pourquoi Dieu n’a pas créé les Hommes égaux.
KSO2 :
135
Le chanteur fait le constat de la disparition progressive de la solidarité
autrefois reconnue au village de Wakitè. Sans elle rien ne va, c’est pourquoi les
jeunes doivent être solidaires.
KSO3 :
Comme le précédent, ce chanteur déplore la méchanceté et la division
réccurrentes dans le village de Wakitè reconnu auparavant comme la terre des
généreux. Les sorciers doivent utiliser leurs forces pour le bien.
Table des matières Sommaire ................................................................................................. ii
A la mémoire de : ..................................................................................... iiii
Remerciements .......................................................................................... iii
Résumé…………………………………………………………………………………………………………..…...…iv
Abstract .................................................................................................... v
Introduction............................................................................................... 7
Chapitre I : Les Lokpa, une population de migrants et une culture .................... 9
136
1. Brêve histoire de la population lokpa ......................................................... 9
2. L’organisation sociale ............................................................................ 10
3. La vie culturelle des Lokpa ..................................................................... 11
3.1. Les rites de purification des femmes .................................................... 12
3.2. Les rites de reconnaissance et d’imploration .......................................... 12
3.3. Les rites de cohésion sociale ou de solidarité ......................................... 14
3.4. Les rites de passage ........................................................................... 15
Chapitre II : Une épreuve d’endurance chez les Lokpa : kamʋɣʋ .................... 20
1. La description du rite ............................................................................ 20
1.1.Historique du rite de flagellation ........................................................... 20
1.2. Le cadre et le temps de la pratique du rite ............................................ 21
1.3. Les étapes dans le rite ........................................................................ 22
1.4. Les règles pratiques du rite ................................................................. 23
1.5. Les différents acteurs et leurs rôles ...................................................... 24
1.6. La production des chants .................................................................... 28
2. Elaboration du corpus de chants ............................................................. 28
2.1. La collecte sauvage ............................................................................ 29
2.1.1. Les localités cibles ........................................................................... 29
2.1.2. Les paramètres de l’enquête ............................................................. 29
2.1.3. L'échantillonnage………………………………………….……………………………………….....24
2.2. Le traitement des chants…….…………………………………………………………………………25
2.2.1. L'audition……….………………………..………………………………………………………………...25
2.2.2. Le codage ...................................................................................... 32
2.3. La transcription et la traduction des chants………………………………………….…....26
2.3.1. La transcription ............................................................................... 32
2.3.2. La traduction justalinéaire ................................................................ 33
2.3.3. La traduction élaborée ..................................................................... 33
Chapitre III : La typologie des chants de flagellation lokpa .......................................... 42
1. Le critère du rythme .................................................................................................................. 43
2. Le critère de temps ou de la diachronie ........................................................................... 44
3. Le critère de thèmes ................................................................................................................ 45
4. Le critère des entrées .............................................................................................................. 47
5. Le critère de l’énonciation ...................................................................................................... 49
6. Le critère du volume………………………………………………………………………….42
7. Les intentions littéraires dans les chants………………………………………………………...44
137
7.1. L'intention poétique…………………………………………………………………………….45
7.2. L'intention didactique…………………………………………………………………………..46
Chapitre IV: Regards sur la vie d'une communauté……………………………………………..48
1. Les thèmes mineurs…………………………………………………………………………...…48
1.1. L'homme………;………………………………………………………………………………..48
1.2. La femme…………………………………………………………………………………….....49
1.3. La paresse……………………………………………………………………..……………….50
1.4. La méchanceté humaine………………………………………………………………….…..51
1.5. La double facette de l'Homme………………………………………………………………..52
2. L'éducation comme thème majeur………..………………………………………………..…..53
2.1. L'éducation physique………………….……………………………………………………….54
2.2. L’éducation intellectuelle .................................................................................................... 62
2.3.L’éducation sociale et civique ............................................................................................ 66
2.4. L'éducation morale………………………………………………………………………….….64
2.5. L'éducation religieuse…………………...………………………………………….…………66
Chapitre V: L’esthétique des chants de flagellation lokpa .............................................. 74
1. Personnages, actions et conséquences .............................................................................. 74
1.1.Les personnages ..................................................................................................................... 74
1.2. Les actions et les conséquences ...................................................................................... 75
2. L’univers syntaxique des chants.......................................................................................... 76
2.1. La phrase .................................................................................................................................. 76
2.1.1. La phrase simple................................................................................................................ 76
2.1.2 La phrase complexe ........................................................................................................... 77
2.2. Le mot ........................................................................................................................................ 77
2.2.1. Le nom ................................................................................................................................... 78
2.2.2. Le pronom ............................................................................................................................ 78
2.2.3. L’adjectif qualificatif ......................................................................................................... 79
2.2.4. Le verbe ................................................................................................................................ 79
2.2.5. L’adverbe .............................................................................................................................. 80
3. Les techniques d’expression ................................................................................................. 80
3.1. Les figures de sens ou tropes ........................................................................................... 80
138
3.1.1. La métaphore ...................................................................................................................... 80
3.1.2. La métonymie ..................................................................................................................... 81
3.2. Les figures de pensée………………………………………………………………………....75
3.2.1. La comparaison .................................................................................................................. 82
3.2.2. L’apostrophe ........................................................................................................................ 83
3.2.3. L’exclamation ................................................................................ Erreur ! Signet non défini.
3.2. 4. L’interrogation ................................................................................................................... 84
3.2.5. L’hyperbole .......................................................................................................................... 85
Conclusion ......................................................................................................................................... 86
Bibliographie ..................................................................................................................................... 89
Annexes……………………………………………………………………………..………………..88
Table des matières………………………………………………………………………………...130