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Application de la photogrammétrie et du traitement d’images pour l’étude de revêtements routier. B. Cannelle 1 N. Chevallier 1 Michela Thiémard-Spada 1 Françoise Beltzung 1,2 Tobias Balmer 3 1 Institut insit (Institut d’Ingénierie du Territoire) 2 Centre de Compétences du Domaine Routier 3 Weibel AG, Forschung und Entwicklung [email protected] 1 Introduction L’une des méthodes pour réduire la pollution sonore dans les villes est de poser du revêtement phono-absorbant sur les chaussées. Ces revêtements sont constitués de granulats, de bitumes et d’une part importante (de 15 à 20 %) de vides d’air (pores) permettant l’absorption des ondes sonores. Généralement, une baisse des performances acoustiques est constatée au fil des années de service [6]. Cette baisse serait due au colmatage des pores avec des boues et des résidus d’abrasion [1, 5]. Le centre de compétence du domaine routier (CCDR) et le laboratoire de photogrammétrie de la HEIG-VD ont développé un processus de traitement d’images permettant d’analyser automatiquement les échantillons de chaussée [3]. Afin d’étudier l’évolution des revêtements, des carottages sont réalisés sur la chaussée. Les carottes sont ensuite imprégnées, par le dessus d’une résine époxi jaune, puis par le dessous d’une résine époxi orange. La visualisation des pores des échantillons se fait en utilisant une lumière ultraviolet : ces résines étant fluorescentes. Afin de prendre les photos permettant l’analyse des pores, un dispositif de prises de vues a été réalisé (figure 1). FIGURE 1 – Dispositif de prise de vue (d’après [3]) Ce dispositif comporte : — un support pour l’appareil photo avec une butée permettant de le repositionner toujours au même endroit — un support pour déposer la tranche de carotte avec une butée permettant de la repositionner toujours au même endroit — une lampe ultraviolet afin de rendre la résine fluorescente La boîte étant opaque, les réglages de l’appareil photo (temps de pose, ouverture...) sont définis en mode manuel sur un échantillon, puis, ne sont plus modifiés pour toutes les prises de vues des carottes suivantes. Le boitier utilisé est un Canon 700 D de 18 Méga pixels (5184 x 3456) muni d’un objectif de 40mm (Canon).

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Application de la photogrammétrie et du traitement d’images pour l’étude derevêtements routier.

B. Cannelle1 N. Chevallier1 Michela Thiémard-Spada 1 Françoise Beltzung 1,2 Tobias Balmer 3

1 Institut insit (Institut d’Ingénierie du Territoire)2 Centre de Compétences du Domaine Routier

3 Weibel AG, Forschung und Entwicklung

[email protected]

1 IntroductionL’une des méthodes pour réduire la pollution sonore dans les villes est de poser du revêtement phono-absorbant sur leschaussées. Ces revêtements sont constitués de granulats, de bitumes et d’une part importante (de 15 à 20 %) de vides d’air(pores) permettant l’absorption des ondes sonores. Généralement, une baisse des performances acoustiques est constatée aufil des années de service [6]. Cette baisse serait due au colmatage des pores avec des boues et des résidus d’abrasion [1, 5].Le centre de compétence du domaine routier (CCDR) et le laboratoire de photogrammétrie de la HEIG-VD ont développéun processus de traitement d’images permettant d’analyser automatiquement les échantillons de chaussée [3]. Afin d’étudierl’évolution des revêtements, des carottages sont réalisés sur la chaussée. Les carottes sont ensuite imprégnées, par le dessusd’une résine époxi jaune, puis par le dessous d’une résine époxi orange. La visualisation des pores des échantillons se fait enutilisant une lumière ultraviolet : ces résines étant fluorescentes.Afin de prendre les photos permettant l’analyse des pores, un dispositif de prises de vues a été réalisé (figure 1).

FIGURE 1 – Dispositif de prise de vue (d’après [3])

Ce dispositif comporte :— un support pour l’appareil photo avec une butée permettant de le repositionner toujours au même endroit— un support pour déposer la tranche de carotte avec une butée permettant de la repositionner toujours au même endroit— une lampe ultraviolet afin de rendre la résine fluorescente

La boîte étant opaque, les réglages de l’appareil photo (temps de pose, ouverture...) sont définis en mode manuel sur unéchantillon, puis, ne sont plus modifiés pour toutes les prises de vues des carottes suivantes. Le boitier utilisé est un Canon700 D de 18 Méga pixels (5184 x 3456) muni d’un objectif de 40mm (Canon).

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2 Mise en géométrie de l’éprouvettePour faire des mesures métriques dans les images, il faut déterminer les caractéristiques intrinsèques et extrinsèques de notredispositif. Les positions et les orientations de l’éprouvette et de l’appareil photo sont contraintes mécaniquement par desbutées : il n’y a pas de jeux et la caméra est face à l’éprouvette. La caméra se trouve à 20cm de l’éprouvette et les écarts depositionnement sont de l’ordre du mm : les erreurs de positionnement introduisent un changement d’échelle de l’ordre de0.5%.Concernant la distorsion, nous pourrions tout à fait la mesurer et la modéliser en utilisant les fondamentaux de la photogram-métrie grâce à des logiciels comme [4]. Nous avons choisi dans un premier temps de vérifier l’influence de la distorsion dansnotre dispositif. Pour cela, nous avons photographié un damier avec des cases de 1cm de côté, puis mesuré la surface descarrés à différents endroits de l’image en appliquant un unique facteur d’échelle pour passer d’une mesure en pixel à unemesure en cm ( 250 pixels ⇔ 1cm dans notre cas). La figure 2 présente l’image de la mire utilisée pour mesurer la distorsion.La non prise en compte de la distorsion entraîne une erreur de l’ordre du %, ce qui est négligeable dans le cadre de cetteétude (tableau 1). Le principal avantage de ne pas prendre en compte la distorsion est de faciliter les calculs pour passer de lagéométrie image à la géométrie terrain (pas de ré-échantillonage).

FIGURE 2 – Damier photographié par le dispositif

Min. Max. Moy. Ec. Type(cm2) (cm2) (cm2) (cm2)-0.016 0.004 -0.003 0.006

TABLE 1 – Écarts entre la mesure réelle (1 cm2) et la valeurmesurée

3 Détection des videsLa figure 3.a présente une photo prise par le dispositif d’acquisition. On voit nettement ressortir les pores hauts (en jaune),provenant de la résine injectée par le dessus et les pores bas (en orange), provenant de la résine injectée par le dessous. Lazone entre les 2 résines indique le front de colmatage : plus cette ligne est proche de la chaussée, moins le revêtement estperformant car il n’y a plus assez de pores libres absorbants les ondes sonores.Voici les étapes de l’algorithme permettant de détecter les pores :

1. mise en géométrie de l’éprouvette

2. passage du système RGB vers le système TSV (Teinte, Saturation, Valeur)

3. seuillage en fonction de la teinte

4. extraction des pores par résine

La mise en géométrie de l’éprouvette consiste à déterminer la pente moyenne de la chaussée (dessus de la carotte), puis detourner l’image afin que cette pente soit nulle. Pour cela, nous avons développé un algorithme qui cherche le contour de lachaussée, puis qui extrait les points hauts de ce contour et, enfin, calcule la pente passant par ces points.Une fois la mise en géométrie faite, il faut déterminer les grandeurs adaptées pour le seuillage. Pour cela, nous avons sé-lectionné quelques pores (moins de 5 en pratique) puis calculé les niveaux de teinte propre aux 2 résines. Les niveaux desaturation et valeur sont peu importants dans le processus de classement : le bitume et les granulats étant très sombres parcequ’ils ne sont pas fluorescents. Il suffit ensuite, pour chaque pixel de l’image, de vérifier s’ils ont les mêmes caractéristiquesque la résine jaune ou que la résine orange.La figure 3.b présente les résultats du traitement : les taches bleues correspondent aux pores communiquant avec la chausséetandis que les pores orange correspondent aux pores communiquant avec le sol. La zone entre les deux couleurs indique lefront de colmatage.

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a b

FIGURE 3 – Résultats de l’extraction automatique des pores. (a) image originale, (b) extraction des pores.

4 Premiers résultatsUne fois les pores extraits, on peut calculer les graphiques représentant la distribution des pores en fonction de la profondeurde la carotte (la profondeur 0 mm correspond à la surface de la chaussée). La figure 4 présente le graphique correspondant àl’extraction de caractéristiques de la carotte de la figure 3. Ce graphique permet de déterminer s’il y a un front de colmatageou pas et quelle est sa profondeur.

FIGURE 4 – Graphique présentant le nombre de pores en fonction de la profondeur.

5 Conclusion et perspectivesLa technique présentée dans cet article permet d’extraire rapidement et automatiquement des caractéristiques de carottes dechaussée (quelques secondes).La prochaine étape de ce travail est de faire fonctionner cet outil sur un ensemble de plusieurs centaines de carottes afin depouvoir comprendre le processus de colmatage et de pouvoir l’éviter, soit en modifiant la formulation de l’enrobé, soit endéveloppant des techniques de nettoyage des chaussées.

RemerciementCe projet est financé par la Commission pour la Technologie et l’Innovation (CTI, nouvellement innosuisse 1 ) : CTI-Projetno. 26081.1.La plupart des développement en traitement d’images ont été réalisés grâce à la bibliothèque OpenCV[2].

Références[1] Balmer, T., Steiner, F.. Altération acoustique d’enrobés phono-absorbants par colmatage- Mécanismes fondamentaux

Route et Trafic, pp 22-30, 03/2018.[2] Bradski, G.,The OpenCV Library, Dr. Dobbs Journal, 2000.[3] Chapuisod,V., Exploitation automatique des carottages de bitumes par traitements d’images, HEIG-VD : Travail de

bachelor, Yverdon-les-Bains, 2015.[4] Deseilligny, M. , Clery, I. APERO, an open source bundle adjusment software for automatic calibration and orientation of

set of images. ISPRS - International Archives of the Photogrammetry, Remote Sensing and Spatial Information Sciences,Volume XXXVIII-5/W16, pp 269-276, 2011.

[5] Laferrière,F. ,Beltzung, F., Mise en exergue et étude du colmatage des enrobés poreux, Route et Trafic, pp 34-38, 09/2017.[6] Steiner, F., Probst, S., Baisse de l’efficacité acoustique des revêtements phono-absorbants : causes, nouvelles méthodes

de mesure et solutions, Route et Trafic, pp 20-25, 11/2016.

1. https ://www.innosuisse.ch/inno/fr/home.html