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Réussir le partenariat stratégique: place à la postureLe modèle du partenaire stratégique revisité

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Réussir le partenariat stratégique: place à la postureLe modèle du partenaire stratégique revisité

© 2013 by jobindex media ag, Hofackerstrasse 32, 8032 ZurichT: 044 269 50 10, F: 044 269 50 11, [email protected], www.jobindex.ch

Conçu et imprimé en Suisse.

Cette œuvre est protégée par la loi sur les droits d’auteur. Toutes reproductions, notamment les photocopies, traductions, microfilms, stockage ou diffusion au moyen de systèmes électroniques sont interdites sans l’autorisation préalable de notre maison d’édition.

Ce fascicule reflète les expériences de ses auteurs, leurs observations au contact des conseillers en personnel et des gestionnaires de ressources humaines, sans oublier diverses recherches au niveau de la littérature spécialisée. Malgré tout le soin apporté à la réalisation de ce document, des erreurs ne peuvent être complètement exclues. Si l’éditeur et l’auteur ne peuvent assumer aucune responsabilité ni engagement juridique du fait d’indications fautives et de leurs éventuelles conséquences, ils seront néanmoins reconnaissants pour toute suggestion ou proposition d’amélioration.

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Daniel Held

Réussir le partenariat stratégique: place à la postureLe modèle du partenaire stratégique revisité

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Daniel Held est Dr ès sciences économiques. Il s’est formé en Suisse, en Allemagne et aux USA. Après une carrière de 12 ans dans des fonctions dirigeantes en Ressources Humaines dans des environnements internationaux, il a démarré son parcours de consultant, d’entrepreneur et d’enseignant en 1995.

Il dirige aujourd’hui le cabinet PI Manage-ment, qu’il a créé en 1999. Ce cabinet est spé-cialisé dans l’accompagnement managérial du changement (Empowering for Change). Il inter-

vient au niveau collectif (audits organisationnels, vision & stratégie), de l’équipe (adhésion, synergies, dynamique) et des individus (évaluations, accompagnement, orientation de carrière), pour que le changement soit un succès pour chacun.

Il a contribué à la mise sur pied de plusieurs cursus de formation et enseigne régulièrement dans plusieurs Hautes Ecoles, sur le partenariat stratégique, la stratégie RH, le pilotage stratégique, le leadership et l’accompagnement du changement. Il est l’auteur d’articles sur de nom-breux sujets RH, Carrière et Leadership (voir www.piman.ch – Publica-tions)Bilingue français-allemand, il travaille quotidiennement en anglais, il est marié et père de 4 enfants. [email protected], 079 202 40 13

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Tables des matières1. Introduction ...........................................................................................6

2. Un contexte qui réclame le partenariat stratégique .........................9

3. Le partenariat stratégique au-delà du modèle de Dave Ulrich ......12Un modèle qui a marqué son temps ...................................................12Un modèle qui a évolué ......................................................................16En quête de partenariat ......................................................................18

4. Le terrain de jeu du partenariat stratégique ....................................20Dimension stratégie et contribution à la création de valeur ................20Les dimensions du «terrain de jeu» stratégique ..................................21

5. Etre partenaire ....................................................................................33Modèle et posture du partenariat .......................................................33Devenir un acteur crédible et un partenaire incontournable ...............36Les obstacles au partenariat ...............................................................39

6. Un nouveau modèle pour la fonction RH .........................................43Un partenariat à établir avec diverses parties prenantes....................43Des rôles multiples à assumer pour chaque partie prenante .............44Réaliser les missions de la fonction RH ..............................................46DRH, rôle d’avenir ou mort annoncée? ..............................................55

7. Mettre en œuvre le partenariat stratégique .....................................56Les clés de la réussite .........................................................................56Une organisation adaptée ...................................................................57Les défis de la mise en œuvre ............................................................58

8. Perspectives .......................................................................................60

Bibliographie ...........................................................................................62

Sources ...................................................................................................63

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1. Introduction

La fonction Ressources Humaines (RH1) a connu, depuis la publication en 1996 du modèle de Dave Ulrich sur la création de valeur par les RH et les rôles de la fonction RH2, une évolution très importante, du moins dans les concepts et dans les structures organisationnelles. Le passage d’une fonction orientée opérations et processus vers un acteur stratégique, par-tenaire stratégique et agent du changement, constitue le cœur de cette transformation.

Le rôle stratégique des RH a pris de l’importance dans les réflexions et dans les travaux. Dans un contexte de plus en plus global, complexe et en mutation permanente, les aspects humains apparaissent plus que jamais comme décisifs pour permettre le déploiement de stratégies business orientées vers la performance. Dans un nombre croissant d’organisations, les Directeurs/trices RH ont été admis dans les comités de direction et ont tenté de faire évoluer la fonction d’un rôle de conseil et de support vers un rôle de partenaire. Les offres d’emploi intitulées «business partners» en témoignent. Des systèmes d’information RH puissants ont aussi été mis en œuvre.

S’il ne fait de doute pour personne que le capital humain constitue la ressource principale des organisations et de leur évolution – au travers notamment de leur capacité à apporter et à mettre en œuvre des innova-tions, à délivrer des résultats, à dépasser les attentes des clients, à susci-ter de l’émotion – la question qui reste posée ouvertement est celle de savoir si, au travers des changements engagés, la fonction RH a réussi à prendre sa place dans le processus de création de valeur, en tant que partenaire incontournable et recherché.

Les réponses à cette question semblent plus mitigées. Les Directions ressources humaines restent souvent cantonnées dans des rôles de ges-tion des processus RH, plutôt qu’elles ne sont invitées à participer aux discussions relatives à la stratégie d’entreprise et à sa mise en œuvre, la-quelle, comporte presque toujours une dimension humaine et organisa- tionnelle centrale. Pour beaucoup, le partenariat stratégique est mort. Cer-tains considèrent même déjà que la fonction RH est en décadence.3

Nos mandats d’accompagnement d’équipes RH et nos activités d’enseignement nous ont montré aussi l’énorme difficulté qu’il y avait à faire face à tout ce qui était attendu pour que la fonction RH existe dans

Toutes les références sont indiquées en page 63/64

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un rôle stratégique. Nous savons que le rôle de la fonction RH est certaine-ment dans l’entreprise le plus ambigu, le plus complexe, le plus diversifié qui soit. Il rend la mission de devenir partenaire stratégique tout en assu-mant l’ensemble des rôles dévolus extrêmement difficiles. Mais nous avons aussi constaté que la fonction RH avait beaucoup de difficultés à sortir de son propre rôle, de ses propres schémas, pour contribuer pleine-ment à la création de valeur et pour accompagner efficacement le busi-ness dans le changement. Il s’agit là d’une crédibilité insuffisante et d’une posture parfois inadéquate de la part des acteurs de la fonction RH.

Notre propre conviction a évolué mais n’a pas changé. RH doit contri-buer à la stratégie. Mais plus important encore, RH doit investir pleinement la posture du partenaire.

Le changement associé est d’envergure. Mais il nous semble accessi-ble au moment où, au prix d’une transformation en profondeur de la con-ception de son rôle, de ses processus et de l’environnement, donc de la posture à adopter, la fonction RH réussirait non seulement à exister comme acteur incontournable et reconnu, mais contribuerait surtout à aider les entreprises à faire évoluer leurs modes de fonctionnement, d’une manière cohérente avec les exigences d’un monde nouveau. Ce dernier, durable, complexe, global, diversifié, voire métissé, est un monde dans lequel les dangers économiques, environnementaux et sociaux n’ont jamais été aus-si grands. L’enjeu nous semble donc suffisamment fort pour mériter une lecture attentive de ce que nous vous proposons dans cet ouvrage. La démarche associée fait également l’objet de plusieurs outils et de modules de formation et d’accompagnement bien en place4.

L’ouvrage est conçu selon six volets:Le premier volet reprend plus en détail le contexte nouveau dans lequel nous évoluons et détermine pourquoi celui-ci réclame le partenariat stra-tégique (chapitre 2).

Le deuxième volet étudie notamment le modèle de Dave Ulrich, ses apports et ses limites, sa nouvelle version de 2007 et son impact sur les orientations à prendre aujourd’hui. Il pose les rôles de la fonction RH et les deux composantes du partenariat stratégique: la stratégie et le partenariat (chapitre 3).

Le troisième volet est consacré à la dimension stratégique RH, à la manière de faire vivre cette dimension au cœur de la stratégie d’entreprise et d’apporter sa contribution au niveau de la réflexion stratégique globale. Le terrain de jeu du partenariat stratégique y est exploré et décrit en détail, de la vision et du pilotage stratégique jusqu’à la manière d’intervenir au niveau humain et organisationnel (chapitre 4).

Le quatrième volet concerne la posture du partenariat et en quoi cette

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posture change vraiment la manière de voir, de vivre et de faire vivre la notion de capital humain dans nos organisations. Il explore aussi en détail les obstacles au partenariat (chapitre 5).

Le cinquième volet concerne le modèle que nous préconisons pour le partenariat stratégique, en termes de rôle et de manière de s’organiser et de prendre sa place (chapitre 6).

Le dernier volet concerne la mise en œuvre du partenariat stratégique, avec une réflexion succincte sur les questions d’organisation, d’indicateurs et de SIRH (chapitre 7).

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2. Un contexte qui réclame le partenariat stratégique

Beaucoup de choses ont changé dans notre environnement économique et social depuis les Trente Glorieuses, qui ont été marquées par une crois-sance forte et surtout par l’émergence de structures centrales très lourdes et bureaucratiques, de systèmes complexes et d’une perte de contrôle sur le processus de création de valeur.

Les années 80 ont été marquées aux Etats-Unis par le mouvement néo-libéral, accompagné par la dérégulation accélérée de toute une série de marchés. Ceci a obligé les organisations à mettre l’efficience et l’efficacité en tête de liste de leur agenda managérial.

En parallèle, la puissance de l’économie japonaise et ses démarches qualité et d’optimisation industrielle ont porté un coup très dur à de nom-breux secteurs, automobile, horlogerie, électronique et électroménager notamment.

Depuis cette période, les entreprises se sont focalisées très fortement sur la création de valeur, sur l’optimisation des processus, sur la maîtrise des coûts. Les fonctions Personnel de jadis, chargées avant tout de l’administration et de la cohésion sociale, ont évolué vers un rôle Ressour-ces humaines, centré sur une utilisation efficace des salariés et sur le dé-veloppement de leurs compétences par rapport aux exigences du monde des affaires.

La logique du court terme a également prévalu, avec une tendance à mettre la valeur actionnariale au-dessus des autres valeurs dans la hiérar-chie des priorités managériales.

Les grandes percées des années 90 ont concerné un certain rééquilibrage de ces priorités. Il est devenu évident que le fait de se focaliser uniquement sur la performance financière nuisait à la pérennité des organisations. Une meilleure compréhension du processus de création de valeur dans les ser-vices a conduit à mettre en avant l’importance de la maîtrise des proces-sus, de la satisfaction et de la loyauté des clients et de la capacité d’une organisation à évoluer (développement des compétences; qualité du lea-dership; agilité organisationnelle), pour assurer une performance financière durable. Ce processus, décrit par Heskett et al.5 dans les années 90, a accompagné d’autres innovations managériales majeures, dont le fameux «Balanced Scorecard»6, ou tableau de bord prospectif. C’est dans la même mouvance que se sont inscrits les travaux de Dave Ulrich sur la création

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de valeur par les RH, sur les rôles de la fonction RH et sur le leadership créateur de valeur.

C’est aussi au début des années 90 que se sont répandus le Business Process Reengineering7, les systèmes de qualité (ISO; EFQM) et les méthodes orientales d’efficience, telles que le Kaizen, les 5S ou le Lean manufacturing. Elles ont conduit à une capacité grandissante des organi-sations à optimiser les processus – un processus étant défini comme un ensemble d'activités corrélées ou interactives qui transforment des éléments d'entrée en éléments de sortie. Ce qui caractérise avant tout un processus, c’est la finalité, le plus souvent liée aux attentes d’un client.

Toutes ces démarches avaient pour but d’augmenter l’efficacité et l’efficience des systèmes, de simplifier et d’alléger des structures et fonc-tionnements trop complexes, de minimiser les coûts de production pour garantir des marges suffisantes pour une profitabilité de plus en plus gran-de attendue par le marché, et d’obtenir une qualité de plus en plus homo-gène des produits et prestations. Les systèmes d’information intégrés ont aussi commencé à se déployer à large échelle durant ces années-là.

Ces évolutions majeures dans les systèmes de management se sont ins-crites dans deux grandes tendances:

illimité et surtout alimenté par le potentiel extraordinaire de la Chine et plus généralement de l’Asie, dans une moindre mesure des pays émer-gents d’Amérique latine, d’Afrique et du Moyen-Orient;

-tions à tous les niveaux: avec les clients et le marché (e-commerce; com-munication; réseautage; nouveaux services; nouveaux canaux de vente; nouvelle concurrence); avec les partenaires; en interne dans l’organisation (e-mails; intranets).

Le monde de 2013 n’a donc plus grand chose à voir avec celui des Trente Glorieuses, pas beaucoup non plus avec celui des années 80 ou 90.

Le 21ème siècle est arrivé, avec son lot de changements structurels et organisationnels, avec son lot aussi d’attentes nouvelles face au monde de la consommation, face à l’emploi et à la carrière.

Ce monde ne se contente plus d’une orientation résultats ou de la ré-ponse à des exigences opérationnelles fortes (efficience, qualité, délais, ...). Tout en poursuivant son chemin vers l’optimisation et l’excellence opé-rationnelle, il doit réussir à y intégrer celui de l’innovation, la généralisation de partenariats en interne et en externe, un fonctionnement en mode pro-jet, des structures matricielles, ... Autant dire de la complexité et des lo-giques diverses qui doivent cohabiter.

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Les exigences de compétences sont aussi en forte augmentation: plus précises, plus urgentes. La concurrence sur les talents augmente, les questions associées à l’employabilité, à la durabilité de la performance, des compétences et de la motivation également.

Les organisations se trouvent donc confrontées à des exigences mul-tiples, devant intégrer des contraintes de plus en plus nombreuses et diversifiées de la part des parties prenantes et faire cohabiter des popula-tions de plus en plus métissées. Tout ceci dans un climat d’incertitude permanent et de changement qui s’accélère.

Ces défis sont ceux des organisations, de leur management et de la fonction RH.

En d’autres termes, le contexte avait évolué avant les années 90. Il a évolué encore davantage depuis.

RH ne peut exister dans cet environnement que s’il y trouve sa place, s’il arrive à apporter de la valeur dans la mise en œuvre de ces démarches et contribue à garder du sens et de la cohérence dans le système:

l’engagement (motivation, performance) et des compétences de leurs équipes;

dans une stratégie, des politiques et processus qui sont simples, perfor-mants et adaptés à leurs besoins;

-nus dans leur mission, qui devient chaque année un peu plus difficile et plus impliquante.

La fonction RH n’a pas d’autre avenir que de devenir le partenaire in-contournable des directions et des managers pour réussir à réaliser les objectifs et à développer l’organisation et le capital humain dans un con-texte de plus en plus exigeant et concurrentiel. Ou de disparaître.

A retenirDans un environnement de plus en plus complexe et incertain, on attend de la fonction RH qu’elle devienne un partenaire incontournable des managers, pour les aider à réussir leurs objectifs et à développer l’organisation et le capital humain de manière performante et cohérente. Ce rôle est crucial, exigeant mais ne va pas de soit, car il s’agit d’exister dans l’espace des managers comme un partenaire qui amène de la valeur, apporte des solutions, facilite le travail dans un cadre donné, et pas comme un acteur qui impose des processus et des limites.

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3. Le partenariat stratégique au-delà du modèle de Dave Ulrich

Un modèle qui a marqué son temps

L’idée de la fonction Ressources Humaines (RH), partenaire stratégique, a été vraiment lancée par Dave Ulrich au milieu des années 90, à l’occasion de la publication de son ouvrage Human Resources Champions8. Son modèle s’inscrit dans l’ensemble des travaux réalisés à cette époque autour de la création de valeur. La fonction RH ne devait pas manquer cette opportunité de conquérir une place essentielle, le capital humain étant clairement un facteur déterminant en la matière.

L’apport majeur de Dave Ulrich consiste à avoir montré que la fonction RH est une fonction complexe, dont l’action s’exerce autant au niveau stratégique qu’opérationnel, au travers de processus et d’une interaction avec les Hommes. Ceci a permis de définir quatre rôles, chacun d’entre eux ayant sa logique, sa finalité, ses exigences.

Dave Ulrich a montré au travers de ce modèle à la fois très simple à comprendre mais très impliquant à mettre en œuvre que la fonction RH avait un gros effort à fournir en matière de positionnement, de com-pétences, d’organisation et de processus pour pouvoir assumer l’ensemble de ces rôles. Egalement qu’aucun acteur ne peut prétendre à lui seul exceller dans chacun d’entre eux.

Partenairestratégique

Acteur duchangement

Championdes salariés

Opérationnel/Quotidien

Processus Hommes

Stratégie/Futur

Expertadministratif

Figure 3.1.: Le modèle de Dave Ulrich (1997)

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Les rôles concernés sont les suivants:Au niveau opérationnel:

clients internes et externes, qui doit assurer une maîtrise parfaite des processus (expertise dans toutes les questions juridiques, administra-tives et financières, dans leur contenu et dans leur exécution (qualité et efficience).

employeurs-employés, de s’assurer aussi des conditions qui permettent aux salariés de s’épanouir.

Au niveau stratégique:

l’accompagnement des changements organisationnels, avec des com-pétences de consultant interne, d’analyste des résistances, de commu-nication, de mise en œuvre.

entière à l’élaboration de la stratégie business et à l’intégration au sein de celle-ci des composantes humaines et organisationnelles, ainsi qu’à sa mise en œuvre.

Outre la diversité des rôles, Dave Ulrich a réussi à montrer que la fonction n’évoluerait pas si elle n’avait pas la maîtrise parfaite, dans une logique d’efficience, d’efficacité et d’orientation clients, de ses processus de base, pour sa propre crédibilité et sa contribution à la performance économique de l’organisation.

Il a également mis en évidence que la fonction RH devait devenir un acteur crédible sur le plan stratégique à deux niveaux: dans la contribution à la stratégie et à la déclinaison de celle-ci au niveau RH; dans son rôle d’agent de changement, pour accompagner et faciliter des évolutions or-ganisationnelles et culturelles qui étaient déjà nombreuses à cette période.

Ce modèle a eu un impact majeur sur la plupart des organisations:

opérationnelle, processus et relationnelle, qui ne cohabitent pas toujours très bien, l’opérationnel prenant souvent le dessus sur le stratégique, les processus sur le relationnel.

l’ensemble des acteurs.

solutions indispensables pour devenir un expert administratif et pour mettre à la disposition des acteurs clés (notamment business partners

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RH et managers) les informations et tableaux de bord indispensables pour pouvoir gérer de manière efficace et efficente les collaborateurs, leur performance, leur carrière, leur développement, en tout lieu et à tout moment.

avec des collaborateurs en contact direct avec le «business», d’un autre côté pour disposer d’une expertise pour des prestations pointues (re-crutement, évaluations, conseils de carrière, formation) et pour les prestations administratives et opérationnelles de base (contrats, paie, assurances sociales, SIRH). A ce propos, il a généralisé la notion de centre de services, elle aussi dans l’ère du temps, avec l’émergence des services partagés, en incitant les grandes organisations à regrouper leurs compétences en la matière en des lieux permettant de recruter les bonnes compétences au moindre coût.

d’activités liées à leur relation d’emploi, telles que la gestion des ab-sences, la mise à jour de leurs données personnelles, le développement de leurs compétences (libres services RH, solutions e-learning).

permettent de gérer de manière plus professionnelle leurs ressources humaines (outils informatisés pour soutenir les processus et pour accéder en temps réel à la plupart des données).

indispensables, pour disposer d’une expertise importante en matière de veille, de pilotage, de définition de stratégies, de mise en place des pro-cessus performants et d’accompagnement du changement.

Ces apports sont majeurs et ont justifié largement la réputation mondiale que Dave Ulrich a acquise à cette occasion.

Les fonctions RH ont profondément évolué durant ces années, s’équipant notamment très largement de solutions informatisées souvent très performantes, créant lorsque c’était possible des centres de service voire d’expertise, formalisant largement leurs processus et transformant leurs conseillers RH en «Business partners».

La fonction RH est-elle pour autant pleinement reconnue comme un partenaire incontournable de la Direction générale et des principaux acteurs du Business? Est-elle reconnue comme incontournable pour la création de valeur?

A ces questions, les réponses sont le plus souvent négatives:

leurs équipes de Direction, mais souvent décident encore sans elles9;

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impliqués dans la mise en œuvre du changement et de la stratégie, mais rarement dans l’initiation et le pilotage de ces derniers10.

Nous voyons à cela deux raisons majeures:-

lué durant ces dernières années, avec une augmentation encore plus rapide des attentes pour gérer la complexité, la globalisation, le change-ment et un bon nombre de paradoxes managériaux aussi. S’appuyer sur un modèle des années 90 n’est peut-être plus suffisant aujourd’hui.

limites majeures et a conduit à porter l’accent sur certains points et pas sur d’autres qui à nos yeux étaient au moins aussi importants sinon plus. Il a conduit aussi à certaines dérives qui n’ont pas toujours été corrigées.

Les limites du modèle de Dave Ulrich méritent d’être décrites en détail, pour pouvoir les dépasser:

SIRH associés, a mobilisé énormément d’énergies et de ressources, li-mitant la possibilité d’agir sur d’autres fronts. Elle n’a surtout pas contri-bué à changer l’image de la fonction, qui reste dans cette perspective d’abord un gestionnaire de paie, de contrats, de présence ou d’absence, de temps passés et de processus pilotés par le management. Donc en fait, même avec une informatique sophistiquée, une image d’acteur certes indispensable, mais pas incontournable.

fonction RH n’ont de sens que si les attentes des principales parties prenantes sont prises en compte. Par exemple, si l’on peut considérer que la direction et les principaux départements existent au travers des rôles stratégiques, et l’organisation au travers des rôles opérationnels, les managers et les collaborateurs n’existent que très imparfaitement dans le secteur «champion des salariés». Trop évident? Peut-être, mais c’est bien là que l’échec du modèle a été le plus fort:

– parce que la qualité du management et le partenariat avec eux n’a pas fait l’objet d’une réelle démarche, la relation passant encore et toujours par des systèmes et processus, ou par des conseils et du soutien;

– parce que le besoin des collaborateurs de disposer d’un partenaire de confiance dans les organisations, en dehors de la relation mana-gériale qui globalement s’est plutôt tendue dans les phases d’incertitude, n’a pas été correctement pris en compte, des «call

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centers» ou des self-services ayant été proposés comme principale solution, avec des interlocuteurs RH de plus en plus proches du management – donc souvent considérés comme peu crédibles.

eux de rester dans leur zone de confort, sur le terrain qu’ils maîtrisaient le mieux: celui des opérations, ou alors celui de la relation politique. Ils ont peu investi les rôles plus sensibles pour le business et la création de valeur.

capital humain avait disparu, au profit d’une seule notion, celle de cham-pion des salariés, qui est une notion très orientée défense des collabora-teurs et relations syndicales.

et pas relationnelle. Or, qui dit partenariat stratégique, dit deux choses: partenariat – donc relation – et terrain de jeu stratégique. Le positionne-ment du côté processus de ce rôle lui a donné une connotation techno-cratique, impersonnelle, qui n’a guère contribué à modifier l’image opérationnelle de la fonction.

par la plupart des Directeurs RH comme un rôle de soutien, d’accompagnement, largement aussi comme celui d’assumer les consé-quences de décisions prises ailleurs. Or le terme d’agent de changement comprend l’initiation de ceux-ci, de manière à ce que les organisations fonctionnent mieux, intègrent mieux les défis business et humains, soient de véritables forces de proposition concernant la manière de répondre le mieux aux attentes des clients, d’innover, de créer plus de valeurs avec plus de plaisir. En se mettant dans le rôle d’exécution de décisions sou-vent douloureuses, en accompagnant avant tout la souffrance et les frustrations, RH s’est imposé comme indispensable pour colmater les problèmes occasionnés par la course à la rentabilité, pas pour inventer une manière plus efficace et plus humaine de gérer les entreprises.

Un modèle qui a évolué

Dave Ulrich s’est rendu compte d’une bonne partie des limites que nous avions identifiées dès la fin des années 1990. L’ouvrage publié en 2007 (version française en 2010) avec N. Brockbank11, compense une partie des limites que nous avions constatées (figure 3.2):

ce qui permet d’ancrer un vrai rôle stratégique RH où l’humain et les processus sont intégrés logiquement dans une seule et unique réflexion et action.

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-tègre de manière surprenante avec celle de défenseur des salariés. Le rôle des managers n’est toujours pas explicite.

-nel, notion plus large mettant en avant les nombreuses expertises néces-saires dans la fonction.

ture, des comportements et attitudes des membres de la fonction RH pour prendre pleinement leur place dans l’organisation. Nous regrettons qu’elle apparaisse un peu comme un fourre-tout de tout ce qui n’a pas sa place ailleurs, par exemple au niveau gouvernance et pilotage de la communauté RH.

Figure 3.2.: Comparaison des deux modèles «Ulrich».

Evolution des rôles RH pour Ulrich et Brockbank

Les employés sont de plus en plus critiques pour la réussite des organisations. Les DE se concentrent sur les employés dans l'état actuel; les DC sur la préparation de l'avenir.

Les pratiques RH sont centrales en ce qui concerne la valeur RH. Certaines pratiques RH sont fournies par le biais de mesures administra-tives efficaces (par ex. technologie); d’autres, par des politiques et interventions qui élargissent aussi le rôle d’«expert fonctionnel».

Un partenaire stratégique possède à ce titre, de nombreuses dimensions: homme d'affaires, agent du changement, manager du savoir et conseiller/consultant. Le rôle d’agent du changement ne représente qu’une petite partie de la fonction de partenaire stratégique.

Comme ci-dessus.

La somme des quatre premiers rôles représente le leadership. Mais la fonction de leader RH a également d’autres implications: diriger la fonction RH, collaborer avec les autres fonctions, garantir la gouvernance de l’entreprise et assurer le contrôle en continu de la communauté RH.

Milieu 2000

Défenseur des employés (DE), développeur du capital humain (DC)

Expert fonctionnel

Partenaire stratégique

Partenaire

Leader

Milieu 1990

Champion des employés

Expert administratif

Agent du changement

Partenaire stratégique

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Ce modèle constitue une réelle avancée. Mais son impact n’a rien à voir avec celui du premier modèle. On se réfère encore et toujours prioritaire-ment au modèle de 1996, avec des conséquences importantes sur l’avenir de la fonction: celles de prôner le partenariat stratégique mais de ne pas se donner le moyen de l’habiter vraiment.

En quête de partenariat

La littérature RH inclut de plus en plus la notion stratégique, qui a envahi l’ensemble des sujets, hormis les questions pratiques de traitement des situations RH au quotidien12.

La contribution des RH à la création de valeur reste pourtant un sujet largement débattu, sans réponse claire. Les sujets RH sont de plus en plus traités par les Directions. Mais nombreuses sont celles qui pensent pouvoir se préoccuper d’elles sans avoir forcément besoin d’impliquer la Direction RH dans les discussions stratégiques. La dimension stratégique des res-sources humaines comme leur rôle clé n’est pas en question. Ce qui l’est, c’est la capacité de la fonction RH de devenir un acteur incontournable du pilotage stratégique des organisations. Donc un vrai partenaire straté-gique.

Dans la notion de Partenariat stratégique, nous trouvons en effet les deux composantes que nous allons développer dans les deux chapitres suivants:

Stratégique: une fonction qui contribue à l’élaboration de la stratégie business et à sa mise en œuvre, de telle sorte qu’elle soit comprise et relayée par les acteurs concernés; contribue aussi pleinement à la créa-tion de valeur. Parce que tout ce qui concerne le domaine des ressour-ces humaines, ou presque, s’inscrit dans une perspective stratégique, celle du temps et de l’espace. Les ressources humaines sont un capital, un investissement, qu’il s’agit de faire fructifier tout au long du cycle de vie. Ce sujet est traité au chapitre 4. Un partenaire: un interlocuteur de même niveau avec qui la direction générale coopère, qui prend sa place sans prendre celle d’un autre, qui adopte une posture qui en fait un partenaire reconnu, influent et incon-tournable. Ce sujet est traité au chapitre 5.

La notion de partenaire stratégique, souvent banalisée voire décriée, se révèle dans la pratique d’une puissance rare. Reste à lui donner le sens qu’elle mérite.

La grande majorité des initiatives lancées par les académiciens comme par les consultants concernent l’excellence des concepts, processus et

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outils. Ils ne concernent quasiment jamais les schémas comportementaux et la posture même des acteurs RH, qui sont à notre avis au moins aussi importants que les contenus stratégiques pour faire évoluer le sujet. Et apporter cette fois la vraie valeur ajoutée attendue.

Pourquoi évite-t-on le plus souvent cette question? Probablement par-ce que le sujet de la posture et des comportements est très subtil, qu’il dépasse souvent les capacités d’évaluation et de développement des compétences des modèles actuels. Mais aussi parce que le sujet est par définition inconfortable, puisqu’il pourrait nous amener à faire plus que d’acquérir des compétences supplémentaires: devoir soi-même changer, évoluer, en partant du principe que pour devenir un acteur incontournable, il faut commencer par soi-même pour donner à l’autre l’envie de nous considérer, de nous inviter, de nous impliquer au bon moment et au bon niveau.

A retenirLa fonction RH assume des rôles de nature différente, qui concernent autant le stratégique que l’opérationnel, les processus/structures que le relationnel. Ceci lui donne un terrain de jeu considérable, dans lequel il n’est pas facile de prendre sa place. Avec deux composantes bien définies: celle du stratégique et celle du par-tenariat. Le concept qui ressort des apports de Dave Ulrich et de nombreux autres auteurs, parce qu’il émane avant tout des besoins des organisations, c’est celui du posi- tionnement de la fonction au niveau stratégique et de la gestion du changement. Ce positionnement est à conquérir.Les actions mises en œuvre doivent aussi bien davantage concerner la valorisa- tion et le développement du capital humain des organisations, thème concep- tuellement au cœur des préoccupations mais auquel étonnamment on consacre peu d’énergie et par rapport auquel on développe peu de compétences, au-delà de la gestion de la formation et de référentiels souvent lourds et inutiles. On in- vestit peu pour permettre aux individus de connaître, reconnaître, développer et valoriser leurs vrais talents. La fonction RH doit aussi changer de posture, pour assumer un véritable leader-ship sur les sujets ressources humaines, de manière à apporter plus de valeur ajoutée mais surtout à être reconnue comme un partenaire crédible et incontour-nable.

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4. Le «terrain de jeu» du partenariat stratégique

Dimension stratégie et contribution à la création de valeur

Parler et agir en termes stratégiques se révèle souvent difficile. Or le do-maine des ressources humaines s’inscrit par définition dans le temps, donc comporte en soi une dimension stratégique: il faut en général plu-sieurs mois pour concrétiser un recrutement, qui devrait déployer ses effets durant plusieurs années; une relève se prépare elle aussi sur 3 à 10 ans; un changement organisationnel et culturel nécessite 3 à 5 ans pour être pleinement mis en œuvre; l’équilibre de vie comme l’employabilité sont des notions qui concernent la stratégie de carrière de chaque indivi-du, pour pouvoir répondre durablement aux attentes, avec plaisir.

On pourrait allonger cette liste. Elle nous semble suffisamment con-vaincante pour confirmer la portée stratégique de la majorité des sujets qui concernent le capital humain.

En termes de création de valeur, la démonstration est tout aussi facile. Tous les grands managers ont reconnu que, sans leurs équipes, ils ne pouvaient rien. La valeur ajoutée économique a toujours été le résultat d’innovations, qui ont été concrétisées dans des activités de production et de commercialisation. Toutes ces activités sont pilotées et mises en œuvre par des «ressources humaines», avec l’aide de systèmes et outils parfois sophistiqués.

Certes, à l’exception des grands clubs sportifs, qui mettent leurs joueurs aux bilans, le capital humain n’est pas visible directement dans les comptes des entreprises, notamment parce que les cadres et les collabo-rateurs sont libres de quitter leur entreprise quand ils le souhaitent.

Mais la valeur du capital humain est quand même prise en compte d’une certaine manière dans les capitalisations boursières, parce qu’on reconnaît une performance actuelle ou des promesses de performance future, parce qu’on reconnaît un management de qualité, une stratégie d’innovation et de développement des affaires, une image d’employeur dynamique et responsable de plus en plus aussi.

Contrairement à ce que l’on entend souvent, la question n’est pas du tout celle de savoir si la notion de capital humain existe, ou si les talents managériaux ou autres sont clés pour la création de valeur. La réponse positive à ces questions est admise universellement, ou presque.

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La question qui se pose est celle de la contribution décisive de la fonction RH à cette création de valeur: les directions et les cadres deviennent-ils plus performants, plus puissants grâce à un partenariat avec RH, ou est-ce le contraire? Les acteurs RH sont-ils capables d’enrichir la réflexion stra-tégique autrement que par des mises en garde concernant les risques humains? Arrivent-ils à se projeter positivement dans le temps et dans l’espace, à anticiper les événements, à être ceux qui voient le chemin à prendre plutôt que les obstacles insurmontables, à contribuer à dévelop-per en amont les concepts, solutions et les actions à entreprendre pour être prêts à temps face aux défis nouveaux rencontrés?

Répondre à ces questions nous amène à redéfinir le «terrain de jeu» du partenariat stratégique.

Les dimensions du «terrain de jeu» stratégique

Le terrain de jeu du partenariat stratégique n’est pas celui des processus RH, loin s’en faut. C’est sur le terrain de la stratégie, du business, des structures, de l’innovation, du changement et du leadership notamment que cela va se jouer. Le partenaire stratégique, pour être un acteur crédible et incontournable, doit donc parler le langage du business, agir sur ce terrain-là et se passionner pour le succès de l’entreprise et des hommes et des femmes qui la développent et la font vivre au quotidien.

Il doit donc dépasser le terrain de jeu et le discours qu’il considère comme étant le sien, celui des politiques et des processus RH. Ceux-ci ne sont pas une fin en soi, mais doivent être un moyen pour donner de la puissance, de la cohérence et du concret aux stratégies et actions en cours.

Dans cette section, nous aimerions explorer toutes les composantes de ce terrain de jeu exigeant mais combien passionnant qui doit être celui du partenaire stratégique.

La création de valeurSauf exceptions (notamment les organisations créées pour des projets, événements ou pour un «coup»), toutes les organisations visent à assurer leur pérennité et la satisfaction durable de leurs parties prenantes: en réa-lisant un profit maximal (entreprises cotées) ou adapté (autres entreprises); en respectant le budget (public); en répondant aux attentes des parties prenantes en termes de valeur ajoutée, de mission remplie, de réponse aux besoins exprimés pour les autres acteurs.

Cette pérennité peut être assurée si les clients, partenaires, prestataires ou fournisseurs sont satisfaits et ont durablement envie de poursuivre leur

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collaboration avec l’organisation concernée: parce que les produits et les services sont de qualité, répondent aux besoins et sont gérés de manière à ce que les clients/bénéficiaires se sentent en confiance avec les presta-tions fournies.

Outre la qualité du produit, c’est donc la qualité du service qui sera en cause. Dès que l’organisation dépasse une certaine taille, il devient essen-tiel de bien définir les processus pour s’assurer que la qualité ne dépende pas du bon vouloir d’un individu ou d’un autre. Mais il faut surtout disposer de collaborateurs qui font plus que d’appliquer les directives et de mettre en œuvre les comportements appris: des collaborateurs qui sont com-pétents et qui ont envie d’exploiter le terrain de jeu qui est le leur pour que les clients se sentent respectés, valorisés et stimulés par la relation et les prestations. Ils ajouteront un peu d’émotionnel au rationnel d’un processus optimisé13.

C’est le but ultime que doit poursuivre la fonction RH: celui de disposer de collaborateurs engagés (qui ont envie de tout mettre en œuvre, avec plaisir, pour atteindre les objectifs de l’entreprise) et compétents (qui ont la capacité à agir comme acteurs performants et responsables). Cet objectif doit, d’une manière ou d’une autre, être formulé dans la vision RH de l’organisation, en utilisant les termes adaptés au métier et à la culture. Cette vision ne devrait pas faire l’objet de compromis. Elle est à la base de l’excellence à tous les niveaux. Cet objectif doit être porté par la Direction et les organes de gouvernance comme la finalité ultime.

Et si l’on pose une telle exigence managériale au niveau de la perfor-mance humaine de l’organisation, cela implique de disposer de managers qui prennent leurs responsabilités et ont les compétences attendues, et d’une fonction RH qui puisse mettre à disposition un cadre adapté (poli-tique, processus, outils) pour permettre aux managers de gérer et dévelop-per plus facilement et plus efficacement leur capital humain.

La figure 4.1, adaptée légèrement de la version originale de Peskett (1994), reflète bien ce que nous venons d’exprimer. Il est à nos yeux le modèle de référence pour aider la fonction RH à définir son terrain de jeu.

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Figure 4.1.: Le processus de création de valeur

La figure 4.2 illustre la manière dont, à notre avis, la fonction RH partenaire stratégique doit contribuer à la création de valeur: dans le cadre de la vision, des valeurs et de la stratégie qu’il s’agit de partager, définir une stratégie RH qui permette d’influencer, au travers du leadership et des processus de gestion RH, l’engagement, la compétence et finalement les capabilités14, c’est-à-dire les facteurs qui vont faire la différence pour la performance, l’agilité et la capacité d’innovation d’une organisation. Les capabilités sont la combinaison des compétences clés (savoir-faire) de l’entreprise avec sa puissance humaine (leadership, engagement, com-pétences). Ce sont les facteurs qui intéressent au premier chef les Direc-tions générales, et sur lesquelles il s’agit donc d’apporter une contribution reconnue.

Dans les sections suivantes, nous allons examiner chaque niveau de cette pyramide, en commençant par le bas. Cet examen demeure très succinct, vu la finalité de cet ouvrage. La plupart mériteraient un chapitre à eux tout seuls pour être taités suffisamment en profondeur afin de pou-voir être utilisés en pratique.

Assurer la «shareholder value» et la pérennité des organisations

La satisfaction et la loyauté des clients

La compétence et l’engagement des collaborateurs

La qualité du leadership et une GRH orientée valeur ajoutée

Source: Heskett et al., Putting the Service Profit Chain to work, HBR 1994Repris et modifié par Held (2001)

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Figure 4.2.: Comment le partenariat RH peut contribuer à la création de valeur durable

Les capabilitésLes capabilités, que nous avons définies ci-dessus, concernent trois do-maines principaux (tableau 4.1):

des acteurs sur les objectifs et la stratégie; capacité à optimiser les pro-cessus et à maîtriser les coûts; gestion de projets et processus transver-saux;

-veloppement permanent et ciblé des compétences collectives, l’amélioration continue et l’innovation;

interne et en externe: la capacité à gérer et à développer des relations clients claires et cohérentes; l’esprit client en interne qui conduit à rendre la collaboration efficace et stimulante; l’esprit de corps et la fierté d’appartenance qui permet d’être ambassadeur de l’entreprise (pour ses produits et comme employeur).

Pilotagestratégie

Vision, stratégie,valeurs

Leadership

Processus RH créateurs de valeur –Individus responsables et acteurs

Compétence

Engagement

Capabilités

Parte

naria

t RH

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L’importance relative de chaque dimension et surtout le sens exact qu’elle prend dépend spécifiquement de la stratégie propre à chaque entreprise.

Ces capabilités ne vont pas de soi. Elles présupposent toutes une forte implication managériale. Mais toutes concernent aussi les collaborateurs, parce que ce sont eux qui vont rendre ces capabilités visibles et impac-tantes au quotidien.

Pour pouvoir être considérée comme de vrais partenaires pour le suc-cès de l’entreprise, la fonction RH doit apporter sa part au niveau du dé-ploiement de toutes ces capabilités. Toutes ont une dimension RH. Mais aucune n’est un processus RH. La clé du partenariat réside donc dans la capacité à apporter une contribution qui soit perçue comme positive, voire incontournable à ce niveau, naturellement! Notamment en comprenant mieux les facteurs de l’engagement, les clés du développement des com-pétences et ceux du leadership.

L’engagementL’engagement, c’est lorsque les collaborateurs mettent, avec plaisir, leurs compétences et leur énergie au service des objectifs de l’organisation. Il peut être décomposé en 3 composantes clés (tableau 4.2):

Celle-ci présuppose que les objectifs et les responsabilités de chacun sont clairs et stimulants, que les collabora-teurs peuvent compter sur des moyens et une organisation adaptés et efficients qui leur proposent des terrains de jeux impliquant et facilitant la reconnaissance. Elle présuppose aussi que leur action s’inscrive dans un tout cohérent (alignement horizontal, vertical et temporel).Motivation à progresser: Celle-ci présuppose une dynamique qui per-mette à chacun de progresser et de contribuer à faire progresser l’organi-

Performance organisa-tionnelle

Alignement des acteurs sur les objectifs et la stratégie

Optimisation des processus et des coûts

Gestion des projets et des processus transversaux

Développement organi-sationnel

Développement des com-pétences individuelles

Amélioration continue de l’organisation, des processus et de la qualité

Innovation

Cohérence culturelle et dynamique relationnelle

Gestion des relations clients

Esprit client interne

Esprit de corps et d’appartenance

Tableau 4.1: les principales capabilités pour le succès durable des organisations

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sation. Elle comprend une volonté de chacun d’apprendre en perma-nence pour son métier et sa carrière, d’apporter sa contribution à l’amélioration continue de la qualité et de l’organisation et une dyna-mique favorisant l’innovation à tous les niveauxLoyauté active et volontaire: Celle-ci présuppose que les collabora-teurs se sentent à l’aise au niveau des valeurs véhiculées et vécues au quotidien, dans les relations avec les clients et partenaires autant exter-nes qu’internes et dans leur statut de collaborateurs. Ce sont les ingré-dients clés d’une loyauté active et volontaire. Pouvant partir, les talents de l’entreprise décident de rester non par confort mais par choix. Ils sont des ambassadeurs actifs de l’organisation en tant que productrice ou prestataire de services et en tant qu’employeur.

Motivation à contribuer

Objectifs et responsabili-tés clairs et stimulants

Organisation et moyens adaptés et efficients (terrains de jeu) relations positives avec les clients et partenaires en interne

Cohérence verticale, horizontale et temporelle

Motivation à progresser

Volonté et possibilité d’apprendre et d’assurer son employabilité

Volonté et possibilité de contribuer à améliorer la qualité et l’organisation

Volonté et possibilité d’apporter des idées novatrices et de les concrétiser

Loyauté active et volontaire

Adéquation active avec les valeurs vécues dans les relations envers les clients et partenaires externes

Adéquation active avec les valeurs vécues dans les relations avec les clients et partenaires en interne

Adéquation active avec les valeurs vécues en tant que collaborateurs

Tableau 4.2 Les principales composantes de l’engagement

Les facteurs de l’engagement peuvent être regroupés en 4 grandes caté-gories:

dans l’équipe)

15.L’engagement est le résultat conjoint des actions du leadership et de la politique RH. On peut mesurer ces éléments de manière très concrète,

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autant dans une perspective rationnelle et analytique (qualité perçue – dans quelle mesure la politique RH et les actions managériales répondent-elles aux attentes que l’on peut avoir en tant que collaborateur pour avoir envie d’apporter sa contribution?) que dans une perspective de vécu émo-tionnel (valeur perçue – comment ces dimensions sont-elles vécues et quelle importance subjective leur accorde-t-on?).

Comprendre les facteurs de l’engagement présuppose de pouvoir me-surer de manière précise et fiable l’impact des actions managériales et de la politique RH, les forces et les déficits en la matière, pour identifier les leviers prioritaires à activer (par exemple dans le cadre d’une enquête d’engagement dûment conçue dans ce but).

Mieux les acteurs RH comprendront les tenants et les aboutissants de l’engagement, mieux ils travailleront avec les managers pour adapter la politique RH mais surtout pour améliorer l’impact de sa mise en œuvre. Parce que l’engagement reflète finalement la santé de l’entreprise, à tous les niveaux, et conditionne la réussite de la mise en œuvre de la stratégie.

La compétenceLa compétence est définie comme une capacité à agir, reposant sur un savoir, un savoir-faire, un savoir-être et un savoir-devenir. La compétence peut être appréhendée selon des modèles très différents, en fonction des perspectives et des finalités choisies.

Les compétences techniques et professionnelles notamment sont à définir et valider de manière spécifique au sein de chaque organisation, parce qu’elles sont souvent le cœur d’un métier, d’une expertise, d’une différence.

Les autres compétences concernent la capacité à appréhender un en-vironnement et à résoudre des problèmes, à agir et à réaliser, à influencer les acteurs et à s’adapter à son environnement humain et matériel. Pour cela, nous proposons de nous appuyer sur un modèle éprouvé et dont l’architecture permet une adaptation spécifique par rapport à n’importe quel référentiel d’entreprise. Elles sont en lien avec la personnalité et les traits de caractères, mais ne se résument pas à cela. C’est l’usage que l’on est capable d’en faire qui se révèle déterminant.

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La compétence en tant que capacité à agir est le résultat conjoint de l’action RH (formation, coaching) et de la hiérarchie (application pratique, expérimentation, feedback quotidien, conditions cadres). Elle s’exprimera si les capacités (savoirs, savoir-faire, savoir-être) ont été développées et si les conditions sont réunies pour leur manifestation (vision partagée, res-ponsabilisation positive, moyens adéquats, reconnaissance adaptée). Une vision commune entre RH et la hiérarchie de cette capacité à agir telle que nécessaire pour la mise en œuvre de la stratégie constitue une base solide pour le renforcement du partenariat stratégique.

Des processus RH créateurs de valeursLes processus RH n’ont pas de sens en soi. Ils existent pour assurer une valorisation optimale du potentiel humain dans la durée en lien avec les objectifs de l’organisation. Ils visent à faciliter le travail du manager et des collaborateurs et à assurer une cohérence de l’ensemble.

Les processus principaux qu’il s’agit de déployer de manière optimale concernent:

-ment, de la définition des rôles et la fixation d’objectifs à l’évaluation et à la reconnaissance de la performance;

-ment, au niveau des rôles (attentes actuelles et futures en termes de compétences) et des individus (compétences maîtrisées et souhaitées), de leur évaluation et de leur développement;

nécessaires en temps et en heure et à la relève, par promotion ou mobi-lité interne, par recrutements externes; également par de la flexibilité (par exemple auxiliaires) et la gestion des sorties pour ajuster les effectifs et compétences aux besoins organisationnels.

Ces processus présupposent l’implication active de l’encadrement, qui seul peut être responsable de leur utilisation efficace au quotidien avec ses

Résolution de problèmes

Evaluation

Recherche de solutions

Innovation

Influence

Interaction

Communication

Leadership

Adaptation

Résilience

Adaptation au changement

Soutien d’autrui

Réalisation

Fiabilité

Structuration

Détermination

Tableau 4.3: Un modèle de compétences16

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collaborateurs et équipes. Ils présupposent aussi la capacité de rendre chaque collaborateur responsable de son action, de son développement et de sa carrière. Pour l’ensemble de ces processus, les critères clés de succès sont:

l’organisation (en quoi facilite-t-il le déploiement de ces aspects?)

vision partagée, d’un terrain de jeu bien défini, de rôles clairs et bien délimités permettant à chaque partie d’exercer du leadership et d’assumer pleinement ses responsabilités au niveau du processus;

(sens, facilité) du processus.

Les processus concernés sont des leviers pour atteindre:

La conception de ces processus, leur mise en œuvre et leur pilotage récla-ment donc un soin tout particulier, qui ne peut être mené à bien que si les «clients» (principalement les managers) sont impliqués de manière appro-priée à tous les niveaux de manière à favoriser en «natif» le partenariat.

Le leadershipLe leadership n’est pas le management – qui s’occupe de l’allocation op-timale des ressources pour atteindre les résultats attendus. Le leadership est défini comme une capacité à insuffler de l’énergie dans l’organisation, à donner aux individus et aux groupes la capacité et l’envie de s’engager pour mettre en œuvre la stratégie au quotidien et dans le temps, pour piloter et accompagner leur action, pour créer aussi une cohérence cultu-relle, stratégique et opérationnelle17.

Le leadership présuppose une capacité à:

et actions;

18 dans un contexte qui impliquera autant la réalisation des activités opérationnelles attendues que la réus-site de changements.

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De la qualité du leadership dépend donc la réussite de l’organisation. Quel rôle la fonction RH joue-t-elle pour le favoriser et le développer, au-delà de l’organisation de formations?

En quoi contribue-t-elle à la définition d’un modèle de leadership qui soit plus qu’un modèle de compétences statique, mais une incarnation concrète de la vision et des valeurs de l’organisation pour guider l’action de chaque leader. Un modèle qui serait évolutif, stimulant et impliquant.

En quoi contribue-t-elle à ce que chaque manager devienne non seu-lement un leader, mais un coach pour l’émergence et le développement du leadership dans ses équipes et chez ses partenaires? En quoi assure-t-elle l’existence d’un contexte et de compétences adaptées permettant une progression permanente et sans complaisance du leadership comme facteur clé de la réussite durable de l’organisation, en mettant en place une vraie culture du progrès, du feedback et de l’expérimentation grâce à des outils adaptés (feedback 360°, blended learning), à des stages de dévelop-pement personnel en contexte (missions terrains, équicoaching, mises en situation, simulations, entreprises virtuelles) et à de l’accompagnement de haut niveau (coaching externe ou interne).

Le leadership est un donc un terrain de jeu privilégié dans lequel le partenariat peut et doit se manifester, sans être ni substitut ni menace pour les acteurs concernés.

Vision, valeurs et stratégieL’ensemble des aspects évoqués ne peut exister que si l’action de chacun s’inscrit dans une vision globale et partagée de l’organisation, qui soit cohérente et stimulante, qui évidemment intègre une dimension RH et qui s’appuie sur des valeurs communes. La stratégie globale – et la stratégie RH qui en découle – constituent une orientation claire pour la concrétisa-tion de la vision, qui donne du sens et guide l’action de chacun non seule-ment pour l’année en cours, mais pour une période qui généralement va de 2 à 5 ans19. La déclinaison stratégique jusqu’au niveau de chaque indi-vidu constitue une clé majeure de succès. Le leadership et les processus RH (notamment la définition des rôles et la fixation d’objectifs) sont les vecteurs principaux pour y parvenir.

La responsabilité de l’existence d’une vision, de valeurs et d’une stra-tégie incombe à la Direction. RH, en tant que partenaire, est co-responsa-ble de sa définition, de sa cohérence et de sa déclinaison. RH peut aussi être invité à piloter ce type de processus, au niveau de la Direction comme de sa déclinaison, au travers d’une méthodologie partagée et d’un accom-pagnement de qualité. Il s’agit aussi d’amener la direction à faire le travail nécessaire si la vision, la stratégie et les valeurs ne sont pas comprises ou connues suffisamment à tous les niveaux de l’organisation.

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Pilotage stratégiqueLes notions que nous avons proposées dans ce chapitre sont à la fois complexes (elles couvrent tous les aspects humains et organisationnels) et simples (parce qu’il semble évident que, sans eux, le succès ne peut pas être au rendez-vous).

Atteindre un haut niveau de performance et de cohérence dans tous les domaines concernés se révèle très exigeant pour les parties prenantes, à commencer par la DRH. Se baser sur la seule intuition pour obtenir le feedback nécessaire serait évidemment très dangereux.

Un dispositif de pilotage stratégique doit permettre, de manière simple, efficace et efficiente, d’en assurer le déploiement cohérent dans le temps. Qui dit pilotage dit indicateurs, destinés à permettre de prendre des déci-sions immédiates en cas d’écarts identifiés. Qui dit indicateurs dit clarté et consensus indispensables sur les résultats à obtenir, car la mesure est un moyen efficace d’obtenir ce qui est souhaité. La pertinence des indica-teurs choisis est donc essentielle.

Ces indicateurs pour l’organisation concernent autant la finance, la performance clients, l’optimisation des processus que la dynamique hu-maine, selon le modèle du tableau de bord prospectif 20.

Au niveau de la dynamique humaine, les indicateurs concernent quatre niveaux, qu’il convient de distinguer très soigneusement:1 La performance humaine de l’organisation, au niveau engagement, com-

pétences et leadership notamment, en lien avec la stratégie RH de l’organisation – concerne en priorité la Direction.

2 La mise en œuvre de la politique du personnel – concerne aussi la Direc-tion.

3 La performance des processus RH – concerne en priorité la fonction RH.4 L’excellence, la qualité de service et le partenariat de la fonction RH –

concerne en priorité la fonction RH21.

On veillera à éviter tous les indicateurs qui ne sont pas absolument clairs dans leur sens (pertinence), qui ne mènent pas à l’action (efficacité), qui sont trop compliqués et lourds (efficience), qui ne sont pas compris et partagés. On fera dans tous les cas une distinction entre des statistiques, utiles uniquement pour la veille et l’analyse, et de vrais indicateurs, qui permettent de piloter et d’agir. Ceux-ci seront peu nombreux, choisis avec une rigueur implacable. Ils pourront être quantitatifs ou qualitatifs. Ils se-ront dans tous les cas choisis sur la base de la stratégie et de la politique du personnel et pas de ce qu’un SIRH est capable de proposer ou de ce que font les concurrents. En apportant des indicateurs de la contribution des ressources humaines à la performance, la fonction RH contribuera à faire évoluer l’organisation et son positionnement. Elle y parviendra encore

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plus en amenant de la cohérence dans les outils de pilotage, au travers de la clarté de la cascade des résultats attendus à tous les niveaux, de la pertinence des indicateurs choisis et de leur compréhension adéquate de la part des acteurs concernés.

A retenirEtre reconnu comme un partenaire stratégique incontournable présuppose d’être présent et légitimé sur l’ensemble de la chaîne de création de valeur, y compris celle de la manifestation concrète de la performance organisationnelle. Ceci concerne notamment:

la définition ou la transposition de la stratégie (vision, valeurs, stratégie) et son pilotage tout au long de la chaîne de création de valeur (tableaux de bord stratégiques);

business, perçus et utilisés comme tels par le management, et qui contribuent à rendre les individus responsables de leur action et de leur carrière;

l’entreprise, lequel s’appuie sur des compétences individuelles démontrées;

atteindre une performance organisationnelle et humaine durable.

On est donc bien au-delà d’une bonne maîtrise des fondamentaux RH, admini-stratifs ou processus de base. On remet l’humain au cœur de la stratégie de l’entreprise22, avec une fonction RH qui est un partenaire du business pour y parvenir.

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5. Etre partenaire

Le deuxième volet du partenariat stratégique est dans le terme de par-tenaire23. Aujourd’hui, ce terme est utilisé à tous les niveaux, avec tous les sens possibles, au point de risquer de perdre toute valeur.

Nous n’en connaissons pas d’autre qui conviendrait mieux24. Nous ai-merions donc lui redonner du sens et de la pertinence, parce que c’est l’une des notions les plus fortes, les plus puissantes, les plus impliquantes des relations humaines. C’est aussi à notre avis un modèle clé pour réussir ce 21ème siècle.

Modèle et posture du partenariat25

Le partenariat, c’est une implication volontaire dans une relation dyna-mique et stimulante qui a pour but de réaliser un objectif commun.

Il présuppose d’œuvrer ensemble pour réaliser cet objectif. La vision ou l’objectif commun sont donc au cœur de toute relation de partenariat. Sans cette vision commune, le partenariat ne peut simplement pas exister. On sera alors dans une relation de conseil ou commerciale habituelle.

La vision commune, c’est celle qui permet aux deux partenaires de se développer, de progresser, de gagner, tout en contribuant à ce que le ré-sultat commun visé qui concerne l’organisation ou le projet soit lui aussi réussi. En pensant partenariat, RH se doit d’avoir une vision commune d’un business réussi pour les clients et l’organisation, avec des collabora-teurs engagés, compétents et épanouis.

Le partenariat présuppose ensuite la clarification du «terrain de jeu», celui sur lequel les partenaires vont œuvrer ensemble. Ce terrain de jeu mérite d’être bien défini, pour éviter que l’un ou l’autre des acteurs n’aille trop loin, empiète sur certaines chasses gardées et ne mette le partenariat en danger. Il s’agit dans le partenariat de prendre sa place, mais sans prendre celle de l’autre:

dans un cadre bien défini par un ensemble d’objectifs, de procédures, de règles et de valeurs. Des éléments de ce cadre seront non négociables, et à décréter comme tels. En ayant le cadre bien en tête, on pourra se concentrer sur le terrain de jeu, à l’image d’un sport collectif. Ce sport comprend son lot de règles, mais surtout un terrain sur lequel on va es-sayer de jouer ensemble, le mieux possible, pour chercher à gagner la partie et générer du plaisir pour les spectateurs et pour soi.

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part du travail à réaliser, en termes d’expertise et de responsabilité, pour que l’objectif puisse être atteint. Il s’agit d’être au clair sur ce que chacun doit apporter dans la relation de partenariat.

Par exemple, entre un Directeur général et son Directeur RH, le terrain de jeu pourrait être celui de l’engagement, du leadership et de certaines ca-pabilités. Le DG restera en revanche entièrement responsable de la straté-gie et des décisions prises, le DRH de la maîtrise des processus RH. Avec d’autres cadres, le terrain de jeu pourrait être celui de recruter, intégrer et impliquer les ressources et compétences nécessaires pour réaliser la mis-sion confiée. Ensemble, il s’agit d’assurer la performance humaine et l’évolution de l’organisation. Le manager garde toute la responsabilité de la conduite de ses équipes, et RH de la fourniture des prestations et des outils associés.

Cette répartition des rôles n’entrave nullement un leadership partagé. Le leadership, défini comme source d’énergie, ne peut pas être de la seule responsabilité de la hiérarchie. Chacun peut et doit apporter son énergie, ses initiatives et ses idées dans la relation. Ce n’est que si le lea-dership est vraiment partagé que la relation sera stimulante et dynamique.

Ces éléments posent le cadre du partenariat, qui à la base est relation. Cette relation devra préexister ou être solide, pour que le partenariat puisse vivre et persister. La relation se construit, non pas parce qu’on se trouve sympathique, mais parce qu’on arrive à construire sur une con- fiance et sur un respect mutuels, sur un véritable dialogue (écoute, feed-back) et sur une envie de faire vivre cette relation26. La figure 5.1 illustre les composantes d’un partenariat réussi.

La relation se construit facilement avec les acteurs qui nous sont proches. Le partenariat peut s’appuyer sur la qualité de cette relation, sans oublier de veiller à partager une vision commune et à œuvrer sur un terrain de jeu bien défini.

Dans d’autres cas, la relation se manifeste plus difficilement, parce qu’on a moins d’affinités, moins envie de collaborer et de faire réussir l’autre. La situation est la même pour le partenariat que pour le manage-ment d’une équipe. Si l’on n’a pas envie de travailler ensemble, si l’on n’a pas un minimum de respect et de confiance, l’échec peut nous être impu-table. Il s’agit donc effectivement de trouver l’envie de collaborer pour essayer, au travers d’une attitude et d’une posture adaptées, de donner aussi à l’autre un peu d’envie de tenter quelque chose. Et de construire progressivement de la confiance – mutuelle (ni trop, ni trop peu) et du res-pect – mutuel lui aussi – pour que la relation soit équilibrée. Réussir la re-lation ne peut se faire sans interaction, dialogue, expression du ressenti,

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du vécu avec renforcement des éléments positifs et feedback constructif lorsque les comportements ne correspondent pas aux attentes.

L’envie constitue donc clairement la principale pierre d’achoppement. Elle ne peut exister que si on n’est pas dans le jugement de l’autre ou dans un ressenti primaire. Lorsque l’on pense que l’autre ne veut pas, qu’il n’a pas les mêmes valeurs, qu’on se focalise sur des comportements inadé-quats à nos yeux, il ne peut y avoir une réelle envie de réussir ensemble – et de faire réussir son partenaire. On est focalisé sur une approche qu’on entend très souvent: «Pour le partenariat, il faut être deux, et je ne vois aucune volonté chez l’autre»; ou: «Si l’autre change, alors moi aussi je veux bien». Cette posture revient à l’échec programmé, parce que l’autre géné-ralement ne va pas faire le premier pas si soi-même on ne le fait pas. Il faut donc savoir que le changement de l’autre passe par notre propre change-ment d’attitude et de posture, qui va nous amener à être plus accueillant, plus positif et surtout centré sur l’envie donnée à l’autre de participer à notre partenariat. Parce que le partenariat ne se décrète pas. Il se construit et se conquiert.

Avant d’être un modèle, le partenariat est donc une question de posture et d’attitude. Cette posture permet le leadership de chacune des parties, mais pas la domination ni la soumission. Il s’agit donc d’un vrai défi autant pour le management que pour RH, qui ont été davantage habitués à des relations de nature hiérarchique et de domination-dépendance que de re-lations équilibrées.

Figure 5.1: Le modèle du partenariat

Visioncommune

Croissance dechacune des

parties

Rôles définis, leadership partagé, agilité de la posture

Relation:confiance et respectmutuels; dialogue;

envie partagée

Terrain de jeuet cadre bien

définis

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Ce qui caractérise le partenariat, c’est qu’on cherche le succès de l’organisation et du partenaire, pas le sien en priorité. On parle le langage de l’autre, on raisonne dans son modèle pour l’aider à évoluer, à enrichir sa réflexion, à intégrer dans sa logique une dimension humaine et organi-sationnelle qui fait sens, qui lui donnera la conviction d’être meilleur, plus fort, plus pertinent. Mais en sachant affirmer ses besoins, ses attentes et proposer une vision et un cadre communs.

En d’autres termes, un partenaire se passionne pour le «business» de l’autre, pour les paramètres de son succès, plus qu’il ne cherche à démon-trer sa propre valeur, sa compétence et à amener l’autre à faire ce qu’il souhaite. Tout en assurant sa part du travail, son expertise, son propre professionnalisme.

La posture est donc subtile. Même si elle vise du gagnant-gagnant, ce n’est pas simplement de la négociation. Bien sûr, la logique de la négo-ciation s’applique lorsqu’il s’agit de trouver une solution qui soit meilleure que celle que chacune des parties voudrait voir appliquée. Mais la grosse différence, c’est dans l’intention. L’intention de réaliser une vision commu-ne, d’atteindre un objectif supérieur ensemble doit primer sur l’envie de trouver une solution qui réponde aux attentes individuelles des parties.

C’est aussi au travers de la vision et d’objectifs communs que le mo-dèle pourra vraiment fonctionner. Si cette vision, cet objectif ne sont pas définis, on restera inévitablement dans une démarche où l’on cherchera à convaincre l’autre, à lui montrer les avantages, à l’amener à adhérer, pas à co-construire.

En étant partenaires, le mot clé est celui d’embarquer les autres dans une démarche transparente, qui fait du sens et à laquelle chacun peut adhérer parce qu’elle est évidente: celle du succès durable de l’organisation. Embarquer signifie que chacun trouve sa place dans la relation, dans ce qu’on va réussir ensemble.

Devenir un acteur crédible et un partenaire incontournable

L’action de la Direction RH s’inscrit généralement dans le cadre d’une vi-sion et d’une stratégie générale définie en haut lieu (en théorie, le conseil d’administration). Ce qui fera l’objet du partenariat, c’est la partie humaine et organisationnelle de cette vision et de cette stratégie, en en faisant un critère clé de succès.

Nous avons rencontré de nombreux Directeurs RH très occupés à ré-diger, sur mandat de leur Directeur général, la stratégie RH. Nous les avons rendus attentifs au fait qu’ils prenaient sur eux (c’était pour eux une

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marque de confiance) une responsabilité sur un sujet qui ne peut leur ap-partenir entièrement. En effet, la vision et la stratégie RH de l’organisation doivent être une responsabilité partagée par l’ensemble de la direction. Cet exemple montre que, souvent, pour construire le partenariat, il faudra sortir de sa propre zone de confort (on sait le faire) et de celle des autres (cela les arrange qu’on le fasse pour eux), pour co-construire quelque cho-se de nouveau mais de partagé et de solide. Réussir le partenariat ne va donc pas de soit. Les critères de succès sont les suivants:

Etre compétent et crédible Il s’agit d’être compétent et crédible pour entrer sur le terrain de jeu du partenariat. Une bonne formation et de la théorie ne qualifient personne pour discuter des orientations stratégiques et de la mise en œuvre du changement. Il s’agit de disposer d’une expérience solide dans les questions managériales, organisationnelles, stratégiques et de change-ment qui amènera à ce que les arguments et les propositions soient prises en compte. Etre un acteur crédible signifie pouvoir apporter une réelle valeur ajoutée pour l’ensemble des domaines qui concernent les capabili-tés évoquées, soit la performance organisationnelle (modèles de travail, optimisation de processus, fixation et évaluation d’objectifs), le dévelop-pement organisationnel (de la vision à la mise en œuvre du changement, agilité organisationnelle, évolution des compétences) et la cohérence cul-turelle (adhésion, valeurs, collaboration transversale, équité). On n’a pas besoin d’avoir la solution, mais la capacité à poser l’objectif et le problème, à proposer une démarche, à challenger les propositions, à mettre en œuvre une approche pour surmonter les obstacles. Etre un acteur crédible signi-fie aussi qu’on est un acteur qui apporte des solutions, qui est orienté solutions et qui aide à les trouver plutôt qu’à mettre sur la table des problèmes, des obstacles, des difficultés qui peuvent déranger, freiner, énerver. Il s’agit aussi de veiller à ne pas mettre en évidence plus que de raison les limites des autres et à ne pas juger autrui.

Sortir de sa zone de confortIl s’agit de savoir sortir de sa zone de confort et d’amener l’autre à en faire de même27. Nous l’avons vu et dit à plusieurs reprises, le partenariat ne se décrète pas. Il se construit. Et il ne peut se construire à l’intérieur de sché-mas relationnels préexistants, qui conditionnent une manière de faire et de collaborer (par exemple la prestation de service ou la donnée d’ordres). Chacun d’entre nous a besoin de vivre dans sa zone de confort, dans ce qu’il connaît et maîtrise. C’est là qu’il se sent bien et à l’aise. Pour certaines personnes, cette zone sera très étroite et la quitter pourrait comporter un grand danger à leurs yeux. Pour d’autres, à l’aise dans la nouveauté, le

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changement et l’imprévu, cette zone sera plus large. Pour eux, le confort sera le changement, alors que mettre de la structure, des étapes, impliquer l’autre sera la source de l’inconfort.

Pour construire quelque chose de nouveau, chacun devra faire évoluer sa propre vision, ses comportements et sa posture. Et inviter l’autre à en faire de même, pour qu’on puisse ensemble explorer une nouvelle forme de collaboration, de relation, de manière de résoudre les problèmes. Si-non, on sera toujours ramené à agir et réagir dans l’ancien schéma: celui d’un professionnel ou d’un expert, celui du prestataire ou de l’exécutant, même si cet exécutant règle les problèmes les plus complexes et rend un service très apprécié.

La première difficulté est de sortir et de faire sortir de sa zone de con-fort, parce que personne n’aime cela, parce que cela présuppose pour la majorité d’entre nous un moment de malaise, d’insécurité, voire certaines peurs. C’est pourquoi il faut savoir pratiquer à la fois une pression suffi-sante pour que quelque chose se passe, pour qu’une ouverture se mani-feste. Et savoir lâcher prise dès que l’impulsion initiale aura été donnée, parce qu’une pression forte et continue pourrait amener l’autre en «zone rouge», c’est-à-dire dans un contexte dans lequel il réagira émotionnelle-ment, parce qu’il perd la maîtrise, se sent en danger. Et chacun de nous a des points de vulnérabilité personnels. Insister lorsque ces points de vul-nérabilité sont en jeu, en pensant avoir raison, en mettant encore plus de pression, conduira inévitablement à une rupture ou à un blocage.

Dans la zone de confort, il n’y a pas d’évolution possible. Dans la zone rouge, on est dans le blocage, la rupture ou le conflit. Il faut donc chercher à être dans une zone nouvelle, qui semble positive, stimulante et nous permet de construire quelque chose de nouveau ensemble. Cela peut se passer dans le cadre d’une démarche d’équipe (vision, stratégie), d’un projet particulier, d’un coaching ou simplement d’une évolution de la rela-tion provoquée par l’une des parties. Mais il ne faut jamais penser qu’elle se produira toute seule, que le temps fera évoluer les choses. C’est vouloir spéculer sur l’existence de miracles, ce qui ne semble pas la stratégie la plus sûre pour réussir.

Adopter la bonne postureCe troisième point présuppose d’être bien dans son rôle, bien dans sa peau, pouvant exprimer à la fois ses objectifs, ses attentes, ses conditions et entendre celles des autres. Ceci signifie aussi ne pas avoir peur d’exprimer son désaccord mais en proposant une alternative, en étant constamment ferme sur le non-négociable mais ouvert à des options nou-velles et positives. Cela implique aussi de qualifier et de valoriser son par-tenaire et de dépasser les blocages inévitables comme dans toute relation.

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Attendre que l’autre change pour faire évoluer sa propre situation revient à se mettre dans la peau de la victime. C’est en faisant le premier pas, en modifiant sa posture, son attitude, sa manière de voir le monde que les choses pourront évoluer. Parce que l’énergie générée n’est plus la même, parce qu'elle donne envie, et permet à l’autre d’entrer dans une dynamique nouvelle: «Je récolte ce que je sème; je génère autour de moi la dynamique qui est induite par ma posture, mon attitude, mes comportements.»

Les obstacles au partenariat

Le modèle du partenariat est impliquant. Il ne suffit donc pas de se dé-créter partenaire, de se référer au modèle concerné pour que la situation évolue. Bien au contraire. Les mots imposés perdent vite de leur valeur et peuvent donner l’illusion que les choses ont changé, alors qu’en réalité elles sont demeurées parfaitement identiques.

Les obstacles au partenariat sont nombreux, et il est utile de les mettre en évidence pour pouvoir les reconnaître et les dépasser. Ces obstacles sont de deux ordres:

Stratégiques et structurels, notamment en posant des passages obli-gés ou en mettant les acteurs dans une position impossible pour eux, également en ayant des objectifs contradictoires.

, notamment en induisant des comportements de juge-ment, de disqualification, de non dialogue, ou alors lorsque les acteurs, en pensant bien faire, entrent dans un schéma relationnel inapproprié et se substituent à la responsabilité de l’autre.

Obstacles stratégiques et structurels Les passages obligés. Le passage obligé est l’un des obstacles les plus courants. En mettant en place un processus, une procédure, un système ou des outils, on crée les conditions qui forcent l’autre à faire ce qu’on attend de lui. Dans les RH, ceci se traduit par la mise en place de pro-cessus contraignants, sans lesquels le résultat ne peut plus être obtenu: par exemple un système de e-recruitment, qui permet de ne plus enga-ger personne qui n’a pas passé par toutes les étapes du système, depuis la qualification du candidat jusqu’à la décision finale. Les processus sont clairement indispensables et permettent de mettre de la structure. Toute la question est dans l’intention et dans l’adaptation des processus aux besoins des acteurs du business. Un processus lié à une posture de partenaire sera co-construit, validé et porté par l’ensemble des parties, parce que cela permettra le mieux de réaliser la stratégie, de faire vivre les valeurs, de respecter le non négociable, d’assurer de la cohérence

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managériale et culturelle et de faciliter la vie des managers qui pourront alors se concentrer sur la relation avec leurs collaborateurs. Le même processus, imposé, sera vécu comme une obligation de se soumettre à une manière de faire qui implique d’abandonner des habitudes qui ont pu faire leurs preuves et perdre de son pouvoir. On fera alors au mieux les choses par soumission; on mettra probablement en œuvre beaucoup d’énergie pour contourner, résister et disqualifier les auteurs. Le non alignement des objectifs, le manque de vision partagée. Lors-que les acteurs poursuivent des objectifs différents, le partenariat ne peut exister car la relation devient utilitaire ou un mal nécessaire. Il arrive aussi qu’en apparence on poursuive un objectif commun, qu’on le dé-clare comme tel, mais qu’en réalité l’une des parties ne se sente pas liée par lui. Le non alignement des objectifs ne permet pas non plus au par-tenariat d’émerger ou de survivre, parce qu’on ne peut être partenaires que de ce qu’on veut vraiment réaliser et réussir ensemble. On doit être mesurés sur la même base.La logique de territoires. Le partenariat présuppose un terrain de jeu partagé, qui correspond à ce que l’on va faire ensemble. Raisonner en-core et toujours dans un territoire signifie que lorsque l’autre entre sur notre terrain, même sans intention de prendre notre place, nous risquons de le percevoir comme une ingérence et comme un danger, et de réagir de manière émotionnelle par des comportements agressifs.Mettre l’accent sur les limites. Poser un cadre et des limites est indis-pensable. Mais ce cadre, non négociable, une fois accepté, est un terrain de jeu et permet des mesures correctives faciles si nécessaire. En se focalisant sur les limites, on met toute son énergie sur ce qu’on ne peut pas faire, et pas sur ce qu’on peut réaliser ensemble. On sera donc tou-jours dans un comportement limitant, freinant, à l’affût de la moindre erreur, plutôt que dans une dynamique orientée vers la vision et le pro-grès.Assurer le rôle de l’autre, se substituer. Le partenariat présuppose que chacun fasse sa part du travail, ce qui correspond à son rôle et aux mis-sions définies. Lorsqu’il a été décidé de faire quelque chose ensemble, et qu’un des acteurs se désiste, le faire à sa place peut être un obstacle au partenariat. Prenons l’exemple d’un licenciement à réaliser en pré-sence du DG et du DRH. Si le DG ne peut être présent, procéder au licenciement selon le plan peut être perçu comme un acte héroïque, susciter de la reconnaissance, enlever «une épine du pied» (une source d’inconfort). Mais elle menace le partenariat, puisque l’un des acteurs s’est substitué à l’autre, lui permettant de ne pas faire sa part du travail. Ce faisant, la relation s’est déséquilibrée, les règles du jeu n’ont pas été respectées et le schéma comportemental qu’il s’agissait probablement

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de modifier (le manque de prise de responsabilité managériale et la ten-dance de RH à se substituer à elle) a été confirmé et renforcé. Ce cas de figure est difficile à percevoir, parce qu’il aboutit en général à une recon-naissance particulière pour services rendus.

Obstacles relationnelsManque d’écoute et de dialogue. Le premier obstacle à la relation con-cerne un manque d’écoute: «On sait d’avance ce que l’autre va nous dire, on a la réponse à tout, on ne montre pas d’intérêt pour l’autre.» Difficile dans un tel contexte à une vraie relation d’exister, à un partena-riat d’émerger.Disqualification et jugement de l’autre. On sait que le jugement est un obstacle à la communication et à la relation. Il l’est encore plus pour le partenariat. Dès que l’on est dans une attitude de jugement, on n’est plus ouvert à l’autre, à la relation, à construire ensemble. L’autre est respon-sable, coupable ou incompétent. On se met de facto dans une posture dominante, puisque: «Je sais et j’ai le droit de juger l’autre». Le partena-riat est alors impossible, quelles que soient les initiatives et comporte-ments adoptés. Dans le jugement, l’autre n’arrive pas à prendre sa place, ou va tout mettre en œuvre pour séduire et convaincre du mal-fondé du jugement. Généralement, en en faisant trop et en aggravant la situation. Rigidité. Prendre sa place dans la relation présuppose de savoir s’affirmer, d’affirmer ses attentes et ses besoins. Mais en étant à l’écoute de ceux de l’autre et en cherchant un dénominateur commun. Lorsqu’on manque de force personnelle, il n’est pas rare que, pour s’affirmer, l’on devienne rigide, intransigeant. La rigidité est le corollaire de la vulnérabi-lité, de l’influence et d’une forme de faiblesse personnelle. La rigidité empêche le partenariat, parce que cela doit être comme prévu et pas autrement. Se forcer à la relation alors qu’on n’a pas envie. Avoir envie de construire et réussir ensemble est, on l’a vu, une condition essentielle du partenariat. C’est une condition pour donner envie à l’autre. Si l’on se force, cela se sent. Et si l’on n’a pas envie, qu’on se sent contraint, toute la dynamique est faussée et le succès devient impossible. Il faut alors savoir en tirer les conséquences, et changer de rôle ou d’entreprise. Avoir peur de la rupture. Le partenariat est une relation libre. Si l’on a peur de perdre l’autre, de la rupture, de l’échec, notre propre attitude et posture vont se modifier, s’altérer, au point de rendre la rupture inévita-ble. Se sentir victime ou otage. Un obstacle très fréquent est celui de se sentir victime d’un dominateur, d’un acteur qui ne veut pas entrer en relation et nous donner la place escomptée. En se sentant victime, on

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donne le pouvoir à l’autre de nous dominer. On s’enferme dans un sché-ma qui lui rend la partie facile et confirme le fait que l’on est bel et bien la victime. L’autre est peut-être «bourreau», mais il sent peut-être aussi, qu’avec nous, il n’a pas d’autre choix. Il arrive aussi de se sentir otage de son partenaire, c’est-à-dire d’avoir l’impression que notre avenir dépend pleinement de sa volonté. Lorsque nous donnons à l’autre ce pouvoir, normal qu’il en use. C’est à chacun de prendre sa place, de respecter son partenaire sans tomber dans le mépris ou l’agressivité, et de ne pas donner à l’autre le pouvoir qu’il s’arrogerait alors trop facilement. En mo-difiant la nature de la relation, en construisant sur un peu de confiance, de respect et de dialogue, il est possible progressivement d’exister dans l’espace de l’autre. Et de sortir de ce schéma28.

A retenirRéussir le partenariatLe partenariat peut sembler inaccessible. C’est une relation difficile, comme l’est toute forme de partenariat (le couple en est un exemple). Elle est impliquante et présuppose un travail sur soi: pour ne pas dominer; pour ne pas être dominé; donc pour prendre sa place et donner à l’autre la sienne; pour réussir ensemble un projet sur lequel on est d’accord; pour apporter pleinement sa valeur au collec-tif dans lequel notre action s’inscrit. Le partenariat est difficile, parce que naturellement nous tombons très vite dans l’un ou l’autre des schémas et comportements toxiques pour le partenariat. Parce que nous n’avons pas entrepris le développement personnel qui vise à faire de nous un être équilibré, ancré, centré, capable d’être en relation avec soi-même pour mieux l’être avec les autres. Lorsqu’on a un vide affectif, des peurs, un be-soin excessif de reconnaissance, nos comportements et notre attitude ne permet-tent pas la relation équilibrée, adulte-adulte, de confiance et de respect mutuels indispensables. On est soit dans la soumission, soit dans la domination. Et on dé-montre par l’acte que le partenariat est impossible. Or le partenariat est certainement la seule posture qui donne un avenir à notre so-ciété, à nos organisations et en l’occurrence à la fonction RH, parce qu’elle per-met à chacun de prendre sa place, d’assumer son rôle et de contribuer pleine-ment au succès de l’ensemble.

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6. Un nouveau modèle pour la fonction RH

Un partenariat à établir avec diverses parties prenantes

La fonction RH exerce des rôles multiples. Pour compliquer le tout, elle doit les exercer par rapport à toute une série de parties prenantes, qui ont chacune des attentes en termes de partenariat et de valeur ajoutée.

Or, hormis dans les chapitres introductifs ou stratégiques, la prise en compte de ces parties prenantes et de leurs attentes reste très faible dans les modèles RH traditionnels, peut-être pour ne pas rendre les choses trop complexes, peut-être aussi parce que l’on rentre dans des perspectives plus difficiles à appréhender.

Mais si nous acceptons l’idée clé développée tout au long de cet ou-vrage que l’avenir de la fonction RH passe par le partenariat, pour sortir des nombreuses impasses constatées, cette composante apparaît sim-plement comme incontournable pour organiser, structurer et mettre en œuvre l’ensemble des activités associées.

Le modèle que nous proposons identifie cinq parties prenantes. Dans certaines organisations de petite taille, certaines se recoupent. Dans les très grandes structures, il faudra peut-être étendre encore ce modèle. Mais cela ne devrait poser aucun problème, dans la mesure où les composantes clés associées à chacune d’entre elles sont clairement identifiées.

Les parties prenantes qu’il semble indispensable de considérer sont:1. Les directions générales et conseils d’administration, pour les accom-

pagner dans la définition de la vision, de la stratégie, des processus et des valeurs globales de l’organisation et dans leur mise en œuvre cohé-rente.

2. Les managers, responsables d’unités d’affaires et/ou d’activités, pour les accompagner dans la définition des stratégies sectorielles et dans leur traduction et application au quotidien.

3. Les collaborateurs et candidats, pour concrétiser et faire évoluer leur relation d’emploi individuelle avec l’entreprise.

4. L’organisation en tant que telle, au niveau de ses besoins collectifs (cadre général – orientation, politique – processus, informations, traite-ments opérationnels).

5. La propre organisation RH et ses collaborateurs.

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Des rôles multiples à assumer pour chaque partie prenantePour chacune des parties prenantes identifiées, la fonction RH n’a pas qu’un rôle à assumer. Les attentes de chacune varient, mais concernent toutes autant le stratégique que l’opérationnel, les processus que la rela-tion. Il s’agit dans tous les cas:

de poser et mettre en œuvre le cadre dans lequel les parties prenantes vont évoluer – Structure (stratégie, politique, pro-cédures et processus RH) – et à les aider au travers de l’interaction avec les acteurs de la fonction à utiliser au mieux le terrain de jeu ainsi défini pour créer de la valeur – Rela-tion.d’exercer son impact et d’asseoir sa crédibilité dans tout ce qui s’inscrit dans le temps et dans la

Figure 6.1: Les principales parties prenantes à considérer

EquipeRH

Organisation Managers

Direction générale

Collaborateurset candidats

Stratégique

Opérationnel

Structure Relation

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dynamisation correspondante des acteurs pour anticiper et réussir le changement – Stratégie – par opposition à des activités et actions con-crètes à réaliser – Opérationnel.

Ce schéma nous permet de définir quatre rôles clés pour la fonction RH, qui à la différence des rôles d’Ulrich, s’exercent pour chaque partie prenante: A. Un rôle stratégique et

structurant, où l’on définit les orientations, les pro-cessus, les prestations (Structure/Stratégie).

B. Un rôle de mise en œuvre de processus de gestion RH, qui concerneront chacun des acteurs à leur niveau (Structure/Opéra-tionnel).

C. Un rôle d’accompagne-ment des acteurs, de posture orientée résolument partenariat, mais parfois aussi de conseil (Relation/Stratégie).

D. Un rôle d’acteur, qui réalise des activités en adoptant les comporte-ments et l’attitude adaptés (Relation/Opérationnel).

Ces rôles prendront un sens différent pour chaque partie prenante, mais ne modifient pas la réflexion de fond du modèle. Ceci permettra à chacun dans l’organisation de se retrouver et de se positionner dans le même ré-férentiel de travail, et surtout de s’assurer que l’ensemble des rôles par rapport à l’ensemble des parties prenantes occupe l’attention requise, tout déséquilibre significatif étant dans la durée source de risques.

Par exemple, se focaliser uniquement sur la relation avec la direction et les managers, en négligeant l’interface collaborateurs, donnerait à la fonc-tion RH l’image d’un acteur qui chercherait d’abord son succès plus que celui de l’ensemble des êtres humains de l’organisation. Se focaliser avant tout sur le cycle de vie des collaborateurs, comme cela se fait encore sou-vent, revient à être un responsable du personnel sans s’inscrire dans le processus de création de valeur, ce qui fait de RH au mieux un mal néces-saire source de lien social, mais pas un partenaire à part entière. Se foca-liser sur la relation au détriment de missions de base pour toute l’organisation (par exemple la gestion de processus opérationnels clés tels que les ques-tions de salaires, d’assurances ou de flux de recrutement de fixes et de

Stratégique

Opérationnel

Structure Relation

Stratégie,politique etprocessus

Mise en œuvre de processus

Accompa- gnement et

conseil

Acteur

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temporaires) ne serait pas acceptable, tout comme ne penser que proces-sus et négliger la relation conduit à rester bureau de paie. Et, en dernier lieu, mettre tout son effort sur son rôle dans l’entreprise en omettant la performance et le développement de sa propre organisation, sa propre performance et exemplarité, serait également un risque majeur dans la durée, qui conduirait à être plus donneur de leçons que partenaire.

Notre modèle comportera fondamentalement quatre rôles à traiter, à assumer et à piloter pour cinq parties prenantes. Vingt rôles, cela peut sembler beaucoup. Mais en les orientant par rapport aux parties prenantes, les rôles deviennent clairs, concrets donc réalistes et réalisables, ce qui n’était pas le cas dans le modèle d’Ulrich où plusieurs composantes qui faisaient défaut ont précisément été à l’origine de certains déséquilibres et surtout du manque d’attention accordé à la posture à adopter.

Ce modèle permet aussi d’évaluer de manière beaucoup plus précise et objective la valeur ajoutée apportée.

L’essentiel du modèle proposé peut être explicité au travers des cinq missions suivantes pour la fonction RH, qu’il s’agira de réaliser toutes en parallèle et avec le même souci d’excellence et de création de valeur:1. Partenaire stratégique de la Direction2. Partenaire business des managers3. Interlocuteur et partenaire des collaborateurs et candidats4. Garant des processus et valeurs humaines de l‘organisation5. Leader de sa propre organisation.

Les divers rôles qui en découlent concerneront parfois une personne ou une équipe dédiée, ou composée en conséquence.

Réaliser les missions de la fonction RH

Mission 1: Partenaire stratégique de la Direction Stratège et architecte Ce premier rôle consiste à aborder en tant que partenaire crédible capable de contribuer de manière décisive au niveau de l’humain et de l’organisationnel aux thèmes liés à la stratégie d’entreprise, aux capabilités et à la mise en œuvre des changements. Il s’agit donc de pouvoir contri-buer à la discussion stratégique (stratège) et à la mise en œuvre des chan-gements souhaités (architecte).

C’est là aussi que seront posées et définies la vision et la stratégie RH pour l’organisation, rendant compte de la dynamique humaine et de la culture d’entreprise qu’on souhaite avoir (et non pas la stratégie des systèmes et processus RH à mettre en œuvre).

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Ingénieur de processus RH stratégiquesDans ce rôle, il s’agit de concevoir et de planifier des politiques et proces-sus RH décisifs pour le succès de la stratégie de l’entreprise, en cohérence avec elle et en tant que leviers de l’action managériale. Le succès sera lié à la qualité de l’ingénierie de ces processus, en réponse aux exigences stratégiques et culturelles et en tenant compte des conditions d’une mise en œuvre réussie par les acteurs concernés.

Consultant interne et coachDans ce rôle, il s’agit d’être reconnu comme un acteur capable d’accompagner la Direction générale ou des équipes dans des démarches collectives, en tant que consultant interne (accompagnement de proces-sus d’équipe, animation de séances) et/ou coach d’équipe ou d’individus. Il s’agit donc de disposer d’un véritable leadership et d’une crédibilité pour piloter et accompagner certains processus sensibles mais décisifs.

Acteur stratégiqueEn tant qu’acteur stratégique, le/la DRH est amené à piloter et à réaliser personnellement des actions à forte valeur ajoutée, par exemple au niveau de la négociation de conventions et contrats, dans le pilotage de proces-sus clés tels que la planification de la relève ou la rémunération, par exem-ple aussi dans des actions à forte portée stratégique telles que certains réseautages, benchmarking, interventions publiques ou plus simplement recrutements et sélection de directeurs, actions de formation et dévelop-pement, résolution de conflits. Toutes ces actions réclament des com-pétences de leadership et d’ancrage réelles, puisqu’il s’agit d’intégrer tou-te une série de contraires: court terme et long terme; profitabilité et bien-être; règles et liberté.

Figure 6.2: La mission de partenaire stratégique de la Direction

Stratège et architecte

Ingénieur de processus RH stratégiques

Consultant interne et coach

Acteur stratégique

Partenairestratégique de la

Direction

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Mission 2: Partenaire business des managersTransformateur de stratégiesDans ce rôle, le partenaire RH démontre sa capacité à parler business avec les managers, à comprendre leurs défis, leurs enjeux et à chercher à tout mettre en œuvre, dans le respect de la vision et des valeurs de l’organisation, pour les réaliser. Il contribue à la transformation des stratégies globales en stratégies sectorielles adaptées, et à la planification de leur mise en œuvre. Il contribue aussi à la définition des actions à entreprendre pour contribuer au développement des capabilités essentielles pour le succès de l’entité ou du territoire concerné.

Metteur en œuvre des processus RH Les processus RH sont en général définis en central avec une dimension groupe, qui souvent paraît contraignante voire technocratique. Dans ce rôle, le partenaire business des managers contribue à l’adaptation souvent indispensable des processus aux réalités du business concerné, sans concession cependant sur la finalité à obtenir.

Il s’agit donc à la fois d’assurer la cohérence du tout et le respect des spécificités organisationnelles et culturelles du secteur. Il s’agit là de trou-ver le meilleur équilibre entre la centralisation totale, qui ne fonctionne pas dans un monde complexe et diversifié, et la décentralisation complète, qui ne permet pas la cohérence du tout. La capacité à respecter l’essence et à adapter la forme au contexte est au cœur de ce rôle, dont l’importance variera significativement selon les principes directeurs et la nature de l’activité de l’entreprise.

Facilitateur et coachLe succès du déploiement de la stratégie passe inévitablement par la responsabilisation et l’implication des acteurs, et en priorité des équipes managériales. Dans ce rôle, il s’agit d’animer, de dynamiser et d’accom-pag ner les équipes managériales et sectorielles et leurs membres pour qu’elles parviennent le mieux possible à intégrer les exigences organisa-tionnelles avec les réalités du terrain (adhésion) et à développer les com-portements, attitudes et la posture indispensables pour leur mise en œuvre réussie.

Acteur légitimé Au travers des actions du quotidien, qu’il s’agisse de recrutements, d’évaluations de potentiels, de résolution de conflits ou de négociations, il s’agit d’être un acteur légitimé aux yeux des managers et de leurs équipes. Ceci signifie qu’on est crédible et qu’on agit avec compétence au quoti-dien, en sachant intégrer les exigences du long terme avec celles de

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l’urgence, les exigences du business et celles des êtres humains, les exi-gences de la conformité aux règles et celles de l’indispensable liberté d’action qui permet aux individus de contribuer pleinement au succès.

Mission 3: Interlocuteur et partenaire des collaborateurs et candidatsLes collaborateurs ont aussi des attentes envers la fonction RH, par rap-port aux conditions cadres proposées et appliquées, à l’écoute de leurs besoins et doléances, aux moyens à disposition pour leur développement et épanouissement et à la prise en compte et au dépassement de leurs difficultés et questions. Ces attentes s’expriment aussi en termes de par-tenariat.

Promoteur de sens, d’image et de cohérenceDans ce rôle, la fonction RH doit s’assurer que chacun dans l’organisation dispose des informations et de la communication lui permettant de trouver le sens de son action et de celle de son management, de comprendre les décisions prises, de connaître les orientations et de pouvoir y adhérer pleinement. Par rapport aux candidats, il s’agira de s’assurer que l’entreprise et ses acteurs véhiculent une image claire et stimulante de l’organisation à l’extérieur. Il s’agit aussi de créer les bases de la confiance qui permet à chacun de connaître ses droits et devoirs, les valeurs en vi-gueur et de savoir que celles-ci sont respectées au mieux partout dans l’organisation (cohérence).

Donneur de perspectives et moyensDans ce rôle, RH veille à ce que les collaborateurs disposent de l’ensemble des moyens et informations leur permettant de prendre en charge eux-mêmes leur performance, leur évolution et leur développement dans

Figure 6.3: La mission de partenaire business des managers

Transformateur de stratégies

Metteur en œuvre des processus RH

Facilitateur et coach

Acteur légitime

Partenairebusiness des

managers

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l’organisation. Il s’agira notamment de favoriser l’accès aux processus RH pour qu’ils puissent être un partenaire de leur manager dans les actions et discussions clés liées à leur activité (objectifs, évaluation, formation et dé-veloppement, évolution de carrière). Il s’agit aussi de mettre à leur disposi-tion un certain nombre de ressources et de moyens favorisant leur bien-être durable dans l’organisation, allant de la valorisation de leurs talents et motivations jusqu’à la gestion de leur santé physique et psychique. Les moyens prendront la forme de plateformes web privatives, facilitant l’accès aux informations/documents et une implication active dans les processus, mais aussi de conseillers et coachs, internes ou externes, auxquels il est possible de recourir pour anticiper ou dépasser des difficultés ponctuelles rencontrées.

Capteur de vécus et besoinsDans ce rôle, la fonction RH s’assure d’une remontée systématique de l’information, notamment pour évaluer le niveau d’engagement des colla-borateurs, leur adhésion aux orientations, la nature de leur lien avec l’entreprise, leur niveau de confiance et de bien-être. Cette écoute vise aussi à prendre régulièrement le pouls des équipes, à écouter les remon-tées sur d’éventuels dysfonctionnements en les traitant de manière adap-tée et à prendre en compte les besoins émergents ou actuels. On veillera en même temps à assurer la défense des intérêts des collaborateurs, le dialogue social et la qualité du vécu du terrain quant à la mise en œuvre des changements et de la stratégie, ainsi que la cohérence dans l’application des valeurs et politiques. Il s’agit aussi de faire de la veille pour être à l’affût des tendances dans le marché et des meilleures pratiques, remontées par les candidats ou le réseau.

Acteur de confianceLe positionnement du collaborateur RH dans l’organisation n’est jamais simple, puisqu’il doit être crédible à la fois pour le management et pour les collaborateurs. Dans ce rôle, le collaborateur RH doit avant tout être con-sidéré comme digne de confiance par les collaborateurs, qui doivent pou-voir s’ouvrir à lui de certaines difficultés, en ayant la conviction d’une part que les informations transmises seront utilisées de manière appropriée, que les réponses obtenues seront adéquates et équitables et que la crédi-bilité du collaborateur sera suffisante pour que les actions éventuelles ini-tiées puissent porter leurs fruits.

Il s’agira aussi de représenter de manière positive mais adaptée l’entreprise dans ses interactions avec des candidats.

Outre des qualités d’écoute et d’empathie, le collaborateur RH aura besoin d’une force personnelle qui lui permet de garder du recul, de con-

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textualiser les informations, de transformer l’ambiguïté en solutions sim-ples et concrètes, qui font avancer. Il aura aussi besoin d’une capacité à se protéger de la souffrance et d’un vécu trop fort de l’injustice, donc de rester centré et bien ancré dans le réel dans un contexte de plus en plus exigeant et difficile. Il pourra se faire aider par des partenaires externes pour des activités particulièrement sensibles (ex. problèmes personnels, santé).

Mission 4: Garant de la gestion administrative et du respect du cadreLa fonction RH agit aussi pour l’ensemble des collaborateurs de l’organisation, pour le collectif. Il s’agit d’assumer l’exécution parfaite des processus opérationnels dont elle a la responsabilité exclusive, notam-ment tout ce qui peut concerner l’administration RH (tenue des dossiers, conformité aux règles et procédures, paie, assurances sociales...). Il s'agit aussi de s'assurer qu'un cadre adéquat soit défini... et respecté.

Poseur de cadre Pour que l’organisation fonctionne bien, elle a besoin de pouvoir s’appuyer sur un cadre réglementaire, qui définit comment les choses doivent se passer et les limites à ne pas franchir. C’est ce à quoi servent la politique du personnel et les divers règlements existants. Mais aussi l’ensemble des outils, espaces, infrastructures à disposition pour favoriser un cadre de travail stimulant et respectueux. Ce cadre devra être simple et clair, poser les limites à ne pas franchir mais aussi mettre l’accent sur les attentes et les valeurs fondamentales qui vont contribuer à une culture stimulante et conviviale. Le respect des règles et de l’équité de traitement constitue le corollaire indispensable du cadre défini.

Figure 6.4: Mission d’interlocuteur et partenaire des individus (collaborateurs et candidats)

Promoteur de sens, d’imageet de cohérence

Donneur de perspectives et moyens

Capteur de vécus et besoins

Acteur de confiance

Interlocuteur et partenaire des

individus (collabora-teurs et candidats)

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Réalisateur des opérations administrativesChacun dans l’organisation s’attend à ce que son travail soit rémunéré, sa protection sociale assurée, le côté formel de son activité (durée, absences) géré. Pour cela, les RH doivent être de vrais experts administratifs, utilisant au mieux ce que la technologie et l’industrialisation des processus autori-sent, pour que les activités soient effectuées de la manière la plus effici-ente (ressources minimales) et efficace (fiabilité) possibles.

Interlocuteur compétent et accessibleLes collaborateurs ont des questions sur leur relation d’emploi, qu’il s’agisse de leurs droits et devoirs, de leur protection sociale, des perspec-tives et d’avantages divers qu’ils peuvent obtenir... Ces questions sont souvent traitées aujourd’hui par des systèmes intranet (self-service RH) ou par des numéros d’appels centralisés. Ce qui est clé, c’est que le collabo-rateur trouve facilement les réponses à ses questions, se sente accueilli positivement par des interlocuteurs connus ou parfaitement au courant de son dossier, pour que cela contribue à une relation de confiance et à re-connaître la fonction comme un interlocuteur de choix pour l’ensemble de ses besoins liés directement ou non à son activité dans l’organisation.

Gestionnaire des données personnellesLes données personnelles sont sensibles. Des lois visent à les protéger. Les entreprises ont sur ce plan des responsabilités particulières, où les informations doivent exister mais n’être utilisables que pour les finalités définies et selon des principes bien ancrés. Il s’agit évidemment des don-nées personnelles, des informations sur les évaluations annuelles, celles sur les aspirations de carrières, sur des feedback donnés ou reçus, sur des difficultés passagères rencontrées, sur la santé. Ces informations sont indispensables mais leur accès doit être très soigneusement géré pour garantir à la fois la conformité légale et les bases de la confiance. Le col-laborateur doit aussi avoir une transparence sur les informations dont l’entreprise dispose à son sujet (cf. protection de la sphère privée et des données au travail).

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Mission 5: Leader de l’organisation RHStratège pour la fonction RHLa fonction RH a elle aussi besoin de sa stratégie, pour pouvoir être l’acteur clé dont l’organisation a besoin et que nous avons présenté dans les 4 missions ci-dessus. Il s’agit de définir les leviers clés sur lesquels travailler en priorité, les processus et systèmes à mettre en place, les compétences à développer, les espaces à conquérir. Il s’agit de transformer cela en plan stratégique, avec feuille de route qui permettra d’être prêt au bon moment. Il s’agit aussi de mettre sur pied les outils de pilotage qui permettront à tout moment de savoir si RH est en phase avec son plan stratégique et si sa performance crée la valeur attendue (tableau de bord de la fonction RH).

Organisateur de la performance et du partenariat interneLa fonction RH a besoin d’une organisation simple et performante, en cohérence avec les rôles à assumer pour les diverses parties prenantes, qui permette à chacun d’apporter sa valeur ajoutée. Elle doit aussi favori-ser le partenariat en interne, car il est de plus en plus improbable qu’un acteur puisse tout seul répondre aux attentes. Ce partenariat interne con-cerne avant tout les relations entre les partenaires business et les experts d’une part, entre ces partenaires et le support administratif et opérationnel d’autre part, également au sein de ces organisations pour fédérer les com-pétences et énergies dans le but de fournir un service de qualité aux «clients» (notamment pour la réponse aux questions, le traitement des pro-blèmes, la fourniture des services de base, la polyvalence indispensable). Il s’appliquera évidement aussi à d’éventuels partenaires externes (out-sourcing RH).

Figure 6.5: La mission de garant de la gestion administrative et du respect du cadre

Poseur de cadre

Réalisateur des opérations administratives

Interlocuteur compétent et accessible

Gestionnaire des données individuelles

Garant de la gestion administrative et du

respect du cadre

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Développeur de l’organisation et des compétencesEtre acteur RH est exigeant et réclame de l’agilité organisationnelle, des compétences éprouvées et une posture irréprochable. Il s’agit en effet d’être reconnu par l’ensemble des parties prenantes comme un acteur compétent, crédible et de confiance, source d’une valeur ajoutée incontes-table. Cet acteur doit s’imposer naturellement comme un partenaire incon-tournable dans la vie de l’entreprise, loin des passages obligés.

Un gros travail sur la simplicité, l’efficacité, l’efficience et l’agilité de l’organisation d’une part, sur les compétences métier RH, business et sur la posture personnelle est à réaliser avec la même attention que celle qui est dévolue aux «clients». L’exemplarité constitue en effet de loin le meil-leur argument pour la conquête du partenariat.

Leader reconnuLe rôle de leader de l’organisation RH apparaît comme central pour la réussite de cet ambitieux programme. Les équipes doivent pouvoir recon-naître un leadership qui donne les orientations et le cadre, qui montre l’exemple, mais surtout qui crée les conditions pour permettre à chacun de prendre et faire évoluer sa place, pour contribuer, avec l’attitude, les com-pétences et la posture adéquates, au succès de la stratégie au travers de la valorisation à tous les niveaux du capital humain de l’entreprise.

Figure 6.6: La mission de leader de l’organisation RH

Stratège pour la fonction RH

Organisateur de la performance et du partenariat interne

Développeur de l’organisation et des collaborateurs

Leader reconnu

Leader del’organisation RH

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DRH, rôle d’avenir ou mort annoncée?

Le modèle peut sembler complexe. Il ne fait que refléter les attentes des parties prenantes envers elle. Ce n’est qu’en tenant compte de ces attentes, en adoptant la posture adaptée, en impliquant ses partenaires et en sachant s’entourer que le rôle pourra être assumé, que les attentes grandissantes des managers de ligne pourront être satisfaites et que la décadence si souvent annoncée et évoquée en introduction n’aura pas lieu.

Il s’agira certainement de faire un saut en termes de compétences, de crédibilité, de leadership et plus généralement de posture. Ce saut est possible, mais les parcours préalables tout comme les formations en RH devront s’adapter en profondeur. Elles devront à la fois sortir du cognitif, du terrain de jeu habituel des RH pour entrer plus dans celui de la stratégie, de l’organisation et du business. Elles devront surtout accorder une im-portance décisive à l’évolution des compétences et de la force personnelle des membres de la fonction, donc à leur capacité à adopter une posture de partenaire et à donner envie à leurs interlocuteurs d’en faire de même.

A retenirLa fonction RH est probablement la plus difficile à exercer de toutes, parce qu’il s’agit d’assumer des missions multiples face à des parties prenantes qui le sont tout autant: 1. En tant que partenaire stratégique de la Direction.2. En tant que partenaire business des Managers.3. En tant qu’interlocuteur et partenaire des individus (collaborateurs et candidats). 4. En tant que garant de la gestion administrative et du respect du cadre pour

l’organisation.5.En tant que leader de l’organisation RH.

Les missions à assumer sont à la fois structurantes et relationnelles, stratégiques et opérationnelles. Par rapport à chacune des cinq parties prenantes identifiées, RH se doit donc d’exercer un rôle stratégique et structurant (le cadre, les proces-sus), un rôle stratégique et relationnel (accompagnement du changement et du développement), un rôle de mise en œuvre des processus (opérationnel et struc-turant) et un rôle d’acteur crédible au quotidien, dans des champs d’influence souvent complexes et contradictoires (opérationnel et relationnel).Cela peut sembler complexe. En assurant la réponse aux attentes de chacune des parties prenantes selon les axes définis, la fonction mettra autant l’accent sur la stratégie, les processus que sur la relation de partenariat proprement dite. Ceci présuppose bien évidemment un gros effort sur l’organisation et les compétences, mais offre définitivement l’occasion de quitter la situation de victime qui subit les événements pour devenir un acteur clé du succès de la stratégie. Et d’oublier une fois pour toutes la question de la justification de son existence, pour la remplacer par une démarche exigeante liée à l’ambition d’excellence et de partenariat.

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7. Mettre en œuvre le partenariat stratégique

Les clés de la réussite

La clé de réussite de l’opération est, comme dans tout changement et stratégie, la mise en œuvre. Et là, les choses souvent se gâtent. Parce qu’il s’agit de transformer une vision (pour peu qu’on en ait une) en organisa-tion, simple, claire, performante, dans laquelle autant les partenaires que les collaborateurs de l’organisation se retrouvent.

Il s’agira aussi de construire un tableau de bord de pilotage, qui per-mettra d’évaluer les progrès au niveau de la stratégie RH de l’organisation, de la stratégie de la fonction RH, de la mise en œuvre de la politique du personnel et de la performance des processus RH.

Le plus difficile à ce niveau, c’est d’échapper à la myriade de consul-tants et fournisseurs qui proposent des solutions miracles toutes faites, où les économies et la valeur ajoutée ne résultent que d’une nouvelle organi-sation ou d’un système informatique qui crache des chiffres clés à la se-conde. Croire dans les promesses d’un acteur majeur du domaine est sou-vent plus facile et confortable que de poursuivre une stratégie et une vision propres. Les solutions mises en œuvre à grand frais, qui n’ont pas répondu aux attentes, voire ont provoqué des effets indésirables, sont nombreuses. Elles devraient donner envie de sortir du mode de penser dominant pour construire une solution qui fonctionne vraiment dans l’esprit du partenariat et de l’identité de l’entreprise. Il s’agit aussi de savoir s’appuyer sur un SIRH adapté, mais de ne pas calquer son organisation sur les exigences de ce même SIRH si tel n’est pas l’intérêt des parties prenantes. Il s’agit de choisir des partenaires ciblés pour faire certaines choses mieux qu'on ne saurait le faire soi-même. Et enfin de développer un tableau de bord qui permette de mesurer les résultats qu’on souhaite vraiment obtenir, pas de donner des tonnes de chiffres standards qui au mieux ne servent à rien, au pire induisent à prendre les fausses décisions ou à aborder les problèmes par la mauvaise porte.

Nous recommandons clairement de savoir s’affranchir de modèles tout faits, dont il faudra bien sûr s’inspirer si utile, mais qu’il s’agit de mettre au service de sa vision et de sa stratégie, et pas l’inverse. Il convient donc de réussir au maximum la transformation souhaitée en s’appuyant sur le potentiel humain existant qu’il faudra peut-être renforcer, en s’appuyant sur des consultants qui comprennent parfaitement le sujet mais n’ont pas

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de modèle tout fait à mettre en œuvre. C’est à l’équipe RH, soigneusement accompagnée et à laquelle on associera des managers et des experts externes selon les besoins, qu’il revient de co-construire sa propre straté-gie, son organisation et de définir les comportements et la posture à adopter, dans l’esprit évidemment de la vision et de la stratégie globale comme du partenariat qu’il s’agit de conquérir.

Une organisation adaptée

Une bonne organisation présuppose une certaine cohérence des activités réalisées, soit dans leur nature (centre d’expertise ou de service), soit dans leur temporalité (stratégique vs. opérationnel), soit par rapport aux interlo-cuteurs concernés (interfaces clients notamment).

On sait que l’opérationnel prend toujours le dessus sur le stratégique. En conséquence, l’importance à accorder au travail stratégique nécessite de focaliser une partie des ressources sur ces tâches, pour éviter que l’argument: «Je n’ai pas eu le temps», ne soit utilisé pour des missions d’importance cruciale.

Une bonne organisation permettra:

ou business, en se concentrant sur la préparation de l’avenir et la mise en œuvre des conditions associées;

-tenaire pour les collaborateurs pour leurs besoins courants (gestion des données, questions) ou particuliers (mal-être, difficultés passagères, conflits, ...);

direction ou aux managers pour la gestion stratégique des aspects hu-mains de l’organisation, que pour la fonction RH pour anticiper les pro-blèmes et assurer une réalisation optimale des processus sous sa responsabilité;

organisation du travail adaptée, permettent de gagner en vitesse, en ef-ficacité et en réactivité (centres de prestations, administration RH, paie, gestion des temps et des absences);

à de meilleures conditions (ressources, compétences, sécurité, coût) que l’on ne pourrait le faire soi-même;29

-borateurs – d’accéder directement, sur plateforme informatique, aux res-

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sources et informations dont ils ont besoin pour agir (réaliser un recrute-ment ou une évaluation; mettre à jour des données), savoir comment procéder dans une situation donnée ou pour trouver les ressources qui leur permettent de prendre pleinement leur rôle et leur vie en mains (mise à jour d’informations personnelles, consultation d’informations, gestion de la formation, accès à des ressources pour la gestion de sa carrière et de son bien-être).

Il sera possible sur cette base de définir une organisation adaptée, en étant conscient des enjeux de sa mise en œuvre. C’est la manière dont elle fonc-tionne qui déterminera en dernier ressort sa qualité. L’adhésion et l’implication des équipes seront décisives en la matière.

Les défis de la mise en œuvre

Le succès de la mise en œuvre dépendra en priorité:

son intégration et la qualité de son fonctionnement;

l’organisation et à celui des parties prenantes concernées.

On accordera donc une attention toute particulière:

– notamment entre les collaborateurs partenaires du business et ceux qui fournissent le support opérationnel, d’expertise ou administratif, pour que chacun contribue avec plaisir au succès de l’organisation cliente et au leur. De la qualité de ce partenariat dépendra celle du partenariat avec les autres parties prenantes, autant sur les modes de fonctionnement que dans la cohérence de la posture adoptée.

Ces aspects constituent un agenda prioritaire pour le leader RH. En respectant ces étapes, en accordant toute l’importance que requiert

la gestion du changement en interne, on se donnera les moyens de faire évoluer en profondeur le rôle de la fonction RH dans l’organisation. En procédant correctement, par étapes et en se donnant suffisamment de temps, le succès sera au rendez-vous.

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A retenirLa mise en œuvre mérite une attention particulière. L’organisation choisie, le système d’information RH, des prestataires externes et les tableaux de bord de pilotages seront des leviers clés du succès, à condition qu’ils soient pleinement alignés sur la stratégie, portés par les acteurs et qu’ils favorisent la collaboration et le partenariat en vue d’une valeur ajoutée maximale pour l’organisation et ses parties prenantes.C’est la vision qui doit primer. L’organisation, le SIRH et les indicateurs sont indispensables, mais doivent rester des moyens au service d’une vision, et pas l’inverse.L’organisation favorisera donc en priorité les interfaces liées au partenariat stratégique/business, mais aussi au partenariat collaborateurs qu’il s’agit de redynamiser. Elle favorisera aussi le partenariat interne à RH, pour simplement être en cohérence et efficace. Elle doit favoriser aussi l’excellence des prestations dans le but de permettre aux managers et aux collaborateurs de libérer du temps pour leur performance et leur développement, en se sentant partie prenante à part entière de la performance humaine de l’organisation.

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8. Perspectives

Au travers de cet ouvrage, nous avons tenté de redonner un vrai sens à la notion de partenariat stratégique, sans laquelle nous ne voyons aucun fu-tur pour la fonction RH. Nous avons donc également répondu à la question de l’avenir même de la fonction RH.

Le besoin du partenariat stratégique est apparu comme évident. Les besoins du business pour réussir dans un environnement de plus en plus complexe et changeant grandissent de jour en jour.

Le terrain de jeu du partenariat stratégique est large, exigeant mais très concret, mais ce n’est plus celui des processus RH habituels. Il s’agit en effet d’entrer sur le terrain de la stratégie et des capabilités, pour faire évoluer le leadership, l’engagement et la compétence au moyen de pro-cessus et d’un accompagnement RH performants.

Ceci est une condition indispensable, mais non suffisante. Nous avons tenté de démontrer que la plupart des démarches entreprises à ce jour ont négligé ce que nous considérons comme le point clé du partenariat stra-tégique: la posture même du partenariat. Cette posture est apparue comme très exigeante au niveau de sa finalité (la vision commune et le terrain de jeu qu’on se donne) et de la relation à construire, basée sur de la confiance et du respect mutuels, sur un dialogue véritable et sur une envie partagée de réussir ensemble. Mais aussi comme très prometteuse.

Sur cette base, nous avons proposé un modèle innovant, centré non seu-lement sur le rôle, mais surtout sur les parties prenantes. La fonction RH a en effet la particularité de devoir répondre à des besoins multiples et com-plexes, en faisant preuve à chaque niveau d’un leadership visible, en tant que:1. Partenaire stratégique de la Direction2. Partenaire business des managers3. Interlocuteur et partenaire des individus4. Garant de la gestion administrative et du respect du cadre5. Leader de l’organisation RH.

Veiller à remplir au mieux ces cinq missions implique une évolution mar-quée dans la réflexion et l’action stratégique, dans l’organisation et le pilo-tage des dimensions RH ainsi que dans le développement de l’engagement, des compétences et de la posture de l’équipe RH.

Une évolution importante des organisations, des outils de pilotage, de l’utilisation des SIRH et des compétences & attitudes des équipes est à

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l’ordre du jour. Pour assurer le leadership RH dont les organisations ont besoin pour assurer leur pérennité.

A notre avis, la fonction RH et ses acteurs ont intérêt à faire le choix d’entrer dans cette dynamique pour ne pas risquer de disparaître comme acteur stratégique, remplacé par d’autres acteurs qui sauront mieux con-tribuer et agir à ce niveau.

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Bibliographie

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Boudreau, J & Ramstad, P., Beyond HR: The New Science of Human Capital, Harvard Business School Publishing, 2007

Business partnering, a new direction for HR. CIPD, 2004

D’Ansembourt, Th., Etre heureux ce n’est pas nécessairement confortable, Les Editions de l’Homme, 2004

Forsyth, P., Managing in the Discomfort Zone, Marshall Cavendish Business, 2005

Gratton L. Living Strategy: Putting People at the Heart of Corporate Purpose, Pearson Education, 2000

Harvard Business Review: «10 must reads on leadership», 2008

Harvard Business Review, «10 must reads on strategy» , 2008

Harvard Business Review, «10 must reads on change», 2008

Huselid, M, Becker B, Beatty, R., Tableaux de bord sociaux, Village mondial 2005,

Le Louarn J.Y, Gestion stratégique des ressources humaines, Ed. Liaisons, 2010

Kaplan J.R., Norton D.P., The balanced scorecard, Harvard Business School, Boston, 1996

Kenton, B, Yarnall,J, HR - The business partner, Elsevier, 2005

Kohlrieser, G., Hostage at the table, Warren Bennis Book, 2006

Robinson, D and Robinson, J., Strategic Business Partner: A Critical Role for Human Resource Professionals. Berrett-Koehler Publishers. Inc., 2005

Ulrich, D., Human Resource Champions: the next agenda for adding value and delivering results. Harvard Business School Press, 1997

Ulrich, D., Smallwood, N., Capitalizing on capabilities, Harvard Business Review, June 2004

Ulrich, D., Brockbank, W, RH, créateur de valeur pour l’entreprise, De Boeck, 2010

Hammonds, K., «Why We Hate HR» Fast Company. Issue 97, 2005

Jamieson, D. W, «Strategic Human Resource Thinking» in Preziosi, R. The 2007 Pfieffer Annual: Human Resource Management. Pfieffer/Jossey-Bass, 2007

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Sources

1 Nous utiliserons l’abréviation RH tout au long de cet ouvrage. Nous n’avons volontairement pas souhaité porter la réflexion sur l’intitulé de la fonction, où notre préférence irait plutôt à celle de «Human Capital Management», qui nous semble un peu plus adaptée pour décrire le rôle clé de développement et de valorisation du capital humain dans la durée, pour bien rester focalisés sur le terme clé de cet ouvrage: celui de partenariat.

2 Dave Ulrich, Human Resources Champions, HBSP, 1997

3 Stéphane Haefliger, Vie et mort des RH, HR Today, Octobre 2013, à lire sur www.hrtoday.ch ou www.stephanehaefliger.com

4 En particulier: RH, partenaire stratégique, Séminaire pour cadres dirigeants des RH animé par Eric Davoine, Stéphane Haefliger et Daniel Held, à l’Université de Fribourg – formation continue (www.unifr.ch/formcont/). Ce thème constitue également une ligne directrice forte du MAS HCM de la HEIG-VD, dont l’auteur de cet ouvrage est l’un des co-fondateurs (www.mas-hcm.ch). Voir aussi l’outil ©Strategic Partnership et les modules d’accompagnement proposés – www.piman.ch.

5 J.L. Heskett, Th. Jones, G. Loveman, W. E. Sasser, and L. Schlesinge, Putting the service-profit chain to work, HBR, 1994

6 Kaplan et Norton, HBR, 1992 et 1993

7 Th. Davenport, 1990; Hammer & Champy, 1993

8 D. Ulrich, HR Champion, 1997

9 Voir Besseyre des Horts, 2007, qui montre les déficits persistants en termes de partenariat stratégique; également Lawler, E., Boudreau, J. and Mohrman, S. A. Achieving Strategic Excellence. Palo Alto: Stanford, 2006, dans une étude menée aux USA qui a révélé que, de 1995 à 2004, le rôle stratégique du DRH ne progressait pas.

10 E. Davoine, Etude réalisée en Suisse romande en 2009; voir aussi Davoine E., Emmenegger S., Minouni S., «Facteurs de mutations et spécificités nationales de la GRH: résultats d’une étude des grandes tendances RH en Suisse romande», Management et Avenir, No. 49, décembre 2011.

11 D. Ulrich, W. Brockbank, RH, créateur de valeur pour l’entreprise, De Boeck, 2010

12 De nombreux ouvrages ont paru sur les questions de stratégie RH, sans toujours réussir à faire beaucoup plus que de montrer que les RH sont stratégiques par nature, et que l’utilisation des méthodes stratégiques apporte une vraie plus- value. Voir p. ex. Jean-Yves Le Louarn, Gestion stratégique des ressources humaines, Ed. Liaisons, 2010

13 Daniel Held, Où est passé l’émotionnel, Agefi Indices, Octobre 2013

14 Voir D. Ulrich, N. Smallwood, Capitalizing on capabilities, Harvard Business Review, June 2004

15 Ces éléments sont issus du modèle S.E.P. (Satisfaction – Engagement – Performance) qui a été développé spécifiquement pour mesurer et comprendre l'engagement. Voir Daniel Held et Olivier Saurais, Persorama, Juin 2010.

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16 La structure de ce modèle est celle de Wave™, l’architecture proposée par l’équipe du Professeur Peter Saville sur la base de plusieurs années de recherche, que nous avons retenue ici pour sa pertinence, sa cohérence et sa souplesse d’utilisation. C’est aussi celle d’un outil particulièrement puissant, qui mesure la compétence à partir des motivations et talents de chacun, sans se limiter à la seule personnalité comme le font la plupart des outils d’évaluation.

17 La littérature en matière de leadership est particulièrement abondante. Elle a concerné toute une série de styles: leadership stratégique, participatif, inspirant, partenariat ou de changement pour n’en citer que quelques-uns. Nous recom-mandons à ce niveau la lecture de l’excellent dossier de la Harvard Business Review «10 must reads on leadership», disponible sur www.hbr.org (avec notamment des contributions de Collins, Drucker, Goleman, Goffee, Kotter, Minzberg, Senge).

18 Ces éléments forment la base du modèle PIMAN du leadership. Voir www.piman.ch

19 La littérature abonde également sur les sujets stratégiques. Nous recommandons là aussi la lecture des «10 must reads on strategy» de la Harvard Business Review (www.hbr.org), et «10 must reads on change».

20 J. R. Kaplan and D. P. Norton, Measuring the Strategic Readiness of Intangible Assets, in HBR, Feb. 2004, pp. 52-63; J. R. Kaplan, D.P. Norton (1996), The balanced scorecard, Harvard Business School, Boston; M. Huselid, B. Becker et R. Beatty (2005), Tableaux de bord sociaux, Village mondial, Pearson Education, Paris; Daniel Held et Romain Bureau, Un tableau de bord pour piloter le qualitatif, L’Expansion Management Review, Juin 2004; Daniel Held, Le tableau de bord stratégique, Agefi Indices, Mai 2008

21 Une communication appropriée de ces indicateurs à toute l'organisation est évidemment à prévoir.

22 L. Gratton, Living strategy, Putting people at the heart of corporate purpose, Pearson Education, London, 2000.

23 Le contenu de ce chapitre doit beaucoup à Laurent Schutz, psychologue du travail et fondateur de la méthode Equites de développement du leadership et du partenariat (www.equites.ch), dont les apports théoriques, conceptuels et pratiques ont significativement enrichi nos propres réflexions et travaux.

24 La littérature sur le sujet n’est pas très abondante. Citons B. Kenton, J. Yarnall (2005), HR - The business partner, Elsevier; voir aussi le dossier/guide publié en 2004 par le CIPD, www.cipd.uk.org: Business partnering, a new direction for HR.

25 Daniel Held, Vers une culture du partenariat, Agefi indices, Juin 2013

26 L. Schutz, modèle Equites de la relation, supports de cours – www.equites.ch

27 Lire notamment Managing in the discomfort zone, P. Forsyth, Marshall Cavendish Business, 2005

28 Lire à ce sujet la biographie de Nelson Mandela, un exemple de comment ne pas devenir otage, ou l’ouvrage: Hostage at the table de George Kohlrieser, Warren Bennis Book, 2006

29 Chartin, Th, Bouvard, P., Externalisation RH, Ed. d’Organisation, Paris, 2008; Favre, F., L’externalisation RH, de la sous-traitance à l’outsourcing, Dossier HRM no 24, 2011.

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Dossier HRM N°1: Leadership et conduite d’équipe Guide à l’usage des managers de proximité

Dossier HRM N°2: La gestion des compétences Anticiper, évaluer et agir

Dossier HRM N°3: Le coaching dans tous ses états Sous la direction de Bernard Besson

Dossier HRM N°4: L’assessment Quand, Pourquoi, Comment

Dossier HRM N°5: La justice dans les organisations Des discours aux pratiques

Dossier HRM N°6: Ressources humaines en PME Entre proximité et professionnalisation

Dossier HRM N°7: Loutil 360° Processus d’application en organisation

Dossier HRM N°8: Le gouvernement d’entreprise Un territoire à conquérir pour les RH

Dossier HRM N°9: Mesurer les niveaux de satisfaction Des nouveaux indicateurs pour les DRH

Dossier HRM N°10: Le management humain Pour un abord collectif de la performance en milieu professionnel

Dossier HRM N°11: Le savoir-vivre au bureau Le retour des bonnes manières

Dossier HRM N°12: HR Business partner Opportunités et risques pour la fonction RH

Dossier HRM N°13: Paradoxes de la gestion des âges Impératifs économiques et réalité de l’entreprise

Dossier HRM N°14: L’accompagnement de l’innovation vers le succès Une nouvelle culture d’entreprise

Dossier HRM N°15: Les dirigeants nomades Comment les identifier, les attirer et les retenir

Dossier HRM N°16: Santé au travail et ressources humaines Concilier performance de lentreprise et santé des collaborateurs

Dossier HRM N°17: Recrutement Méthodes et pratiques actuelles

Dossier HRM N°18: Rémunération Des instruments modernes pour une rémunération équitable

Dossier HRM N°19: Le marketing RH Quand les outils marketing aident à repenser la fonction RH

Dossier HRM N°20: Comment utiliser la complexité Outils, attitudes et compétences à développer

Dossier HRM N°21: Gestion de la diversité L’urgence d’un management interculturel

Dossier HRM N°22: Tendances RH en Suisse romande Facteurs de mutation et dossiers prioritaires

Dossier HRM N°23: La conduite de l’entretien annuel Eviter les travers, développer l’organisation

Dossier HRM N°24: L’externalisation RH De la sous-traitance à l’outsourcing

Dossier HRM N°25: Cadre de référence pour des méthodes actives en formation Du participant assis au participant en mouvement

Dossier HRM N°26: Quand le visionnaire devient aveugle Coacher les dirigeants brillants et abrasifs

Dossier HRM N°27: Efficience et responsabilité sociale Allier Work-Life Balance, productivité et qualité

Dossier HRM N°28: Le Management des Connaissances Diffuser et utiliser l’information et le savoir au sein de votre organisation

Dossier HRM N°29: La psychologie positive entre dans l’organisation Nouveaux leviers de satisfaction et de motivation

Dossier HRM N°30: Débauchage d’employés Prohibition de concurrence Liberté de mouvement de l’employé et protection des intérêts économiques de l’employeur

Dossier HRM N°31: Du réseautage au management collaboratif Préfaces de Lise Cardinal et Louis Balme

Dossier HRM N°32: Réussir le partenariat stratégique: place à la posture Le modèle du partenaire stratégique revisité

La collection augmente de quatre numéros par an. Pouvant être obtenus en combinaison avec l’abonnement à HR Today, les Dossiers HRM sont également disponibles individuellement. Les numéros plus anciens peuvent être commandés ultérieurement auprès de la maison d’édition.Pour de plus amples informations: www.hrtoday.ch

Les Dossiers HRM

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Daniel Held

Réussir le partenariat stratégique: place à la postureLe modèle du partenaire stratégique revisité

La notion de RH partenaire stratégique, en anglais Strategic Business Partner, a profondément modifié le rôle des RH en entreprise depuis le milieu des années 1990. Ce repositionnement, qui était sensé combler le peu d’influence qu’avaient les RH dans la conduite opérationnelle (le busi-ness), n’a que partiellement tenu ses promesses. Parfois synonyme de perte d’indépendance et d’inféodation à la ligne, le concept a été forte-ment critiqué. Dans ce Dossier HRM, le consultant et enseignant Daniel Held revisite le modèle en insistant sur une dimension trop souvent oubliée qui est celle de la posture. Partant d’une critique du modèle de Dave Ul-rich, l’auteur montre comment les DRH doivent s’impliquer dans «une re-lation dynamique et stimulante» avec la ligne et se passionner pour leur réussite afin de devenir un partenaire incontournable pour la performance organisationnelle. En d’autres termes, le responsable RH/DRH doit lui-aussi développer son leadership et sa force personnelle pour donner envie à l’autre (le manager business) d’intégrer positivement la dimension humaine dans sa pratique managériale. Daniel Held revisite ainsi la notion de partenariat stratégique, en apportant un éclairage nouveau sur les outils et le terrain de jeu qui devraient être ceux de la fonction RH (performance humaine, politique du personnel, processus RH et excellence des presta-tions RH). Et sur la manière d’habiter ce rôle.

Les Dossiers HRM sont des concentrés d’informations spécifiques intéressant les spécialistes de la fonction ressources humaines et de la formation. Chacun des numéros se propose dapprofondir un sujet donné.

Les Dossiers HRM sont publiés quatre fois par an et sont disponibles en complément à l’abonnement au magazine HR Today, le journal suisse des Ressources Humaines, ou encore sous forme d’exemplaires individuels.

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