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1 «Berlin ist dazu verdammt : immerfort zu werden und niemals zu sein. » Karl Scheffer, Berlin. Ein Stadtschicksal, 1910. « Je ne le nie pas, je suis parfois saisi par le vertige absurde de l’Histoire, néanmoins je ne crois pas qu’il y ait une autre ville en Europe où l’on ressente aussi intensément le présent et la route qui y mène. » Imre Kertesz, Pourquoi Berlin ?, p.20 Compte-rendu de l’atelier « Topographie historique de Berlin : une autre histoire de l’Allemagne du XXème siècle » organisé par Aurélie Denoyer (Centre Marc Bloch) et Elissa Mailänder (SciencesPo Paris): Pourquoi Berlin ? Peu de lieux – et encore moins de capitales européennes - ont été objet et sujet de change- ments politiques si radicaux que Berlin, ville incarnant les bouleversements politiques du

Compte-rendu de l’atelier « Topographie historique de ... · inscription du nazisme dans une continuité historico-mythique cohabite avec un projet urbain et social de modernisation

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«Berlin ist dazu verdammt : immerfort zu werden und niemals zu sein. » Karl Scheffer, Berlin. Ein Stadtschicksal, 1910. « Je ne le nie pas, je suis parfois saisi par le vertige absurde de l’Histoire, néanmoins je ne crois pas qu’il y ait une autre ville en Europe où l’on ressente aussi intensément le présent et la route qui y mène. » Imre Kertesz, Pourquoi Berlin ?, p.20 Compte-rendu de l’atelier « Topographie historique de Berlin : une autre histoire de l’Allemagne du XXème siècle » organisé par Aurélie Denoyer (Centre Marc Bloch) et Elissa Mailänder (SciencesPo Paris): Pourquoi Berlin ?

Peu de lieux – et encore moins de capitales européennes - ont été objet et sujet de change-ments politiques si radicaux que Berlin, ville incarnant les bouleversements politiques du

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XXème siècle. Berlin, capitale de l’empire Wilhelmien devient une métropole pendant la courte démocratie weimarienne avant d’être couronnée capitale politique, économique et culturelle par un régime raciste et totalitaire qui finit dans les cendres en mai 1945. Elle connait peu l’occupation par les quatre forces alliées qui aboutit à une partition de la ville en 1949 entre Berlin-Est, sous le joug des Soviétiques et Berlin-Ouest, cheval de Troie des occi-dentaux. Pendant 40 ans, Berlin sera le centre d’une compétition idéologique entre deux sys-tèmes politiques engagés dans une Guerre froide et servira de vitrine au communisme à l’Est et au capitalisme à l’Ouest, ce qui fera d’elle une ville juxta-opposée. En 1989, le mur - sym-bole de la barrière entre deux mondes – tombe, ce qui ouvre une nouvelle page de l’histoire de l’Allemagne réunifiée. A travers cet atelier soutenu par l’Université Franco-allemande, le Centre Marc Bloch et le département d’histoire de SciencesPo Paris, nous avons proposé à des mastérants (M2), doc-torants et jeunes chercheurs de sonder la topographie historique des dictatures allemandes du XXème siècle dans la ville de Berlin afin d’interroger aussi bien la matérialité de l’espace et sa signification que les pratiques qui y sont liées. Cet atelier a été conçu à la fois pour un pu-blic d’experts mais également pour un public d’intéressés non-experts de l’histoire allemande du XXème siècle, germanophones et francophones. La collaboration internationale entre étudiants, doctorants, jeunes chercheurs français, allemands, italiens, nous a permis de franchir la barrière des langues et de stimuler ainsi un échange entre différentes traditions et cultures scientifiques. Dans cet atelier, la ville n’était pas perçue comme un système anodin de rues et de bâtiments, mais bien plus comme expression et réservoir de pratiques, d’idées, d’expériences et de mé-moires. En effet, entre les habitants et une ville s’installe une relation dialectique, dans la me-sure où ils s’influencent réciproquement. C’est cette dialectique que nous avons souhaité dé-cortiquer. Cette excursion s’est ancrée autour de trois thématiques : 1/ l’architecture comme représenta-tion du pouvoir ; 2/ les lieux de la terreur dans la ville ; 3/ les enjeux de mémoire 1/ L’architecture comme représentation du pouvoir Nos visites nous ont confrontées à trois exemples de réalisation architecturale concrète du régime ayant une fonction claire et participant à l'ambition nazie de remodelage de la société allemande : Tempelhof, le Ministère de l'aviation et Olympia Stadion ont tous trois été conçus comme des lieux inscrivant l'exercice du pouvoir nazi dans une nouvelle topographie de la ville et en ce sens révélaient une fonctionnalité explicite. L'architecture nationale-socialiste est souvent organisée autour d'un point de convergence attirant et liant les masses vers le centre du pouvoir, un « espace hypnotique » selon Miguel Abensour. Ainsi, l'allée triomphale d'Olympia Stadion constitue une véritable ascension vers le stade construit spécialement pour les jeux olympiques de 1936 par une main d’œuvre ex-clusivement allemande afin de combattre le chômage et exalter l’artisanat germanique. Dans cette représentation du pouvoir et de son projet politique et social de régénération de l'Alle-magne, le nazisme établit des connexions esthétiques construisant la pérennité historique de la race aryenne, un temps qui devient ainsi mythique.

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Dans les compositions hétéroclites de l'esthétique nazie, le modèle grec antique côtoie égale-ment des évocations d'une tradition germanique médiévale. Ainsi au-delà de cette fonction première, le pouvoir se met en scène lui même par le gigantisme de son architecture. Cette inscription du nazisme dans une continuité historico-mythique cohabite avec un projet urbain et social de modernisation et de valorisation du progrès technique. Lieu de divertissement créé par le nazisme, le stade permet, autant esthétiquement que fonctionnellement, une intégration des masses transformées en une communauté, la Volksgemeinschaft. Ce lieu a ainsi une fonc-tion de mobilisation et d'inclusion visant à construire un consensus soutenant le régime. Aussi, l’édifice massif du nouveau Ministère de l'aviation, conçu par l’architecte Ernst Sagebiel en 1934-1935, répondait à des besoins administratifs pratiques en adoptant un plan architectural fonctionnel : à chaque fenêtre correspond un fonctionnaire dans un des 1200 bureaux de 15m2.

Ce fonctionnalisme moderne reflète aussi l'ordre social nazi : chaque individu se voit attribuer une case et un numéro, chacun est à sa place. Aussi, au-delà de cette fonction première, le pouvoir se met en scène lui même par le gigantisme de son architecture. Dans le Berlin de 1945, encore marqué dans l'urbanisme par le nazisme, un autre projet urbain vise à légitimer le nouveau rapport de force, issu de la fin de la guerre, ajoutant ainsi, dans la ville, une strate architecturale et idéologique supplémentaire. Si la RDA superpose une nou-velle couche dans le palimpseste berlinois, elle réutilise également les lieux du nazisme en raison notamment de leur fonctionnalité. Le Ministère de l'aviation du Troisième Reich est occupé par les Soviétiques avant de devenir la « Maison des ministères » de la RDA, puis le Ministère des finances actuel : les symboles de façade et les drapeaux changent mais, en dépit de ses différentes temporalités, l'édifice demeure ancré dans l'espace institutionnel.

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La continuité des fonctions politiques et institutionnelles et d'une dynamique de remodelage par le haut n'est pas la seule logique participant à la complexité de la topographie berlinoise : s'y ajoutent des phénomènes de réappropriation par le bas. Ainsi Alexanderplatz, lieu emblé-matique des parades militaires sous la RDA, est devenu la place des grands rassemblements de protestation civile contre la dictature.

La Karl Marx Allee, lieu où se retrouvait « le peuple » lors des défilés du 1er mai se trouve dans un état d’abandon depuis que l’Etat, qui l’avait construite, a disparu.

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Pourtant, tout au long de la RDA, tous ces édifices incarnaient une volonté de modernisation par le haut, une tentative par le pouvoir national-socialiste et la dictature de la SED d’impulser une forme d'enthousiasme dans la société et, pour reprendre le terme de S. Fitzpa-trik et A. Ludtke, d'énergiser le quotidien. Paradoxalement, la Karl-Marx Allee, tout comme Alexanderplatz, impulsés par le modèle soviétique, suscitent une certaine nostalgie chez les anciens Berlinois de l'Est. A l'image de l'Alexanderplatz, les fonctions commerciales, récréatives et touristiques marquent aujourd'hui de leur empreinte la topographie berlinoise témoignant de possibles réutilisations et conver-sions de lieux emblématiques. Ces formes de réappropriations fonctionnelles, civiles ou récréatives ont suscité chez nous des questionnements ouverts : sont-elles les témoins d'un nouveau rapport à la ville dans un Ber-lin réunifié et démocratique ? Comportent-elles un degré d'oubli (lors des visites guidées il a été finalement assez peu question de s'étendre sur les usages et surtout sur les usagers de ces espaces durant le nazisme) ? Cet urbanisme, porteur d'un projet de remodelage radical, aurait-il perdu toute sa charge idéologique ? Aussi, permanence et réappropriation ont suscité une interrogation chez nous : dans quelle mesure peut-on aborder cette architecture emblématique sous l'angle de ses fonctions mais aussi des ses usages ?

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2/ les lieux de la terreur dans la ville Le concept de terreur est à la fois courant et insaisissable. Associé à la période national-socialiste et à la dictature du SED, sa simple évocation fait tout de suite écho à la mémoire collective mais ne permet pas pour autant de le rendre visible. Le mémorial « Topographie des Terrors », situé dans la Prinz-Albrecht-Strasse (l’actuelle Niderkirchnerstrasse) et construit sur les ruines de l’office central de sécurité du Reich (RSHA), qui abritait la Gestapo (police secrète) et les services de sûreté de la SS, met en scène un vide au cœur de la ville. Une concentration inhabituelle du pouvoir était ainsi réali-sée sur un espace géographique réduit. Détruit entièrement à la fin de la seconde guerre mon-diale, du fait de son placement sur le tracé du mur, ce site devient un No man’s land pendant la partition de Berlin. Une exposition temporaire lancée en 1987 a, pour la première fois, retracée l’histoire de ce lieu et avec la réunification de la ville, le Sénat de Berlin a décidé d’y installer un centre de documentation, inauguré en 2010.

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L’exposition sur le site de l’ancien quartier gouvernemental de l’état SS réintroduit le rôle des acteurs dans les différents processus de terreur mis en place par le régime nazi. Ni mémorial aux bourreaux ni mémorial aux victimes, la « Topographie des Terrors » illustre la mise en place de la politique répressive nazie en illustrant la (part de) responsabilité et les marges de manœuvre des acteurs, entre contrainte et participation active. En effet, pour l’historien, les notions de « marge de manœuvre » ou encore d'« agency » (« capacité d'agir ») sont proba-blement plus heuristiques que celles de « liberté » / « coercition ». De la même manière, il faut peut-être prendre ses distances avec le concept de « totalitarisme », qui connote l'impos-sibilité de toute rébellion, et peut empêcher de penser l'ambivalence des pratiques. Les exem-ples de résistances, qu'ils soient particulièrement ostensibles (comme la manifestation d'aryennes mariées à des juifs de Rosenstraße / manifestation du 17 juin 1953) ou plus im-perceptibles (tel cet homme aux bras croisés perdu dans une foule de saluts nazis ou ces Al-lemands de l’Est qui en apparence se laissaient recruter par la Stasi mais qui finalement ne livraient aucune information portant préjudice à autrui), nous aident à mieux comprendre quelles étaient les marges de manœuvre dont disposaient réellement les acteurs au sein du régime nazi et de la dictature est-allemande.

Les mémoriaux de Sachsenhausen (camp de concentration sous le national-socialisme) et Hohenschönhausen (centre de détention provisoire de la sécurité d’état) mettent en relief l’inscription de la terreur dans le quotidien : Bien qu’ils soient des lieux cachés, secrets, loin des centres et difficiles d'accès, ils sont également au milieu de quartiers résidentiels, dans lesquels vivaient leurs co-citoyens. Cependant, les pratiques de la terreur diffèrent. Dans les camps, le corps du prisonnier est dégradé par les privations de nourriture, de sommeil, de

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soins sanitaires, d’habillement et marqué par les humiliations physiques lors de rituels de bri-mades de la part des surveillants SS, telles que l’obligation d’exercices physiques. A Hohenschönhausen, la violence s’exerce non pas sur les corps mais sur les esprits : la tor-ture psychologique fait partie intégrante du processus de questionnement : par la privation de sommeil, des repères spatio-temporels et de l’isolement.

La visite du mémorial d’Hohenschönhausen a provoqué de nombreuses interrogations quant au rôle joué par l’émotion dans la transmission de la mémoire : l’identification du visiteur aux victimes est-elle nécessaire à cette transmission ou une approche plus rationnelle et probléma-tisée, comme nous avons pu le voir lors de la visite de l’exposition « Topographie de la ter-reur », serait-elle plus fructueuse ?

3/ Les enjeux de mémoire

Durant la totalité de l’excursion, un fil rouge nous guidait : celui des enjeux de mémoire. En effet, on est frappé à Berlin par une tension omniprésente entre la nécessité de rendre visible un lourd passé, et l'impossibilité de le rendre trop visible. Souvent, une matérialisation hori-zontale plutôt que verticale de la mémoire peut apparaître comme une manière de résoudre cette tension, une forme de compromis. Sous nos pieds, au niveau du sol ou enfoui, le passé se donne à voir sur le mode de la présence-absence. Comme à Bebelplatz, lieu de la « Bü-cherverbrennung » en 1933 (autodafé), où l’on peut manquer de le voir, si on ne sait pas qu'il est là.

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Ou encore le Mur, majoritairement détruit, mais dont la marque du tracé subsiste au sol sous la forme d'une double ligne de pavés. A Sachsenhausen également, seules deux baraques ont été reconstituées, les autres étant figurées par des rectangles de cailloux plus foncés au sol. A chaque fois, on peut penser à une ombre persistante, un à un spectre, à moins que cela ne si-gnifie que les édifices ont été détruits, mais que les fondations sont toujours là ? Enfin, tou-jours au sol, entre discrétion et omniprésence, les petites plaques en cuivre commémorant les familles juives déportées sont une initiative intéressante : en effet, elles ne sont pas installées par les autorités, mais seulement à la demande et grâce aux financements des habitants, libres de proposer ou non ce projet dans leur immeuble.

Cette mémoire est cependant remise en question, contestée, définie et le vandalisme sur des lieux de mémoire est l'un de ces modes de remise en question que nous avons pu observer : nous avons été frappés par la volonté de laisser le vandalisme visible, comme pour assumer et donner à voir la conflictualité de la mémoire, les réactions émotionnelles et politiques qu'elle provoque. Ainsi, au camp de concentration de Sachsenhausen, la baraque reconstituée qui a été incendiée par des néonazis suite à la visite du Premier ministre israélien Ihzak Rabin en 1992, n'a pas été reconstuite selon son aspect initial. On a aussi l'exemple de l’œuvre d'art de Christian Boltanski au Bundestag, constituée de tiroirs comportant les noms des 4781 députés « démocratiquement élus » au Parlement allemand entre 1919 et 1999, dont Adolf Hitler : lorsque le tiroir en question a été détérioré par un visiteur en 2012, la décision de le réparer ou non a suscité une controverse portant notamment sur la légitimité du scrutin de 1933 en ques-tion – pour qu'on décide finalement de laisser le tiroir en l'état, l'artiste considérant que cela faisait partie de l’œuvre, qui était faite pour susciter la réflexion.

Par ailleurs, du fait des nombreuses visites guidées proposées lors de l’excursion, la figure du guide, en tant qu’acteur de la construction des mémoires, a soulevé parmi nous bon nombre de questions : on peut se demander dans quelle mesure ils se contentent de transmettre une

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mémoire qui aurait déjà été construite préalablement par des acteurs « majeurs » comme les historiens et directeurs de musées. En réalité, « guide » ne constitue pas toujours une profes-sion en tant que telle, et plusieurs statuts de producteurs de mémoire peuvent se superposer : les guides peuvent être des chercheurs par ailleurs, des anciennes victimes d'une institution carcérale (comme la prison de la Stasi que nous avons visitée).

Le cas de la transformation d'abris anti-aériens pour la population civile allemande en lieux touristiques (Unterwelten e.V) est intéressant : elle est le fait d'amateurs passionnés, qui ont d'abord mené des recherches archéologiques en toute illégalité, avant de parvenir à obtenir de la part des autorités non seulement des autorisations, mais aussi finalement une reconnais-sance et un soutien financier. La seule cohérence de leur projet est peut-être leur passion pour les souterrains (qu'il s'agisse d'abris de l'époque nazie ou de la guerre froide, ou encore de tunnels sous le mur de Berlin), il est difficile de cerner les contours de ce qui serait leur projet mémoriel, qui semble s'improviser au fur et à mesure de leurs découverte. Il semblerait que l'apport des guides aux constructions mémorielles se situe au niveau de la charge émo-tionnelle dont ils sont les seuls dépositaires, de la manière dont ils transmettent un contenu qu'ils n'ont pas, en règle générale, eux-mêmes définis. Ils peuvent faire preuve d'une relative autonomie dans leur « performance » mémorielle. La dimension de pathos très présente dans la visite de la prison de la Stasi posait elle aussi la question de la prédominance de l'émotion-nel sur le rationnel, du narratif sur l'analytique. En fait, les attentes du public sont différen-ciées : ce qui peut sembler inopportun à des visiteurs au profil « universitaire » paraîtra plus approprié s'il s'agit d'un public de type scolaire, plus jeune et parfois ostensiblement indiffé-rent.

Conclusion : Les changements de régime se personnifient dans la topographie de la ville et nous avons donc interrogé sa matérialité et sa signification. En portant la focale sur les deux dictatures, nous n’avons pas voulu uniquement sonder les buts politiques des planifications (top-down) mais aussi les manières concrètes dont ces visions - pour ne pas dire utopies - se sont mises en place. Il s’agissait d’interroger l’interaction entre spatialité et société, afin de saisir les dimen-sions tactiles et quotidiennes des expériences vécues (bottom up). Il s’agissait également de développer une sensibilité pour l’histoire du quotidien à travers l’étude des lieux de sociabilité et des pratiques sociales qui y étaient rattachées. Les constructions laissent en effet des traces visibles, exploitables par l’histoire architecturale mais également économique, politique, comportementale. Un espace architectural, conçu puis construit, est constamment approprié par ses « utilisa-teurs », qui eux aussi participent à modifier sa destinée. Cela amène non seulement à repenser l’espace à partir de son utilisation, mais aussi à reposer la question de l’idéologie sous un an-gle nouveau, en s’interrogeant sur l’expérience individuelle voir collective, sur la réalité vé-cue et les pratiques culturelles et sociales : Quel impact a l’architecture sur les gens qui y tra-vaillent et y vivent chaque jour ? Dans quelle mesure l’architecture et la matérialité esthétique qui les entourent, forgent leur façon d’agir et leur manière de penser ? Qu’est-ce que cette architecture a à voir avec l’humain ? Dans quelle mesure l’humain peut-il détourner la signifi-cation donnée primairement au bâti ? Une telle réflexion permet de lier davantage l’homme et la pierre. Une autre piste de réflexion concerne le traitement de la mémoire, la crainte des traces qui disparaissent et de celles qui restent : que faire des bâtiments construits sous le nazisme ou construits sous la dictature est-allemande afin d’exalter ces régimes ? Comment « dénazifier » ceux qui n’ont pas été détruits par les bombardements alliés ? Quelle réutilisation pour des bâtiments, symboles du régime répressif est-allemand, tels l’actuelle Soho-house dans le quar-

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tier de Mitte, club de luxe berlinois, anciennement siège du SED ? Ne pose-t-il pas problème d’utiliser aujourd’hui l’Olympia Stadion ou la Karl-Marx Allee pour la liesse populaire ? Au-tant de questions qui nous poussent à vouloir organiser un nouvel atelier en 2014.

Les auteurs : Mathieu Albouy, Giuditta Betinelli, Mona Claro, Aurélie Denoyer, Sotera Fornero, Caroline Garrido, Ivan Jaffrin, Aude Le Gallou, Elissa Mailänder, Thomas Maineault, Séverine Marguin, Claire Morelon, Nina Valbousquet, Chong Xu.